Dans un effort surhumain, je roule sur moi-même. Je sens la terre humide sur mes joues. Bref cataplasme sur mes joues brûlantes, avant de prendre appui sur mes genoux et mes bras pour me redresser. A moitié sonnée, avec un rictus et les yeux embués de larmes, je relève mon buste. Victor m'a pris mon bras gauche, geste de réconfort et pour m'aider dans mon effort.
« Ça va ? Vanessa... »
Je tourne la tête vers lui, je ne vois qu'une ombre floutée parmi des auréoles de lumière. Je renifle pour refouler un liquide visqueux qui commence à couler. D'un revers de la main pour l'essuyer, je ne vois rien aucune trace rougeâtre sur mon gant. Pas de sang mais juste de la morve mélangée à de la terre. Finalement je suis bien plus résistante que je ne le pensais. A part mes pommettes et mon nez qui piquent grave, comme si on m'avait giflée à toute volée. Je dois avoir le dessin du ballon imprimé sur le visage. D'une voix rauque, je réponds finalement à Victor.
« Impec... je commence juste à être échauffée... »
Je vois un sourire sur son visage, cela me rassure, je n'ai pas perdu la vue, je vois de nouveau clair et net et j'arrive encore à faire des plaisanteries, même si elles ne sont pas toujours très drôles.
Une profonde inspiration et avec son aide, je me relève complètement. Un léger tournis m'accompagne quelques secondes. Je me penche légèrement sur le côté pour cracher ce liquide visqueux qui stagnait dans la bouche ; charmante image que je dois laisser.
"Un vrai garçon manqué". A cette pensée, je jette un œil en direction de mes fans; Leila et Nélya sont figées comme des statues. Et la bouche de Leila fait un « o » comme celui d'un poisson rouge. Je lève un pouce dans leur direction pour les rassurer. Ça marche, les traits de leurs visages se détendent.
Je me tourne vers les buts, Aaron lui a dressé ces deux pouces à mon encontre. Une grande fierté gagne tout mon corps, et je lui renvoie le même signe. Soutien et estime entre gardiens, ça fait chaud au cœur et mon cuisant qu'une frappe de la texture en PVC d'un ballon sur la peau.
« Assez reposée » me dis-je, et je me dirige vers le ballon qui avait roulé quelques mètres plus loin. Je me saisis de ce dernier, en le faisant tourner entre mes mains, je ne remarque aucune marque de notre rencontre brutale. Mais peu rancunière envers lui, je lui dépose une bise du bout des lèvres.
« Vanessa... »
Je reconnais cette voix entre toutes, c'est celle de Nathan. Je pivote sur mes pieds, un peu confuse, comme si j'étais prise en flagrant délit d'infidélité.
Il penche un peu la tête sur le côté en m'observant. C'est trop mignon... et un peu ridicule... j'ai l'impression de retrouver la même attitude que mon chien Rex quand il cherchait à comprendre. Hélas, disparu quand j'ai eu treize ans.
« Tu vas bien ? ...
- Oui, oui... pas de souci. En pleine forme
- Tu es sûre ? Après de tels shoots que tu as pris...
- J'encaisse bien », lui réponds-je, en marchant vers lui, les yeux plongés dans le bleu des siens. Nous étions pratiquement collés l'un à l'autre, seul le ballon séparait nos deux corps. Mon corps fourbu cherche maintenant le réconfort. Une envie folle de me jeter sur lui me prit soudainement, de lui faire l'amour sur le terrain à la vue de tous. Toute pudeur semble m'abandonner. Mais je ne perçois pas chez lui la même envie.
« Je dois finir l'entrainement avec les autres pour constituer l'équipe » dit-il froidement.
« Décidément, il se prend trop au sérieux, c'est juste un tournoi interne de seconde zone d'un Lycée, pas un championnat européen » me dis-je. Sa froideur cache une certaine gêne, je le sens. Une question me taraude trop l'esprit pour ne pas lui poser.
« Et je fais partie de l'équipe ? Comme titulaire dans les cages ?... » Lui demandé-je en le fixant d'un air sérieux.
Il détourne la tête, en regardant du côté d'Aaron. Et je comprends. Pas besoin de me faire un dessin, je lâche le ballon qui tombe entre nous deux. Je fais demi-tour brusquement.
« Hé ! Vane... » m'interpelle-t-il.
Sans attendre la suite de ses paroles, je me dirige droit vers les vestiaires. Ma vue se trouble de nouveau... Des larmes coulent.
VOUS LISEZ
LA GOAL
General FictionJe m'appelle Vanessa, j'ai 17 ans et je n'ai pas froid aux yeux quand il s'agit de jouer goal ou pour les jeux du plaisirs. On me surnomme La Chatte. Amours, trahisons, amitiés, chances et pièges jalonnent ma vie de lycéenne et de sportive. D'un...