Chapitre 2

27 4 0
                                    

La jeune fille se tendit et son visage devint livide.

- Je gâcherai vos résultats scolaires et donc votre avenir à toutes les deux. C'est ça que tu veux !? ALORS RÉPONDS MOI BORDEL !! cria -t-il si fort que Lou dut se boucher les oreilles. Il était si menaçant. Elle avait peur, elle était tétanisée. Que pouvait elle faire contre lui !?

-Ah bah enfin une réaction, dit-il avec un sourire suffisant.

La jeune fille était en rage, elle mourrait d'envie de lui bondir dessus et de lui planter son compas dans les yeux. Ce serait comme un test pour savoir si les morts ressentaient la douleur. Cependant le sourire arrogant du garçon la mettait en rogne plus que n'importe quoi d'autre.

- Qu'est ce que tu me veux à la fin !? Je veux juste être une lycéenne normale ! Tu peux pas comprendre ça !? cria Lou les yeux brillants de larmes et de fureur.

- Si je comprends parfaitement, sourit-il, Cependant, toi aussi, essaies de me comprendre, je veux ressusciter et tu es la seule personne vivante qui peut me voir donc vas-y tires-en une conclusion !

La jeune fille mit sa tête entre ses mains, en gémissant. Il était en position de force et son ton supérieur la mettait hors d'elle. Lou savait qu'il n'y avait aucune issue. Elle était désemparée, seule, et elle avait l'impression de se noyer, d'étouffer de rage et de désespoir.

- Tu vois ! C'est bien, tu as compris toute seule, ricana-t-il, Tu vas être obligée de m'aider. Je ne voulais pas en arriver là mais tu ne m'as pas laissé le choix en m'évitant toute la journée. J'avoue qu'à un moment j'ai presque cru que j'étais fou. Tu es plutôt bonne actrice. Bon je te laisse y réfléchir même si tu n'as pas le choix finalement mais bon... De toutes façons, on se revoit demain.

Sur ce il s'en alla d'un pas léger en sifflotant.

- Alors pourquoi tu t'es suicidé ? lança Lou d'une voix faible. La jeune fille haussa les sourcils d'étonnement. Elle ne c'était pas rendu compte qu'elle avait parlé à voix haute.

- Pourquoi t'as sauté de ce fichu toit ?!

Jim s'arrêta et de retourna lentement pour lui faire face de nouveau. Son visage ne trahissant aucune émotion. Alors la jeune fille continua :

- Tu voulais faire le malin devant ta petite cour alors tu t'es dit :
" Pourquoi ne pas faire du saut à l'élastique sans élastique !" T'es con ou quoi ? Tu as pensé à tes parents et à tes proches ! Bah non bien sûr suis-je bête ! Vu que "Môssieur" ne pense qu'à lui même si ça pourrit la vie d'autrui ! cria Lou.

Elle était à bout de souffle à la fin de sa phrase mais elle se sentait bizarrement plus légère d'avoir dit pour la première fois à quelqu'un ce qu'elle pensait. Cependant le côté empathique de la jeune fille prit le dessus quand elle vit le visage décomposé du garçon en face d'elle.
Sans dire un mot il se retourna et sortit de la salle.

Lou s'effondra sur la table et se mit à pleurer. Elle n'avait jamais pleuré depuis la mort de sa mère car son livre l'aidait mais là, elle ne savait plus que penser. Son esprit était embrumé, et perdu. Le garçon qu'elle croyait être gentil et attentionné avec ses amis, enfin d'après ce qu'elle avait vu de loin, était en fait un monstre sans pitié qui jouait avec la vie des gens comme avec des pions. C'était injuste, n'avait-elle pas déjà assez souffert ? D'abord la mort de sa mère, puis la malédiction de voir les morts et enfin, lui. Lou n'en pouvait plus.

Quelques instants plus tard, M.Pichet arriva dans la salle en soufflant comme un bœuf et la jeune fille leva la tête, les yeux rouges et le visage poisseux de larmes. Lui pour le coup ressemblait vraiment à un bœuf : il était énorme et avait une minuscule moustache comme si on lui avait collé un hamster mort sous le nez. Il n'avait presque plus de cheveux et d'épais sourcils grisonnants cachaient presque entièrement ses yeux.

- Je te donne l'autorisation de sortir plus tôt, Adams. Range vite tes affaires et débarrasse moi le plancher. Je t'ai assez vue pour aujourd'hui, croassa-t-il, visiblement encore sous le choc d'avoir été enfermé. La jeune fille supposa que le fantôme démoniaque l'avait libéré.

Lou rangea ses affaires un sourire au coin des lèvres : au moins sa journée n'était pas si désastreuse que ça. Elle sortit du lycée à la hâte et rentra chez elle au pas de course.

Une fois arrivée devant la porte de chez elle, elle retint son souffle et entra dans l'appartement. Son père l'attendait. Il était assis sur la chaise du salon et regardait sa montre avec inquiétude. Quand il la vit, son visage s'éclaircit.

- Ma chérie ! Je t'ai attendue si longtemps ! Pourquoi es tu autant en retard ? Je me suis inquiété !

- Coucou Papa. Je suis désolée, j'ai été collée toute la semaine par M. Pichet..

- Ah le vieux hamster ! sourit son père. Oui je comprends, mais je peux savoir pour quelle la raison ma fille adorée s'est faite collée par ce vieux ?

- J'ai somnolé en classe... répondit Lou, gênée, regardant le bout de ses chaussures.

- Ah, et bien mange un morceau et couche-toi tôt ce soir ma chérie, dit-il en déposant un baiser sur le front de sa fille.

Une fois dans son lit, Lou regarda longuement le plafond et repensa à Jim. La culpabilité la rongeait. Mais elle ne regrettait pas de lui avoir dit ce qu'elle avait sur le cœur. Au final sa mort l'intriguait : s'était il vraiment suicidé ? Qu'avait-il fait de mal pour devoir rester sur Terre ? Il avait su trouver ses points faibles et elle était déçue de ne pas avoir su comment riposter.. Seulement voilà : pour le moment elle était obligée de l'aider avant de trouver une idée pour se débarrasser de son emprise. Peut être devait elle s'abstenir d'aller en cours demain ? Non, son père s'inquièterait. Fatiguée, la jeune fille parvint à fermer les yeux et plonger dans un sommeil agité.

Le lendemain matin, Lou se leva d'un pas traînant vers la salle de bain, regarda dans le miroir et constata avec consternation le nid d'oiseau qui lui servait de cheveux. Ses yeux verts étaient gonflés par le manque de sommeil et son visage était pâle. Elle se tapota les joues, inspira profondément et se dirigea vers la cuisine où son père, comme à son habitude, était entrain de préparer le petit déjeuner.
- Bonjour ma princesse ! Bien dormi ? lui demanda-t-il avec un grand sourire.

- Bof, répondit la jeune fille d'un air maussade.
Mike était vêtu de son habituelle chemise blanche, d'un jean et de ses adorables chaussons lapin que Lou lui avait offert au dernier Noël. Il posa une assiette de pain grillé devant sa fille et s'assit devant elle, les mains croisées sur la table. Son front était plissé et ses sourcils légèrement froncés, lui donnant un air plus sérieux que jamais. La jeune fille, en train de manger, stoppa net et lui jeta un regard étonné. En effet il n'était pas dans les habitudes de son père d'être aussi sérieux.
Au bout d'un long moment ce dernier prit la parole d'une voix dénuée d'émotions.

- Ma chérie, il faut que je te parle. C'est important.

Âmes SolitairesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant