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Je suis seule. Dans cette immense pièce circulaire inondée d'une lumière qui semble naturelle. Le problème c'est que cette lumière ne vient pas de la fenêtre mais d'un lustre brillant. Je n'ai jamais vu un tel lustre. Le lustre déborde de pierre précieuse. J'ignore comment je le sais car je n'ai jamais appris ça. Je le sais, c'est tout. Vous ne savez pas non plus comment vous connaissez votre prénom mais vous le connaissez, c'est tout.
Devant l'immense fenêtre toute noire, il y a un fauteuil en cuir bien rangé derrière un bureau. Sur le bureau en bois clair, il y a un ordinateur gigantesque, une boite de crayons taillés et un téléphone. En face du bureau, deux chaises aussi en cuire qui ont l'air très confortables. Le sol est en bois clair mais plus foncé que le bureau. Le sol semble verni. Les murs blancs sont recouverts de cartes, de schémas, de graphiques, de courbes... Par moment, a la place du mur blanc, il y a des portes toujours en ce bois clair. Seule la poignée dorée me permet de savoir par laquelle je suis rentrée. Inutile d'essayer de sortir, je sais déjà qu'elle ne s'ouvrira pas.
Quand l'homme revient, je suis toujours debout.
-Assied-toi, dit gentiment l'homme en désignant un des deux fauteuils.
Je m'assois et c'est seulement une fois que l'homme est assis que la vérité me frappe. Je le connais. Je ne sais pas d'où, ni comment et encore moins qui il est mais ce costume noir, ses yeux noirs et ce visage. Tout me semble familier et étrangement inconnu. Surtout ses cheveux blancs qui chaque fois que je les vois, j'ai l'impression qu'ils devraient être noirs. Il pose ses mains puissantes croisées sur le bureau. C'est à ce moment que je remarque sa bague. Cette bague rend plus puissante l'odeur qui me hantait hier matin en me réveillant. Sur cette bague, il y a deux cercles. Le plus grand est sombre et l'on y voit des menottes raccrochée au deuxième, beaucoup plus petit et clair. Il occupe une toute petite partie du premier. Dans ce cercle, deux ovales s'entrelacent.
Le souvenir de mon arrivée me revient. Ce jour-là, un homme m'avait posé une question:
-De quoi te souviens-tu?
Et j'avais répondu:
-Rien
Ce jour-là, j'ai plongé mes yeux dans les siens. Une seconde, pas plus mais ses yeux noirs m'ont marqués car je ressentais une telle haine envers eux. Ses yeux, c'est à cet homme avec une énorme bague qu'ils appartiennent.
-Alors ? demande-t-il
Je le regarde étonnée.
-Alors quoi ?
-Tout cela ne te parait pas étrange, dit-il surpris
Je hausse les épaules :
-On s'habitue
Il écarquille les yeux :
-Ce n'est pas la première fois ?
Pendant une seconde je pense mentir mais pourquoi ? Si ce n'est pas moi qui lui dis le directeur s'en chargera et je ne lui laisserai pas ce plaisir.
-Non
Il se remet de sa surprise.
-Depuis toujours
-Non
-Si je vous demande depuis quand, me répondrez-vous ? dit-il avec malice
Je réfléchie puis choisi d'être sincère :
-Non
-Je m'en doutais
Il reste silencieux puis me regarde :
-Tu sais, ce n'est pas facile pour moi de prendre des décisions alors que je ne connais même pas la moitié de ce qui se passe dans cet école, dit-il presque triste. Vu que tu vis ici depuis longtemps et que tu sais tout ce qui se passe, je me disais que peut-être si tu arrivais à me faire confiance, tu pourrais me dire tout ce que je ne sais pas?
Je me plaque contre mon siège les yeux écarquillés. Il a rêvé ou quoi ? Je ne vais certainement pas tout lui dire alors qu'il est de mèche avec le directeur. En plus, c'est à cause de lui que moi et Solfian on est emprisonnés ici.
-Tout se passe parfaitement bien ici, dis-je en accentuant le ''parfaitement''
Il soupire. Je demande prudemment :
-Je peux partir ?
-Oui, dit-il triste
Je me lève et tourne la poignée en or. Au moment où je sors il me dit :
-Reviens quand tu veux
Je ferme la porte en me promettant de ne jamais revenir.
Après cette journée, plus rien ne se passe et ma vie reprend un cours normale. Malheureusement, je m'ennuie fermement. Pendant tous ces évènements inhabituel, j'avais rêvé que tout redeviennent normal et maintenant je trouve ma vie monotone et fade. Elle a un goût dont je me suis réellement lassé puis c'est fatiguant d'essayer de se comporter comme les autres sans faire d'erreur. De plus Solfian a disparu, le directeur ne m'embête plus dons plus besoin d'aller voir Mme Chauve et je ne suis jamais retourné voir l'homme à la bague.
Au bout d'une semaine, je fais le même cauchemar dont je suis toujours incapable de me souvenir. Je sais juste que l'homme à la bague était concerné. C'est à ce moment que je décide d'aller le voir.
Une fois devant la porte, je ne suis toujours pas convaincue que c'est une bonne idée mais je frappe quand même. Une jeune fille qui ne doit pas avoir plus d'un ou deux ans de plus que moi me fait entrer. Elle m'indique le fauteuil et me dit les yeux dans le vide :
-Asseyez-vous, je vais prévenir monsieur que vous êtes arrivée si vous voulez bien me donner votre nom, dit-elle sans reprendre sa respiration et tout sur le même ton
Je bredouille :
-Isa...Isabeth...non...euh...Elizabeth... Je m'appelle Elizabeth
Elle se retourne et disparait derrière une porte. Je suis encore surprise d'avoir menti sur mon prénom. Pourtant j'ai le pressentiment d'avoir bien fait.
Je m'assois et l'homme arrive. Ni gros, ni mince, ni grand, ni petit, l'homme est exactement le même. Il s'assoit en face de moi.
-Que voulez-vous boire ? demande la jeune fille sans regardez personne
-Un café, répond l'homme sans la regardez non plus
-Euh...Je ne sais pas...
-Apportez lui donc un chocolat, continue l'homme
La jeune fille repart comme si elle était une machine. Soudain, je comprends. Cette jeune fille est tout ce que je ne veux jamais devenir : Un robot. Quelques minutes plus tard, elle revient et pose une tasse brulante devant moi et devant l'homme. Elle s'en va.
-Alors ?
Je reporte mon attention sur lui. Soudain mon envie de lui parler de mes cauchemars s'évanouie. Pourtant je sens que si je ne dis rien à cet homme, il trouvera un moyens de les découvrir. Le pire, c'est qu'il connaîtra tous mes secrets et ça, c'est absolument hors de question.
-Je me souviens de vous
-Vraiment ? dit-il mi amusé, mi surpris
-Oui, le jour où je suis venu ici pour la première fois.
-Etonnant et te souviens-tu d'autre chose ? demande-t-il toujours les mains croisés sur le bureau
-De tout ce qui a suivi
-Mais rien avant ?
-Non
Je bois une gorgée du chocolat. Il est délicieux. Le meilleur que j'ai bu ( même si je n'en n'ai jamais bu).
-Il est bon ?
Je ne réponds et à la place je demande :
-C'est quoi un cas Wichtig ?
Il manque de s'étouffer avec son café. Il tousse pendant 5minutes. La jeune fille arrive mais il la renvoie d'un geste de la main. Il reprend sa place, retrouve son calme puis me sonde avec ses yeux noirs :
-Elizabeth, cela veut dire qu'il ne faut pas te négliger et que tu menaces tout le système.
Je n'aurai peut-être pas dû poser cette question.
-Je le trouve bien votre système, je me défends avant de me rentre compte de l'absurdité de ce que je viens de dire.
-Il y en a deux d'après le directeur, tu savais ? dit-il sans détourner les yeux
-Non, dis-je en soutenant son regard
-Je sais que tu le connais et tu penses qu'il a raison, il baisse les yeux avec tristesse, vous êtes trop jeunes pour comprendre.
J'ai réellement envie de lui faire confiance mais quelque chose m'en empêche. Cela me rend triste.
-Expliquez-moi, dis-je doucement
-Tu vas me prendre pour un monstre
-Je vous promets de vous écouter jusqu'au bout
-Vraiment ? dit-il avec espoir
-Oui
-A l'époque du grand-père de mon arrière-grand-père, la société a de gros problèmes. Elle en a toujours eu mais là, les grands chefs politiques mondiaux n'arrivaient pas à se mettre d'accord. Quand enfin ils ont trouvé la solution, la population a refusé de s'y soumettre. Mon ancêtre trouvait cela inadmissible. Ils s'étaient creuser les méninges et le peuple n'était pas contents. La vérité c'est qu'on peut faire tout pour améliorer la vie des gens, ils continueront de te détester. Alors le grand père de mon arrière-grand père à monter sa campagne présidentielle et a fait des promesses qu'il ne tiendrait jamais. Il en était conscient mais il s'en fichait car la seule chose qu'il l'importait c'était de devenir président. Il avait des solutions pour mettre fin à tous ces problèmes écologiques, civiles... Il détenait la clé de la société parfaite.
Une fois président, il a commencé à instaurer doucement ce qu'il appelait la Neuévolution. Les gens continuaient de l'adorer et quand la fin de son mandat arriva, le peuple français le réélut. Ils allèrent jusqu'à faire une entorse à la loi pour pouvoirs le garder au pouvoir. Il resta donc 30ans au pouvoir. Ensuite, il transmit ses idées à son fils. Forcément les français le réélurent. Il finit les projets de son père mais il fut plus ambitieux. Il voulut appliquer Neuévolution au monde entier. Ce fut seulement son petit fils qui accomplit ses projets. Mon arrière-grand père avait réussi à appliquer la Neuévolution au monde entier. Il légua ensuite le pouvoir à mon grand-père. Il n'avait pas le droit mais personne ne vint protester. Son père avait malheureusement eu des actes violents mais quelle importance. Ils avaient réussi. Il n'y avait plus de vol, de viol, de révolution ou toutes ces petites choses qui fâchent. Ils avaient résolus tous les problèmes écologiques, économiques... Ils avaient sauvé la France et le Monde...
-Comment ont-ils réussi si vite ? je dis étonné
-On a appris à maitriser un moyen vieux comme le monde
-Ce sont des héros, je dis admirative
-Je suis d'accord. Tu devrais y aller mais revient demain
-Pas de problèmes
-A demain
-A demain
Je sors. Une fois dehors je fais confiance en cet homme et tant pis pour le pressentiment.
Les jours suivant, j'essaie de retrouver Solfian en vain. Mes rendez-vous hebdomadaire avec l'homme à la bague me font du bien. J'ai l'impression d'être en sécurité et l'envie de retrouver Solfian se renforce. Malheureusement, malgré tous mes efforts, il reste introuvable.
Un mois plus tard, alors que je me rends dans le bureau de l'homme à la bague, j'entends un bruit étrange. Flash ! J'entends tous les bruits mais mes autres sens se sont évanouis. Je me suis entraînée pour pouvoir contrôler ce don. Le bruit vient du placard à balais. Flash ! Je coure et ouvre la porte du placard. A l'intérieur, je découvre Solfian. Il est très surpris mais je ne laisse pas parler :
-Solfian ! Je t'ai cherché partout ! dis-je toute excitée, tu ne me croiras jamais ! L'homme qui est arrivé il n'y a pas longtemps, je le connais ! Il très gentil et peut nous aider ! Oui, je sais c'est incroyable ! Il faut absolument que je te le présente !
Je lui attrape la main mais se dégage violement.
-Quoi ? Tu es folle ! crie-t-il
Je m'arrête indécise :
-Je ne comprends pas
-Il t'a arnaqué. C'est un monstre. Il nous a tous envoyé ici pour garder le contrôle sur nous.
-Mais non, il a sauvé l'Humanité.
-Mais bien sûr en tuant tout le monde, dit-il ironiquement
-Non, par un procédé vieux comme le monde, je réponds froidement
-Si tu as été aussi bête pour y croire, ne m'approche plus jamais, hurle-t-il en tournant le dos
Je le regarde s'en aller encore sous le choc. Je ne me souviens plus comment je suis arrivée dans le bureau de l'homme à la bague mais j'y suis.
-Que t'arrive-t-il ? demande-t-il doucement
-C'est Solfian, le nouveau
-Tu le connais ?
-Oui
Je lui raconte toute l'histoire. Il reste silencieux.
-Tu ne penses pas qu'il a raison
-Non, dis-je sans hésiter, il ne veut pas vous croire mais moi je vous crois
-Il menace le système et veut certainement me faire du mal, dit-il d'un ton tragique
-Je ne le laisserai pas faire. Je le retrouverai et ne le laisserai jamais dire une deuxième fois que vous êtes un monstre.
-Tu es prête à croire en moi ?
-Oui, dis-je souriante
-Tu ne me connais même pas, dit-il étonné
-Si, je murmure
-Comment je m'appelle ? rie-t-il
-Je ne sai...
Charles. Je me tais cela me revient. J'ai vu cet homme en rêve. J'ignore qui il était et ce qu'il faisait mais il vient du noir ainsi que l'odeur qui me hante depuis quelques mois. Il savait peut-être ce qu'il y avait avant le noir car maintenant je sais qu'il y a quelque chose avant.
-Tu vois, tu ne me connais pas, dit-il le sourire aux lèvres
-Charles, je murmure
Son sourire se fige :
-Comment ?
-Charles, je répète plus fort, vous vous appelez Charles
-Tu...Tu...
-Je vous ai vu en rêve... je le coupe et je lui raconte tout sauf le contenu des rêves dont je ne me souviens plus.
Quand je me tais, il me demande :
-Elizabeth mais t'appelles-tu réellement Elizabeth ?
-Oui...pourquoi ? je bredouille
-Je ne sais pas
-Pourquoi me posez-vous cette question?
J'ai peur qu'il sache que je lui ai menti.
-Parce que tu es ma fille

La liberté est dans tes yeux...Où les histoires vivent. Découvrez maintenant