Trying to get to you

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Heyy mes lecteurs préférés, vidéo à regarder absolument avant la lecture, orgasme assuré.

De cette déclaration s'en était suivi un silence, que l'on sentait chargé de l'écho de mes paroles, eux-mêmes chargés de vérité. Le fantôme de sa gloire, il semblait se dessiner dans les volutes de fumée grise, comme il avait oublié la cigarette qu'il tenait suspendu entre ses doigts. Quand je m'aventurais à lui jeter un regard, je le trouvais les yeux fixés sur les étoiles, et durant cet instant fugace le monde entier semblait avoir disparu autour de lui, seul planait l'ombre de sa destinée.

Et puis, comme le charme se rompt avec un rien il était revenu à lui et avait repris une taffe, une tout autre expression prenant forme dans ses traits.

« Mais t'es qui bordel » je l'avais entendu dire entre ses dents.

- C'est très compliqué à mettre en perspective , je le conçois et m'en excuse, je n'aurais jamais pris le risque d'être ridicule si j'avais voulu déballer des bobards, vous avez ma parole. Ce que je vous ai conté est ce qui vous attend si vous vous en donnez les moyens, il faut que vous deveniez à nouveau cette personne et je suis prête à...

- Mais va-t-en pauvre cinglée ! Qu'est-ce que tu sais de ma vie sérieusement, tu te prends pour un oracle ou quoi ? Redescends sur terre et laisse ma vie où elle est, je n'ai besoin de personne et surtout pas d'une rouquine qui se prend pour je ne sais qui.

Il avait écrasé la cigarette et reprit sa bière qu'il finit d'une traite. Je me retrouvais incapable de réagir, cette rage qu'il avait en lui je n'y pouvais rien, ne connaissant ni son caractère ni sa manière de recevoir les choses et les gens. Je restais néanmoins cramponnée à l'espoir qu'il finisse par se calmer.

- Allez fous le camp ! Tu me fais perdre mon temps. »

Comme je ne bougeais toujours pas d'un pouce, il avait balancé sa bière, lâché une insulte et était parti, me laissant seul avec un gros poids sur le cœur. Je le trouvais injuste, arrogant et rabaissant.

S'il savait le cheminement que j'avais réalisé pour comprendre sa musique, combien j'étais maintenant prête à lui offrir pour accomplir ce pourquoi il était fait. Tout ce que j'avais sacrifié, mon foyer, mes amis, des mois à être baignée de ses influences, des décors de son enfance puis de son adolescence, pour quoi ? Être traitée comme une moins que rien, pire, comme une folle.

Une émotion grandît en moi, qui ne m'avait jamais atteint auparavant, un curieux mélange de honte, de peine et de déception faisant monter des sanglots à ma gorge et des larmes à mes yeux.

Quelle était cette étrange équation qu'il me fallait résoudre dans cette quête vide de sens ? Pourquoi cet étrange coup du destin était tombé sur moi ? Pourquoi vouer autant d'énergie à quelqu'un qui ne veut même pas voir les choses en face ?

J'avais beaucoup pleuré ce soir-là, et sur le chemin du retour vers ma chambre d'hôtel je n'avais adressé aucun mot à mes compagnons, ni quand ils avaient voulu détendre l'atmosphère pour sonder mon attitude : "Eh ben c'était si mal que ça avec le blondinet ?", ni quand ils avaient commencé à s'inquiéter et proposé leur soutien.

Rentrée dans ce que j'appelais à présent "mon chez moi", je m'en étais voulue d'avoir été aussi hermétique à la douceur de ceux qui se souciaient de moi, et puis j'étais replongée dans la conversation virulente qui tournait incessamment dans ma tête, me posant les mêmes questions sur la nature de mon entreprise, toujours les mêmes, encore, et encore...

Et puis, le matin venu, j'avais retrouvé la raison. Après avoir broyé du noir, je commençais à prendre du recul et à me rendre compte de la puérilité de mon attitude. Évidemment qu'il fallait s'attendre à un refus !

Je me mis à sa place et réalisais combien j'aurais été bousculé que l'on me confronte à une réalité dans laquelle j'étais une star internationale qui rendait le monde hystérique et pas un acteur que personne ne prenait au sérieux, en gros, qu'on me dise que j'avais raté ma vie.

Qui n'aurait pas eu de la colère envers ces supposés vérités et des aprioris sur l'absurdité du discours ! Je m'étais sentie humiliée alors qu'il n'en était rien. Dans cette histoire, il me fallait laisser ma fierté de côté, une humiliation concerne l'impliqué, pas la personne qui souhaite guider cet impliqué.

Ce matin-là je me fit une promesse : le laisser venir à moi et non l'inverse. Donner au temps le soin de faire germer au fond de lui le désir de comprendre ses paroles, d'y adhérer puis d'y céder, pour que mûrisse l'aspiration à cet idéal sur lequel je lui avait montré un aperçu.

Et si par malheur cela n'arrivait pas, il fallait que je m'y fasse. C'était ainsi. Je gardais toutefois un œil attentif sur les activités du dieu discret pour m'assurer qu'il trouve le moyen de me trouver si l'envie lui prenait. C'est à Kenneth que je demandais ces informations par le biais de son ami figurant, sans lui dévoiler la véritable intention derrière cette surveillance. En échange, je lui donnais des cours de piano classique. Réticent au début, j'avais fini par le convaincre.

« Les choses qu'on fait par amour...» il m'avait alors soufflé.

Un mois s'était écoulé depuis l'incident et je commençais à accepter l'idée qu'Elvis ne viendrait jamais. Il enchaînait plus que jamais les tournages et je devenais de plus en plus investie sur la manière d'étoffer mon répertoire pour mes concerts de piano, j'étais assez demandé sur le territoire et cela représentait une aubaine pour moi, c'est tout ce que j'avais espéré depuis que j'avais commencé mes études.

J'étais épuisée. Mes gestes étaient devenus mécaniques, tout mon corps n'était motivé que par la seule idée de sombrer dans le sommeil. Mon récital d'une heure et demie venait de se terminer, toujours grisée des applaudissements j'étais dans ma loge, préparant mes affaires pour rentrer, quand mon manager était entré, essoufflé : « Dalila, y a un type qui veut te voir, il dit que c'est un admirateur et qu'il veut t'inviter à dîner. »

Il arrivait en effet que je reçoive des fleurs ou des invitations, et bien que cela me flattait toujours, je préférais garder ce temps d'après-scène pour me ressourcer. Je déclinais poliment comme j'en avais l'habitude.

- Il prétend t'avoir rencontré lors d'un tournage, Elvis.. machin. Tu le connais ? »

Mon sang ne fit qu'un tour.

- Humm, bredouillais-je, oui. Oui je le connais, enfin je l'ai croisé. Dis lui de patienter dans le hall »

Mon manager sorti de la pièce et dès cet instant un immense sourire avait fait monter mes joues et je m'empressais d'avoir l'air présentable, mettant de l'ordre à mes cheveux, un peu plus de noir sur mes yeux.

Quand je m'étais rendue dans le hall c'est ce grand gaillard timide et égaré que je retrouvais, loin de la brute défaitiste à laquelle j'avais parlé.

« Bonsoir », avait-il dit, le regard fuyant.

Il était beau avec sa chemise rayée, ses cheveux retombant sur son front perlé.
Je lui souris et nous partîmes ensemble dans les rues de Memphis.

Love Me Tender│Elvis Presley [French]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant