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L'office de la prédicatrice était bien bâti comme un couvent, du moins, vu de l'extérieur. C'était une maison d'où s'élevait une grande paillote au toit conique avec des pailles qui descendaient en pente abrupte, mais contenues dans un filet de couleur noires aux mailles fines. Tout étaient peint en blanc. Les murs de la façade portaient des dessins de tout genres de personnes mystiques.
La femme, la soixantaine bien installée, était assise sur un tapis au milieu d'un décor nu. Autour d'elle des bougies allumées. Des flacons de parfum vides ou encore pleins étaient disposés un peu partout. Azima et Aziz étaient aussi assises et suivaient la dame absorbée par sa prière. En effet, elle avait les yeux fermés, les mains jointes, les lèvres hachées par des psalmodies. Devant elle il y'avait une calebasse remplie d'eau et couvert d'un linge. Soudain, elle ouvrit les yeux, puis fixa son regard sur les deux fiancés.

- Prenez une pièce d'argent et murmurez là-dessus ce qui vous a amenés.

Les deux fiancés s'exécutèrent. Ce fut Aziz qui plongea la main dans la poche, en sortit une pièce de 5f et prononça des paroles là-dessus.

- Maintenant, jette la pièce dans l'eau, reprit la dame.

Aziz lança la monnaie dans la calebasse. La dame ferma de nouveau les yeux. On dirait qu'elle communiquait avec des esprits. Son visage était un concentré d'efforts soutenus, de tension forte, puis, soudain, elle rouvrit  les yeux et regarda attentivement dans l'eau. Dès lors, elle se mit à parler :

- Vous êtes arrivés voir si le futur entre vous sera prometteur. Je vois beaucoup d'amour entre vous deux, la paix du cœur et la longévité.

De nouveau, elle ferma les yeux et les paroles devinrent plus drues :

- L'homme du couple est très intelligent, mais à la fin il ne lui restera plus rien, car son intelligence et les labeurs de sa femme ne produiront pas d'effets. Certes, le couple aura les élémentaires de la vie : nourriture, logement et vêtements, mais rien de plus.

La dame paraissait de plus en plus transfigurée. Elle garda le silence pendant un instant, puis poursuivit :

- Attention, je n'ai pas encore vu l'élément fédérateur de votre couple. Je vous vois vieillir ensemble, mais sans aucun enfant. Cependant, si chacun de vous prend son chemin, autrement dit, si vous vous séparez, vous aurez, tous deux, sucés, richesses et beaucoup d'enfants. Mais si vous décidez de rester ensemble, vous serez heureux, cependant sans progéniture.

De nouveau, la consultante ouvrit les yeux. Les deux fiancés paraissaient émus par ce qu'ils venaient d'entendre. La dame finissait sa prédication, elle soupira et leur jeta :

- C'est ce pourquoi vous êtes venus ici ?

- Oui, répondirent en chœur les deux fiancés.

Quand ils prirent congé de la dame, Azima et Aziz avaient l'impression d'avoir reçu des coups de bambou sur la tête. Dans le taxi qui les emportait vers le campus, ils n'arrêtaient pas de tourner et de retourner en tout sens les prédictions entendues. Au bout d'un moment, Azima finit par demander :

- Qu'allons-nous faire maintenant, Az ?

- Ça veut dire quoi ? Répondit Aziz. On va tout faire pour leur prouver que leurs révélations sont fausses.

Azima soupira longuement et passa sa main autour du coup de Aziz.

- Ecoute-moi, Az, si être pauvre est t'avoir pour moi tout le reste de la vie, alors, je resterai pauvre. Tout l'or et l'argent du monde ne suffiront pas pour te remplacer.

- Même si tu devras subir ce qu'ils disent ?

- Même si je devrais les subir.
Azima sourit et posa sa tête sur sa poitrine. Le chauffeur, a l'avant, ajusta son rétroviseur pour admirer les deux tourtereaux. Il sourit et appuya sur l'accélérateur.

La puissance de l'amour.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant