Mexico T.2

8. Attention ça chauffe

Le voyage jusqu'au Mexique s'est fait dans un silence pesant. Rodriguez n'a pas arrêté de ruminer dans sa barbe à propos de « l'autre connard » et moi j'avais trop de peine pour tenter de faire la conversation. Je sais bien que c'est pour ma sécurité que je dois partir mais je ne peux m'empêcher d'en vouloir à Rodriguez. S'il n'était pas venu en France, rien de tout cela n'aurait lieu aujourd'hui. C'est la deuxième fois qu'il m'arrache à ma vie mais cette fois ci, je ne compte pas me laisser faire. Je ne suis plus sa prisonnière mais son égale à part entière et il déchantera rapidement s'il pense qu'il va pouvoir me dicter mes faits et gestes comme un chien. J'appréhende cette nouvelle cohabitation forcée, nos deux tempéraments ont toujours fait des étincelles et ce n'est pas près de changer aujourd'hui. J'appréhende aussi mon avenir, que vais-je devenir ? Une simple poupée qui restera sagement à la maison pour faire les taches ménagères ? Ou va-t-il me laisser donner un sens à ma vie, avoir des objectifs, des passions, trouver un travail, me faire des amis ? Connaissant l'homme de Cro-Magnon qu'est Rodriguez, ça m'étonnerait grandement qu'il me laisse vivre ma vie comme bon me semble... Pourtant je ne peux pas me résoudre à abandonner tous mes projets de vie pour lui. 

Un 4x4 noir nous attend à l'aéroport et je ne reconnais pas l'homme qui conduit. Il ne m'adresse pas la parole et fait un résumé des derniers évènements à son boss qui n'est pas plus bavard avec lui qu'avec moi, hochant seulement la tête par ci par là. Néanmoins, quand la voiture se gare devant cette maison où je me suis sentie chez moi à la fin de mon voyage, un petit sourire nait sur mon visage. Au moment où je sors de la voiture, la porte d'entrée s'ouvre et une petite tornade me fait face.

_ Elina ! S'écrie Emilio en courant pour me sauter dessus.

Je le rattrape de justesse dans mes bras et nous maintient pour qu'on ne finisse pas les fesses au sol. Il me serre fort et je lui rends son étreinte, les larmes aux yeux. Cet enfant m'a manqué bien plus que je ne l'aurais pensé et je vois que cet attachement est réciproque. Lorsqu'il s'écarte de moi, il a un large sourire rayonnant et il m'attrape par la main pour me tirer dans la maison. A l'intérieur rien n'a changé quasiment, la décoration n'a pas bougée et des jouets sont éparpillés un peu partout dans le salon. Emilio me les montre un par un à une vitesse hallucinante à tel point qu'on peut se demander s'il arrive à respirer entre chaque phrase. Il court dans tous les sens, telle une petite tornade, pour me faire rattraper tout ce que j'ai loupé en un an.

_ A courir comme ça tu vas encore t'emmêler les pieds et pleurer pendant des heures parce que tu te seras fait mal s'exclame une voix derrière moi.

_ N'importe quoi ! Je pleure pas moi s'indigne Emilio avec une moue boudeuse.

Je me retourne et Samuel me fait face avec un immense sourire aux lèvres. C'est à mon tour de me jeter dans ses bras et il ne se fait pas prier. Il m'a manqué autant qu'Emilio et je suis si heureuse de le voir sain et sauf. Il n'a pas eu que des beaux jours au Mexique et cela m'aurait brisé le coeur qu'il lui arrive quoi que ce soit. Quand je le lâche, je remarque qu'il s'est rasé le crane, ça lui donne un charisme assez dur mais avec sa petite barbe et ses muscles qui ont doublé de volume, je suis sure qu'il doit faire palpiter tous les cœurs, enfin pas que les cœurs...

_ Dis donc c'est un véritable criminel que nous avons là ! Il te manque que les tatouages et tu seras le parfait stéréotype du taulard le taquinais-je

_ J'allais te dire que tu nous as manqué mais finalement tu devrais peut-être remonter dans l'avion dès maintenant me répond-il en riant.