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Jared

Ce soir, je serai son garde du corps auto-proclamé.

J'aurai préféré retourner dans notre bulle, coupés du monde jusqu'à mon départ au Mexique. Je crois que l'on est mieux quand on est seul. Mais visiblement je dois encore et toujours la partager.

J'observe rapidement les environs, des leds colorés sont l'unique source de lumière ici, ce bar m'a tout l'air d'une boîte de nuit avec les grosses basses résonnant dans mon dos. Sauf qu'à la différence d'une discothèque, ici personne ne porte de mini-robes moulantes ou de talons vertigineux. Même Jahra a pu entrer avec mon ensemble de jogging. L'ambiance est plus chill, plus détendue, on est sensés pouvoir passer un bon moment.

Sauf moi, parce que je n'arrive pas à la lâcher du regard. Je sais que les autres voient ça d'un œil curieux. Ils l'ont été quand on est arrivé ensemble, sans explications cohérentes. Mais personne n'a rien dit, peut-être que ça semblait trop gros pour être vrai, peut-être qu'ils ont cru à un malheureux coup du sort. Je les comprends, aux dernières nouvelles, Jah' ne voulait même pas que j'entre chez elle.

Je sais que de mon côté, j'aurai droit à un interrogatoire plus tard. Mais elle aussi du sien, je pense même qu'il a déjà eu lieu lors de leur petite escapade collective aux toilettes.

Plongé dans mes pensées je l'ai perdu. Rien qu'un instant mes yeux ont lâchés sa silhouette.

Et mon coeur s'est comprimé à l'idée qu'il lui arrive quelque chose, qu'elle m'échappe, ou qu'elle file entre mes doigts, encore une fois. L'inquiétude fait monter le sang sous mes joues, je sens chacune des pulsations vibrer sous ma peau.

Je sens que c'est la merde.

Parce que quand je la retrouve je m'allège tout à coup. Le noeud que j'avais dans la gorge se délie enfin. Et ça c'est pas bon. Ça veut dire que je suis trop dedans, ça veut dire que je me laisse trop aller. Je sens ce qui me pend au nez, je me sens m'abandonner au torrent d'émotions qui me submergent lorsque je pense à elle. Le semblant de contrôle que je pensais avoir s'est volatilisé alors j'en suis sûr, c'est ce que je ressens qui me commande, et pas l'inverse.

Je m'effraie presque.

Je me pose dans l'un des fauteuils de notre table et surveille Jahra qui se déhanche sur la piste. La ville ne dort jamais donc nous non plus, enfin pour ce soir.

Les lumières viennent la colorer de bleu, c'est marrant. On dirait presque la DA de Moonlight, j'ai l'impression d'observer un film jouer sous mes yeux. Mon ensemble gris doit l'étouffer, en plus la soirée est bien avancée pourtant elle ne fatigue pas.

Comme si elle avait vraiment besoin de sortir et de s'aérer l'esprit. Bizarrement sa tenue ne la dérange plus et tant mieux. Au moins elle passe un bon moment.

Après tout, quand je l'ai connu elle sortait tous les week-ends. Selon Tia a raconté à Darren, c'était la plus bourrée à chaque fois. Maintenant que j'y pense, est-ce que je l'ai déjà vu ivre ? Non. Mais c'est vrai qu'elle m'a déjà vu soûl, alors que je ne bois presque pas, quelle ironie du sort...

Lorsque Jahra m'a demandé de rejoindre ses amies dans un bar "tranquille" j'ai d'abord eu envie de refuser. Pour être honnête, je n'aime pas vraiment sortir ou me montrer. Et à ce niveau là, Jahra est mon opposé, il n'y a qu'à voir la façon dont elle se déchaine. Apparemment c'est une chorée, elle danse le "dougie" ?

How to get away with loveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant