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À minuit, les deux amoureux étaient toujours ensemble. Fixaient le plafond, ils continuaient de parler de leur couple, leur avenir et tout ce qui vas avec. Quand tout à coup un bruit venant de la porte s'était produit. Aziz se leva en sursaut.

- Qui cela peut-il être ?

- Hakim sans doute ! Il a décidé de revenir.

Aziz ouvrit la porte et tomba sur Binta, l'air défaite, les yeux rouges, les habits froissés, comme s'ils avaient été passée dans hachoir.

- Binta, que s'est-il passé ? Lui lança Azima.

Binta la regarda puis soudain éclata en sanglots. Aziz et Azima parurent déconcentrés. Ne comprenant rien de ce qui lui arrivait, Azima prit Binta par le bras et la conduisit vers la table et lui offrit une chaise.

- Mais qu'est-ce qui s'est passe, Binta ? Reprit Aziz.

Binta ne répondit rien, se contentant d'essuyer les larmes, la tête basse.

- Vous ne pouvez pas y croire, Az, Hakim m'a manqué de respect, il s'est débarrassé de moi comme une vieille chaussette.

- Comment ? Tu t'es disputé avec lui ?

- Il est venue me chercher au restaurant où je suis allée manger avec Malik. Quand il l'a vu avec moi, il m'a prise dans sa voiture et m'a emmenée loin...

Et lui raconta.
Il était 19h quand il l'avait prise dans sa voiture. Le chemin s'étirait à l'infini. Il avait emprunté la grande voie à la sortie de la ville, puis ayant atteint le pont, avait bifurqué à droite, sur une route en terre qui serpentait dans les ruelles. Loin de l'autre côté de la ville. Devant l'insistance de la jeune femme, Hakim avait fini par dire à sa destination : la plage !

- À la plage ! Qu'est-ce que nous irons faire à la plage à cette heure ci ?  S'était exclamée Binta.

- Discuter, ma chère.

- Pourquoi ne pourrions-nous pas aller chez toi ou dans un endroit plus convenable ?

- Je suis très fâché contre toi et je ne te fais plus confiance.

- Dans ce cas, enchaîna Binta,je veux que tu me ramènes à la résidence. Je ne vais pas à la plage avec toi.

Soudain, Hakim ralentit et s'arrêta sur le bas-côté de la route, abandonnant le volant. Ses yeux étaient comme des dards d'où sortaient des flashs lumineux et agressifs. Des ombres avaient commencé à enrober le paysage.

- Ecoute moi bébé, tu accepte ou tu descends de ma voiture.

- Hakim, nous sommes dans un pin perdu et tu me demande de sortir de ton véhicule ?

- C'est à prendre ou à laisser ma jolie.
Binta réfléchit un moment. Son regard erra dans le paysage à la recherche de quelque chose qui pourrait la rassurer. Mais ici, la voie était nue sans aucune habitation, rien que des hangars de pêcheurs isolés que l'on voyait loin en loin. Par rassurant pour un poil.

- Non, Camara Binta, je ne peux pas permettre de te suivre.

- Très bien, décida Hakim, descends de ma voiture.

Et il ouvrit la portière et attendit qu'elle descende. Binta pensait qu'au dernier moment, il allait se raviser. Mais dès qu'elle quitta le véhicule, Hakim verrouilla la portière, fit tourner la voiture puis bondit d'un seul jet. Binta n'en croyait pas ses yeux. Debout au bord de la route, elle voyait son homme s'en aller et se dissoudre dans le lointain.
La nuit était totale. N'eussent été les lampes des rares maisons qui trouvaient l'obscurité, aucune lumière, aucun lampadaire n'existait dans les parages. Pas de voiture, ni de mobylettes, encore moins des cyclistes. Les rares qui passaient attraient dans le sens contraire. Mais Binta n'avait pas le choix. Elle enleva ses chaussures et se mit à marcher, pieds nus, dans le sable blond.
A la fin du récit de Binta, Aziz et Azima regardèrent Binta avec des yeux incrédules.

- Pendant un moment, continua t'elle, j'ai marché seule dans la rue déserte, sur une bonne distance avant de trouver un taxi.

Ce fut à ce moment là que Aziz intervient.

- C'était très dangereux de te risquer sur cette route dans des ténèbres ma chérie. Mais qu'est-ce qu'il t'amenait faire à la plage ?

- Je ne veux même plus en parler, Az.

- Pourquoi ?

- Je ne peux tout simplement pas te dire. C'est...

Des pointes de larmes avaient rayé sa voix, elle essaya de contenir son trouble, mais l'émotion lui pesait dans la gorge, elle soupira :

- S'il se comporte comme ça, continua Aziz, il ne mérite pas que tu continues de le fréquenter.

- Malheureusement, ce serait difficile, ce mec a fait trop pour ma famille depuis que mon père est mort. Il m'offre souvent des cadeaux et de l'argent ! Avoua Binta.

De nouveau, les larmes se mirent à couler sur ses joues. Azima s'approcha de nouveau d'elle et la prit dans ses bras.

- Tu es une femme Binta, et t je dois te laisser malmener par aucun homme à cause du fric ou des faveurs qu'il te fait. Appuya t'elle.

- Je sais !

- Alors, pourquoi accepte tu une telle humiliation ?

Elle se redressa et s'écarte légèrement de Azima.

- D'habitude, Hakim n'est pas comme ça. Pour la plupart du temps, il est très gentil, attentionné et affectueux. Tout le monde chez-moi et même ma mère l'aime.

- Et toi, tu l'aime aussi ?

Binta regarda Azima en silence pendant un instant. La question lui semble difficile que sa propre situation. Lentement elle secoua la tête.

- Je ne sais pas Azima, je ne sais plus... fil t'elle.

La puissance de l'amour.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant