LES PRIMORDIAUX - La nuit tombe - 1 [Terminée]

50 - Patrocle

À mon grand soulagement, on se retrouva tous ensemble le dimanche soir. Ephraim avait fait en sorte de commander de la nourriture et Lilianne semblait bien entourée, coincée entre Vik et Hunter sur le canapé. Je savais qu'Ephraim avait fait peur aux Catalyseurs. Qu'Orion n'avait pas pu l'arrêter. Je savais qu'il s'était fait plaisir, ce qui avait créé un ricochet du côté des Chefs de Clans. Ades avait appelé, il n'était pas content... ou très satisfait. À ce stade, je n'aurais même pas su le dire. Il était tellement versatile sur le sujet que je ne voulais même pas me prononcer. Quand Orion voulut s'éclipser, le regard d'Ephraim le poussa à se rasseoir très lentement sur sa chaise. Je savais qu'il s'était passé quelque chose avec Lilianne, mais je ne réussissais pas à deviner quoi exactement. Un baiser ? Un câlin ? Dur à dire venant d'Orion. Je n'aimais pas trop le fait qu'il n'avait pas défendu Lilianne, assez pour faire fuir les Catalyseurs.

Tous des enfoirés de première, femmes ou hommes. Hormis les quelques exceptions que je connaissais personnellement. Je sentis Zeke se presser contre mon crâne, sa joue contre moi. Il semblait encore tendu de ce qu'il s'était passé et je ne pouvais pas lui en vouloir. S'il avait pu tuer tout le monde là-bas, il l'aurait fait. Et il en avait largement les capacités, ce qui m'effrayait autant que ça me plaisait. Lui et moi, nous étions les deux faces d'une même pièce. Nous nous complétions. Je n'étais rien sans lui, et il n'était rien sans moi.

— Je peux leur rendre visite, souffla-t-il dans le creux de mon oreille.

Ephraim nous jeta un coup d'œil et grimaça.

— La visite du Faucheur a réussi à remettre tout le monde à sa place, remarqua Orion d'une voix assez basse.

Le film que les trois autres regardaient semblait leur plaire. Nous évitions donc de faire du bruit. Je ne voulais pas non plus remuer le couteau dans la plaie de Lilianne. Elle semblait à deux doigts de craquer. Ephraim m'avait dit qu'elle aurait pu toutes les tuer, mais que sa non-expérience de son pouvoir l'empêchait d'être maîtresse de ses actes. Elle subissait plutôt qu'autre chose. Surtout sans être liée à nous.

— Nous bougeons demain matin pour la réunion avec les Chefs de Clans, grogna Orion. J'ai des trucs à vérifier et à préparer.

— Personne ne sort ce soir, argua Ephraim. Je ne veux personne en vadrouille. Surtout pas toi.

Orion grogna et s'affala sur sa chaise.

— On n'est pas censé aller se balader ou voir du paysage ? demanda Lilianne à Vik et Hunter.

— On est bien ici, t'inquiète pas. On aura le temps d'y aller.

Il jeta un coup d'œil à Ephraim et ce dernier secoua la tête. Vik aurait sûrement aimé descendre au casino, mais je sentais Lilianne fragile, ce qui rendait Ephraim soupçonneux et hyper-prudent.

— T'aimes pas le film ? souffla Hunt.

Je retins un sourire. Ces trois-là étaient de nouveau inséparables, comme si les dernières années ne comptaient pas. J'aurais aimé que ce soit le cas. J'aurais aimé que Lilianne soit restée avec nous tout au long de sa vie. Quand je croisai le regard presque noir d'Ephraim, je sus qu'il pensait la même chose. Il se frotta le front et ses yeux reprirent leur couleur normale. Je m'étirai et me levai pour aller me servir un verre de whisky. Ephraim m'en réclama un, mais Orion déclina.