Les champignons des Orphelins

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Suite à leur fuite précipitée, Astryhs avait pris le large et s'était éloigné de la capitale, avec ses deux passagères d'infortune, l'une débordant de rage, et l'autre plongée dans un chagrin inconsolable. Et, malgré l'énergie dont il disposait, en grande partie en lien avec l'adrénaline de la situation, il avait fini, par besoin, par se poser sur l'une des berges du lac, bien à l'ouest de la capitale. En tandis qu'il s'affalait de tout le long de son corps, il se disait qu'il devait réfléchir à tout ce qui s'était passé sous ses yeux mais, plus important encore, il se disait qu'il lui était nécessaire de calmer les deux malheureuses.

Par "chance", outre un choc émotionnel, chose somme toute aisément compréhensible, ni l'une ni l'autre se semblait présenter la moindre séquelle de leur très soudain départ. Le mieux, alors, était de leur permettre de se reposer. En particulier Eria, bouleversée qu'elle était de la disparition inquiétante de ses parents, le Roi et la Reine.

Si vous voulez mon avis, iels vont bien. Finit par lâcher Mavra, après des heures de silence entre les trois, aucun n'ayant le courage, ou tout simplement l'énergie, de dialoguer.

Astryhs lâchait un regard surpris, et assez gêné, de la remarque de la jeune orpheline, zyeutant en direction de leur royale camarade, craignant que cela ne retourne le couteau dans la plaie encore récente. Le Narviath n'hésitait d'ailleurs pas à faire part de ses inquiétudes, à voix basse, se demandant si c'était une bonne idée d'ainsi parler d'un tel évènement.

Mavra, piquée, tentait malgré tout de réprimer sa colère montante puis poussait un très long soupir, cherchant ses mots avec soin.

Je... Suis désolée. C'est un sujet difficile, je sais... Mais je peux pas rester les plumes croisées. Je veux pas. On a un vieux fou qui veut diriger la ville. Ma... Ma famille a besoin de moi. Les gosses ont besoin de moi. Je suis... Je suis leur grande-sœur, après tout...

Le Narviath blanc comprenait. Chez lui, aux Monts de Kébor, quand Amé était devenue sa petite sœur, il avait affirmé qu'il ferait tout ce qui était en son pouvoir pour la protéger. Un sentiment de nostalgie prit possession de lui un instant. Et il se demandait alors comment allaient les siens, sur la situation de sa sœur et sa de mère. Il fut cependant interrompu par Eria qui, lentement, et bien que titubante, venait de se relever et les regardait, exécutant une série de signes avec ses mains.

Je suis désolée, Princesse. Je ne parle pas votre langue. S'excusait le dragon, se questionnant sur les risques à parler ainsi à la personne qui avait inspirée toute une loi impérieuse, avant de se raviser. Tout cela n'avait aucune importance présentement. Mavra, pourrais-tu m'expliquer ?

Elle dit que... Pardon, ça fait longtemps que j'ai pas pratiquée... Je crois qu'elle s'excuse, oui, c'est ça, elle s'excuse de nous avoir traîné dans cette affaire. Elle voudrait pouvoir régler tout ça par elle-même, mais elle a... peur. Elle nous supplie de l'aider. Déchiffrait donc l'orpheline, tant bien que mal, penaude de ses lacunes, bien que le regard de la Princesse témoignait d'aucun reproche, seulement de la gratitude pour leur compréhension.

Je comprends. Répliquait le lézard immaculé. Et même si il est vrai que cela n'aurait pas dû me concerner, c'est le cas maintenant et ça l'aurait été à un moment. Je me souviens de ce que le chef des bandits a dit lorsqu'on l'a confronté. Il attendait que quelqu'un, Esclor donc, prenne le pouvoir pour s'en prendre aux non-Piarsiefs. Et je doute que cela va s'arrêter à la capitale. Mais, surtout, nous devons retrouver et secourir les parents de...

Il s'arrêtait d'un coup, hésitant sur la suite de sa phrase. C'était un peu long, et honnêtement assez étrange, de dire continuellement "Princesse". Par chance, ce fut elle qui lui répondit directement, en mimant lentement, et avec forte impression, chaque lettre.

Les Chroniques d'Irishtarya // Tome 1 : Les Ailes silenciéesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant