« Chapitre 4 : Cris »

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Chapitre 4 : Cris

J'étais toujours étendu sur la pelouse fraîchement humide par la pluie de la veille. Il était aux alentours de 22 heures et je n'avais même pas pris la peine d'appeler ma mère pour la prévenir de l'endroit où je me situais. J'aurais dû. Elle devait s'inquiéter. Les 17 appels manqués de sa part le prouvaient. Je n'avais pas bougé de l'après-midi, j'étais beaucoup trop préoccupé par  l'appel que j'avais reçu. En y réfléchissant, il me semblait que les policiers n'avaient pas retrouvé le téléphone portable d'Horia. Peut-être qu'une personne l'avait retrouvé et avait essayé de m'appeler pour savoir qui était le propriétaire de l'objet ? C'était une éventuelle possibilité comme celle qui était la plus espérée : que ce soit Horia qui ait appelé. Je le savais très bien que les chances de retrouver Horia vivante diminuaient de jour en jour mais je continuais de croire en elle. Je savais qu'elle était forte tout comme je savais qu'elle n'était pas morte. J'étais persuadée que cet appel provenait d'Horia. J'en étais même convaincu. Je ne savais pas comment l'expliquer mais je savais au fond de moi qu'Horia avait essayé de me contacter. C'était indescriptible comme sensation. Je n'avais jamais osé en parler à mes parents ni même à mon psychologue par peur qu'ils me prennent pour un fou mais à plusieurs reprises, même lorsque je ne pensais pas à elle, il m'arrivait de la sentir près de moi. Non pas comme une présence fantomatique mais plutôt comme une présence psychique. C'était bizarre. 

Après plusieurs heures d'immobilité, je me mis sur mes deux jambes et regardai le lac dont l'eau reflétait la clarté de la lune ainsi que les lucioles qui survolaient celle-ci. C'était vraiment un paysage agréable à regarder. Connaissant ma mère, elle n'allait pas tarder à appeler la police par peur qu'il me soit arrivé quelque chose. Je m'empressai donc de sortir du parc lorsqu'un cri strident, aigu et à glacer le sang parvint jusqu'à mes oreilles. Ce cri provenait du bois juste à côté du village. J'étais certain que tous les quartiers voisins avaient été alerté par ce bruit. Cependant, personne ne sortit de chez soi. Ils devaient sûrement être subjugués devant leur télévision ou déjà en train de dormir. Alors que je ne savais pas quoi faire, un second hurlement éclata, cette fois-ci plus fortement que le premier. Je n'avais pas d'autre choix que d'accourir vers celui-ci. Je ne pouvais pas laisser cette fille qui devait être en danger toute seule dans cette obscurité quasi totale. 

Je filai dans les quartiers comme une rivière dans une forêt jusqu'à atteindre l'endroit où j'avais entendu à deux reprises ces hurlements. Je n'y voyais rien. Seuls quelques lampadaires se situant à quelques mètres derrière moi éclairaient légèrement l'entrée du bois. Je savais que ces arbres ne pouvaient rien me faire mais ils m'effrayaient quand même. La journée, ils paraissaient magnifiques et inertes, mais le soir, c'était tout autre chose. Les branches frappaient les unes contre les autres comme des mains qui applaudissaient et les jeux d'ombres que faisaient celles-ci étaient loin d'atténuer mon effroi. Finalement, je pris mon courage à deux mains et, en un élan de bravoure, je m'élançai entre les arbres. Je sortis rapidement mon téléphone portable de ma poche et éclairai les environs avec. Même si ça n'éclairait que très peu, c'était mieux que rien.

J'avais l'impression de me trouver dans un de ces films d'horreur américains. Malheureusement, les victimes terminaient souvent découpées ou tuées à la tronçonneuse. Rien de rassurant. Avançant péniblement dans la pénombre de ces bois, je crus apercevoir une silhouette passer, à peine dix mètres devant moi. Je pointais mon téléphone portable en sa direction mais n'aperçus personne. Je commençais vraiment à paniquer.

« Y'a quelqu'un ? bégayai-je. »

Aucune réponse. Je trouvais ça encore plus terrifiant que si l'on m'avait répondu. Soudainement, alors que je pensais être au sommet de la peur, mon téléphone portable s'éteignit. J'essayai de le rallumer à plusieurs reprises mais rien n'y faisait. La batterie était morte. Quelle idée j'avais eu de ne pas vouloir le rechercher en prétextant que je pouvais tenir encore deux jours ! Je secouais l'objet entre mes mains comme si cela pouvait l'aider à se rallumer, en vain. Je levai la tête et regardai autour de moi. Je ne voyais rien. Ah si, seulement un lampadaire à l'horizon qui éclaircissait seulement deux arbres. Au moins je savais où se trouvait la sortie. Le fait de ne plus rien entendre autour de moi m'effrayait bien plus que d'entendre ce cri. Apeuré comme j'étais, je ne voulus pas rester ici plus longtemps et accourus jusqu'à la sortie du bois jusqu'au lampadaire. Une fois sous celui-ci, je repris ma respiration et regardai une dernière fois le bois. La silhouette d'une fille était dirigée vers moi, me regardant avec insistance. Je devais rêver ! Cela me fit soudainement repenser aux histoires que l'on se racontait dans les colonies de vavacances lorsque nous étions plus jeunes. Ces histoires qui devaient être "inventées" mais qui, à cet instant précis, paraissaient bien réelles.

Je voulus crier, m'enfuir en courant ou alors entrer dans la maison la plus proche mais je ne le fis pas. Mes yeux restaient rivés sur la fille comme pour ne pas la voir disparaître, comme pour éviter qu'elle ne s'approche de moi, ce qu'elle ne fit pas. Cette silhouette aux allures fantomatiques se contentait de rester immobile, la tête légèrement penchée, me fixant intensément comme pour lire en moi comme dans un livre ouvert. Vu l'état de son visage qui était à moitié scarifié et à moitié sali par la terre, je doutais qu'elle allait bien. Je doutais même qu'elle soit vivante. 

Subitement, alors que je le croyais éteint, mon téléphone sonna dans ma main. Je criais de surprise et regardai l'écran qui affichait le numéro de ma mère. Comment était-ce possible de recevoir un appel alors qu'il n'y avait plus aucune batterie ? Je levai les yeux en direction du bois et remarquai que la fille n'était plus là. Mince ! Je me mis à courir de toutes mes forces en prenant soin de passer seulement dans les rues qui étaient illuminées par les lampadaires puis décrochai. 

« Allô ? Jayden, c'est bien toi ?  s'écria ma mère, soulagée.

- Oui, je rentre à la maison tout de suite. Je dois absolument te racon..

- Tu m'as fait une de ces peurs ! Tu vas voir quand tu rentreras ! J'étais à deux doigts d'appeler la police, souffla ma mère. »

Rah ! Je traversai la route tout en faisant attention qu'il n'y ait aucune voiture. De toute façon, il y avait peu de circulation à une heure aussi tardive. Ma mère continuait de me faire des reproches tandis que je ne prenais même pas le peine de lui répondre. Elle ne comprenait pas que le fait de me crier dessus n'allait rien changer au fait que j'était parti toutes ces heures sans la prévenir. J'arrivais finalement chez moi et claquai la porte derrière moi. Je raccrochai et aperçus ma mère qui accourus directement vers moi avant de me mettre la plus grosse gifle que je n'avais jamais reçu. Choqué de son geste, je ne bougeais plus. Nous nous regardions dans les blancs des yeux. J'étais bouche bée. Il était très rare que ma mère mette la main sur moi, mais lorsque cela arrivait, ça plombait l'ambiance et mettait une certaine distance entre elle et moi durant quelques jours. Ma mère voulut s'excuser mais je ne lui laissai pas le temps : je venais de gravir deux à deux les escaliers jusqu'à ma chambre. Je m'enfermai dans la pièce et allumai la lumière. Décidément, ma mère ne comprenait rien. Elle ne me comprenait pas. Elle n'avait même pas cherché à comprendre la raison pour laquelle j'étais resté dans ce parc tout ce temps. Non, elle avait préféré me mettre une gifle, comme si cela allait tout arranger. Rien n'allait s'arranger car Horia était toujours portée disparue. La présence de cette fille dans ce bois avait peut-être un rapport avec la disparition d'Horia ? Dans tous les cas, j'avais perçu deux cris qui ressemblaient à ceux d'une fille. Je n'en étais pas sûr. Peut-être était-ce Horia ? J'espérais, quoi que, non. Si ce devait être elle, cela voudrait dire qu'elle était en danger. On ne crie pas pour rien, si ?

Je fermai les volets de ma chambre et me préparai pour dormir. Je ne comptais ni faire mes devoirs, ni manger. Je n'avais pas faim de toute façon. Instinctivement, mes yeux se posèrent sur une photo d'Horia et moi. Sur l'image, nous pouvions voir Horia dans mes bras. Nous étions tous les deux souriants. Nous étions si proches. Je me souvenais que tous les autres adolescents croyaient que nous étions en couple, tant notre complicité était forte. La photo avait été prise à la foire, juste à côté d'une attraction que nous adorions tous les deux. Je souriais en regardant le visage d'Horia. Ses cheveux bruns retombaient sur ses épaules et ses yeux bleus la rendaient d'autant plus magnifique. Je me résignai de m'évader dans un délire nostalgique et me mis sous la couette tout en repensant au geste qu'avait fait ma mère. Bizarrement, elle n'était pas venue s'excuser derrière la porte. Peut-être que le fait de ne pas lui avoir répondu la veille lui avait fait comprendre que lorsque j'étais mal il ne fallait pas me parler. Je m'installai confortablement sur mon matelas et posai ma tête sur mon coussin. Je fermai les yeux et attendis patiemment que Morphée me prenne dans ses bras. Cependant, un souffle vint me perturber. Un souffle chaud qui me caresser l'oreille. Un souffle qui paraissait bien réel. J'avais peur. Je ne voulais pas me retourner. Je ne devais pas me retourner. C'était certainement mon imagination qui me jouait des tours. Tout d'un coup, alors que je pensais que le cauchemar allait se terminer, une voix me susurra à l'oreille :

« Aide-moi. »



[Chapitre 4 publié ! Héhé. Je reviens après 20 jours d'absence. (Enfin, 20 jours d'absence de publication sur cette fiction) Bref, je dois vous avouer que j'ai eu peur en écrivant ma propre histoire.. ! J'ai tellement d'imagination que je visualisais la scène dans ma tête et c'était juste.. effrayant ! Bref, n'hésitez pas à commenter et voter mes chapitres ! Je vous adore ! ♥]


Loin des yeux, près du coeurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant