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Livia trouve la force de se relever. Elle se recule au bout du lit, le plus loin possible. Le brun a un moment pour admirer son corps nu, en entier, s'en délecte dans le plus grand des silences.

- tu fais chier à m'ignorer tout le temps.

Il lui offre une moue confuse en digne réponse. Alors Liv réplique vite.

- arrête, c'est bon, c'est tout le temps pareil.

- mais de quoi tu parles ?

Alors elle se lève en fureur, exposée au ciel à peine éclairé.

- j'ai fais tout ce que j'ai pu tout le temps, mais j'en peux là, tu le vois ?

Elle pointe son visage baigné de larmes d'un doigt sévère.

- je suis épuisée, ce que tu me fais vivre m'épuise, ça fait à peine deux mois. On est rien du tout et c'est juste de ta faute. Moi j'ai tout tenté pour pas t'emmerder de trop et pas prendre de place. Tu me traînes où tu veux, chez je sais pas qui, au bout de l'Italie pour tes bras mais toi, t'en ferais pas le tier pour moi. Je rentre chez moi, à mon appartement à moi, pas au tien, pas dans ton lit, plus jamais tu m'entends ?

Livia rassemble ses vêtements, tire son sac même pas ouvert, en pleurs frénétiques. Mais il ne peut pas la laisser faire, ça n'arrivera pas. Il retient son poignet, elle se débat vite, ses lèvres demandent « dégage, dégage ». Le chanteur l'attrape par les bras, elle griffe les siens dans sa lutte. Il est impuissant et c'est atroce à ressentir.
Ça le met hors de lui. Il ne se reconnaît même plus quand il abat ses mains sur ses épaules pour la forcer à être immobile. Son dos marque un bruit sourd quand il rencontre brusquement la porte en bois ciré.
Il lui crie dessus pour qu'elle s'arrête, comme on le ferait avec un môme.
Il crie pas longtemps. Pas trop fort non plus. Mais suffisamment pour que les yeux bleus de Livia s'écarquillent sous la terreur. Elle ne le regarde plus, a maintenant paumé son regard dans le vide.
Livia livide.

Et c'est là qu'il réalise. Elle a tellement raison, et elle est toujours là. Il la malmène par "amour" mais ne la laisserait jamais partir. La culpabilité monte en lui quand il la voit sangloter sans un bruit. Lui aussi, sait ce que ça fait, de se retrouver le cœur brisé.
Il marmonne un truc, essaye en vain, puis s'y abandonne.
Là, caché dans le cou de Livia, il se met à pleurer. Il pleure qu'il est fatigué, qu'il s'en veut tellement, qu'il est désolé.
Elle tient contre elle ce corps qui lui semble immense maintenant qu'il est recroquevillé contre le sien. Et lentement, il glisse le long de la porte en l'entraînant avec lui.
Entre quatre yeux, Liv tente de comprendre. Elle ouvre la bouche, il la coupe instantanément.

- j'suis un enfoiré Livia, tu comprends pas, je t'ai mise dans le même panier que toutes les femmes que j'ai connu, à cause d'une seule.

Il voudrait dire son prénom, mais ça sort pas. Il pleure plus fort. Alors la blonde caresse son dos, sa joue, pour l'inciter à parler.

- j'aurais tellement cru finir ma vie avec elle. Mais on était trop différents, tu vois ? Je voulais l'entretenir, m'occuper d'elle, je lui écrivais des chansons. Mais c'était qu'une connasse sans notion du respect, et c'est devenu la guerre. Moi Berlin Est, elle Berlin Ouest.

Livia accompagne ses mots de caresses. Elle aime cette façon de toujours romantiser tout ce qu'il dit.

- elle a fini par partir avec un autre, et moi dans tout ça, j'ai jamais réussi à m'en relever. Non pas que je l'aime encore, non, faudrait être vraiment con. Mais regarde maintenant, regarde nous.

Il soupire en se rapprochant, pose ses mains sur les joues de sa belle qui pleure encore un peu.

- regarde toi, bon dieu, mais d'où tu sors hein ? T'es tout ce dont j'avais besoin, toi toute entière. J'ai eu beau faire des impasses ces derniers temps, t'étais là. T'as eu peur de Vic et t'es là maintenant. J'me rends compte comme un con que si tu pars c'est parce que je te pousse à bout. Liv, je voudrais te dire de trouver mieux, parce que tu mérites tellement mieux que moi, mais je peux pas. Je serai égoïste et je m'en contre-fous, mais me laisse pas comme ça Livia, s'te plaît, je le montre comme un aveugle mais tu me plais, t'es tellement de choses...

Elle attend qu'elle le dise, il prend l'inspiration qu'il faut.
Ma muse,

- apprends moi à faire confiance. J'veux te croire à toi. Répare moi.

Elle sourit au travers de ses larmes, essuie celles de Damiano. Il murmure enfin ce qu'elle aimerait lui crier.

- je crois que je t'aime, Liv.

Ce qu'on prendrait pour un sursaut s'apparente juste à un long soupir de soulagement. Ici, entre le mur et la porte, leurs bras se resserrent. Il pose son front contre le sien.

- moi aussi, tellement si tu savais, j'ai plus l'âge de tomber amoureuse comme une ado, mais ça me plaît, c'est beaucoup, c'est beau, et tu es parfait.

Le chanteur rit à moitié.

- j'le suis pas.

- pourtant tout ce qu'on a vécu jusqu'à présent était parfait. Je veux juste que tu me parles. Tu peux pas m'avouer des trucs pareils seulement au bord du précipice, tu vois ?

Il hoche la tête et se confond à nouveau en excuse. Elle assure que c'est rien.

- toi et moi, enfin, moi avec toi surtout, on va te sortir de là. Je vais t'aider à l'oublier, cette garce, personne mérite ça et je me fous de qui c'est, elle a juste tout intérêt à jamais croiser ma route.

- merci

- dis pas merci Dam, c'est rien, je fais ça parce que je tiens à toi, surtout parce que je t'aime aussi. Et que j'ai l'espoir qu'on devienne quelque chose de vrai.

Il pose une main sous son menton pour la regarder mieux.

- dis oui et ça sera sérieux, promis.

Livia le regarde dans le fond des yeux.

- pour de vrai ?

- pour de vrai.

- alors oui.

Ils sourient trop, c'est pas donné de faire sourire autant quelqu'un. Ils s'embrassent maintenant, partout, se murmurent des je t'aime contre la peau pour contrebalancer avec ceux qu'ils n'ont pas osé se donner au cours des dernières semaines.

Damiano s'est étendu contre la poitrine de -enfin- sa copine. Elle a eu le temps de lui promettre de ne jamais le blesser, il lui a dit en retour qu'il la croyait.
Elle a ses mains perdues dans ses boucles brunes, il tient ses hanches comme un radeau.
Il embrasse son épaule, pour ne pas changer les choses, au même endroit. Son préféré.
Il a pris ses marques avec elle, il la connaît maintenant, de mieux en mieux.
Il relève la tête.

- Liv ?

- hm ?

- quand on rentre à Rome, tu viens t'installer avec moi ?

La peintre sourit avec tellement de tendresse.

- maintenant ?

- c'est jamais trop tôt, si ?

Elle se rapproche de sa bouche.

- jamais trop tôt.

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⏰ Dernière mise à jour : Jul 29, 2023 ⏰

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