Un an s'était presque écoulé depuis mon mariage lorsque j'arrivai à Uhrutahm. Sur le balcon de notre appartement, je repensai à ce premier bain de foule, aux mots qu'on m'avait glissés, à la colère et la honte que j'avais ressenties en entendant les paroles de madame Oldmine, au sentiment de bien-être et d'appartenance que les terres de Kyealetht m'avaient procurés, les difficultés traversées et l'évolution de ma relation avec Kirrogstag.
Je poussai un grand soupir en voyant dans mon esprit le visage de cette personne qui m'était tellement chère. Cela faisait cinq mois que je n'avais pas vu mon mari. J'étais rentrée deux jours auparavant à Uhrutahm, c'était aujourd'hui que Kirrogstag devait revenir des terres du Nord. Le roi Fyguia et son fils m'avaient réservé un accueil plus chaleureux que la première fois. Ils me félicitèrent pour mes exploits à Seiweledèr.
—Adria.
J'entendis mon prénom doucement prononcé dans mon dos, presque comme un murmure. Mon visage se fendit d'un sourire incontrôlable. Je me retournai, Kirrogstag se tenait là, en vêtements de voyage couverts de poussière. Ses cheveux étaient en bataille et la fatigue se lisait sur son visage. Je ne pensais pas qu'un jour je trouverais un homme dans tel un état si beau !
—Bonjour, Kirrogstag. J'espère que vous avez fait...
Je m'interrompis un instant en sentant son corps chaud contre le mien.
—Bon voyage, terminai-je en refermant mes bras autour de son torse.
Kirrogstag ne me relâcha pas. Je lui demandai s'il s'était passé quelque chose, je n'obtins aucune réponse. Depuis que j'avais réalisé que je l'aimais, je rêvais qu'il me tienne un jour ainsi dans ses bras. J'étais persuadée que j'y trouverais un réconfort et une sérénité sans pareille. Maintenant que je le vivais, je ne parvenais pas à me détendre. Son comportement m'inquiétait. Je restai immobile, le coeur battant la chamade, attendant que Kirrogstag soit enfin prêt à me parler.
Il se retira de l'étreinte et déposa ses mains sur mes joues.
—Adria, me dit-il sur un ton doux, il y a quelques mois, vous m'avez avoué vos sentiments. J'ai j'ai besoin de savoir ce qu'il en est aujourd'hui.
Face à mon silence, Kirrogstag se vit forcé de poursuivre :
—Pendant votre absence, j'ai réalisé la place que vous aviez prise dans ma vie. Le jour de notre union, je ne vous voyais que comme la remplaçante d'un mariage d'intérêt. Puis j'ai appris à vous connaître, je me suis dit que nous pourrions devenir amis. Et c'est ainsi que je vous voyais jusqu'au jour de votre confession. Les mois qui ont suivi m'ont fait changer d'avis. Vous avez pris une place spéciale dans mon coeur sans que je ne le remarque. J'étais confus lors de votre départ pour votre royaume. Je voulais prendre ce temps loin de vous pour réfléchir à ce que je ressentais. Mais je n'eus bientôt qu'une seule hâte : vous revoir.
Je le regardai, je ne m'attendais pas à ces mots en revenant d'Asaçbjörn. Mon coeur allait exploser.
—S'il vous plaît, Adria, ne me dites pas que je vous avoue mon amour trop tard.
Je glissai mes mains le long de son torse et approchai sa tête de la mienne. Je l'embrassai avec tout l'amour que je lui portais. Il entoura ma taille de ses bras et me souleva de terre.
—Asaçbjörn n'est pas mon royaume, le corrigeai-je entre notre baiser.
Il se détacha de moi en souriant. Gortthorn était mon pays. J'emportai Kirrogstag dans une nouvelle étreinte.
—Je sais que je suis le premier à l'avoir fait, commença-t-il, mais vous ne devriez pas vous coller à moi. Je suis transpirant et couvert de terre. Je n'ai pas pris une douche correcte depuis plusieurs jours.
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Les routes du Nord
RomanceSuite à la fuite de sa cousine, Adria se retrouve obligée d'épouser le prince Kirrogstag Neulkahn dont elle n'a entendu que des histoires peu rassurantes. Alors qu'Adria s'efforce de faire sa place dans son nouveau pays, son beau-père ordonne au je...