Chapitre 6

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- C'est un meurtrier...

Je garde les yeux dans le vide en me repassant encore et encore le moment où Anicet a tué de sang froid deux elfes, dont un gamin. Et surtout son sourire... lui qui a toujours un visage neutre et sérieux, on aurait dit qu'il se délectait de ce qu'il faisait. Il n'a pas hésité une seule seconde à enfoncer son poignard dans le corps du petit Ivan. Je serre les poings en sentent une rage folle d'emparer de moi. Une étrange envie de vengeance s'insinue dans mon esprit. Il ne peut pas rester impuni. Je fais néanmoins un effort pour contrôler cette soudaine fureur. J'inspire un bon coup et demande à Lonni, d'une voix froide.

- Et mon père là dedans ? Qu'est ce qu'il a voir dans tous ça ?

- Rien. Il a fait autre chose qui concerne son royaume et non la forêt.

- Comment tu peux savoir ça ?

- Il à épousé ma fille la moindre des choses c'était que je m'assure qu'il sois un bon mari. J'ai donc vu quelque chose que je ne devais pas voir. Je suppose que tu veux le voir par toi même ?

Je hoche la tête, m'apprêtant à revivre une troisième fois un souvenir. Il touche encore une fois mon front et je me trouve ailleurs. Dans une salle vaste. Je ne reconnais pas mon château mais il y ressemble beaucoup. Je suis en hauteur, sur une poutre, regardant les deux hommes en bas. Je reconnais aisément mon père. Je n'ai jamais vu l'autre homme mais son teint hâlé et ses cheveux blonds me rappelle étrangement Nikola. J'écoute mon père parler à cet homme qui doit être le roi du septième compté.

- Avez vous ce que je vous avez demandé ?

- Oui messire Gabriel.

- Très bien. Amenez moi ces êtres répugnants, nous allons les interroger.

- Comment avez vous su que des elfes vivaient dans la forêt interdite.

- Mon père me l'a dis. Si nous voulons conquérir ce territoire il va nous falloir un maximum d'informations. Nous allons les torturer jusqu'à ce qu'ils parlent.

Pas une once de culpabilité émanait de mon père. Je ne l'avais jamais vu aussi froid et dangereux qu'en cet instant. Je reste sur mon perchoir et écoute la fin de la conversation.

- Gabriel, se sont des êtres vivants au même titre que nous. C'est inhumain de les torturer.

- Tu souhaite élargir ton comté ou rester le misérable roi du dernier compté ?

J'ai donc la confirmation de l'identité de l'homme qui parle à mon père. Celui ci garde le silence un petit moment, semblant réfléchir. Quand il reprend la parole pas une once de regret transparaît dans ses paroles.

- Je serais le plus puissant roi après vous. Ensemble nous règnerons sur tout les comptés et la forêt. Je vous apporterais ses humains déchus et je vous aiderais même à obtenir ce que vous voulez.

- J'aime mieux ça mon ami.

La vision s'arrête là. Me laissant désarçonnée et abattue. Mon père a torturer des elfes pour régner un peu plus sur le monde. J'en viens à me demander qui est le plus cruel entre mon père, mon beau père et la magie noir qui possède mon grand père. C'est quand même absurde de se dire que ma famille cache des secrets improbables. Que c'est un complot vivant. Je sens les larmes couler sur mon visage. Je suis contente de ne plus avoir mes pouvoirs car jamais je n'aurais pu me contrôler. J'ai l'impression d'être une coquille vide, à qui on aurait arraché son ancre, ses croyances. Je n'arrive pas à m'empêcher de penser que Hélios est mêlé à tous ça. Et si son père avait changé d'avis ? Et si finalement il a inculpé à son fils le besoin de régner avant tout ? Avant son humanité ? Et si ça se transmettait par les gènes. Hélios et moi sommes perdus d'avance.

- Ne pleurs pas Atria. Je suis la maintenant. Je t'aiderais peut importe ce que tu voudras faire. Puisque je t'ai raconté ce que je voulais que tu saches, tu es libre de retourner à Hélianthe auprès de Hélios.

Je pose mon regard embué de larme sur le visage de Lonni. Il a l'air tellement normal. Il aurait fait un si bon grand père si il n'avait pas eu une enfance si affreuse. J'essuie mes larmes en reniflant une dernière fois. Je ne serais pas faible, plus jamais. Je ne peux pas lutter contre mes gènes. Mais je ne deviendrais pas une hypocrite en quête de pouvoir. Je vais retourner dans le premier comté. Je vais parler avec mon père, et il me dira toute la vérité. Sinon je n'aurais pas le choix, je le tuerais. Après tout la magie noir coule dans mes veines.

- Je n'y retournerais pas. Pas tout de suite. Je veux m'entraîner, devenir invincible. Je vais me venger de tous ses mensonges et ses meurtres.

- La vengeance est un point de non retour. Ça requière des sacrifices et la perte d'une part de ton humanité. Tu es prête à faire ce sacrifice.

- Quand commençons nous ?

Je me lève, plus déterminée que jamais. Je ne pensais pas qu'un jour mon plus grand ennemi deviendrais mon plus grand allié. Mais tout à changé, je ne peux pas l'éviter. Le changement est la fin d'une vie joyeuse et pleine d'ignorance. Tout ça pour commencer une vie sans secret mais plus sombre. On ne peut éviter le changement, on peut seulement choisir quand viens le moment de commencer une nouvelle vie. Tout faire pour préserver la majorité, quitte à sacrifier ses proches et sois même.

- Maintenant Atria.

Je hoche la tête. Je suis prête. Je suis prête à accueillir le changement. Le passage du bien impossible au mal nécessaire. Je suis prête à grandir. Après tout j'ai dix neuf ans, si je ne change pas maintenant, ma vie ne serait qu'un tissu de mensonge. Je suis Lonni, que je refuserais catégoriquement à appeler grand père, qui sort de la maisonnette. Nikola se trouve près de son netvor et joue avec. Quand ses monstres ne tuent pas ils sont plutôt mignon, comme des chiens, en plus gros et plus dangereux. Lonni prend deux épées en bois et m'en donne une avant de se mettre en position de combat. Je fais de même. Je serais plus forte, plus forte que je ne l'ai jamais été.

Conflit T.2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant