Chapitre 12

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Les premiers jours suivant le retour de Marie furent euphoriques. Elle était heureuse d'être rentrée. Avec le temps, la gare était devenu son chez-elle. Elle ne s'était pas rendue compte à quel point elle aimait travailler ici. Être une ingénieure. Bien sûr que j'aime ça, pourquoi je n'aimerai pas ?

Marie se sentait légère et heureuse. Elle était à sa place. Même si le travail était dur puisqu'elle était toute seule, elle ne s'en plaignait pas. Elle avait même l'impression que les âmes étaient plus tranquilles qu'avant. Même si une agitée avait pointé le bout de son nez la veille.

Parfois elle pensait à ses amis. Un morceau de rail difficile à remplacer seule, un boulon trop serré pour elle, la porte de la chambre de Virginia perpétuellement fermée. Les petits détails lui rappelait ce manque et la ramenait dans la réalité. C'est pour le mieux. Elle a voulu partir, tant pis. Au moins moi je suis sûre d'être à ma place et en sécurité ici.

Le silence dans la cuisine lui était parfois pesant et elle souriait tristement en repensant à la soirée qu'ils avaient fait après l'arrivée de Johanna et Nils. Pourquoi se soucier d'eux ? Ils avaient leur place dans l'Après de toute façon.

Parfois Marie se surprenait à regarder au loin, debout sur le quai. Elle savait au fond d'elle qu'elle attendait un signe, quelque chose qui lui dirait quoi faire. Qui lui dirait que ses amis l'attendaient. Mais elle chassait toujours cette pensée puisqu'elle n'avait aucune idée d'où ils pouvaient bien être. Il était inutile de tenter quoique ce soit sans certitude.

La seule certitude qu'elle avait était que sa gare avait besoin d'elle.


***


Mais les choses ne durent jamais très longtemps. La solitude s'installa petit à petit et Marie trouva le temps long malgré la charge de travail doublée. Elle ne pouvait plus s'empêcher de penser à ses amis et à ce qu'ils devenaient.

Le soir devint son pire ennemi. Les âmes étant plus calmes, c'était l'heure d'aller se coucher et de se confronter à ses propres pensées. Pas de balais pour se distraire, pas de pièce à changer pour se concentrer sur autre chose.

Il n'y avait plus qu'elle, ses doutes et ses peurs. Ses pensées se dirigeait toujours vers ses amis. Étaient-ils sains et saufs ? Étaient-ils arrivés dans l'Après ? Est-ce qu'ils l'attendaient ? L'avaient-ils oublié ? Elle espérait de tout son coeur que tout allait bien pour eux et qu'ils se retrouveraient un jour.

Virginia lui manquait terriblement. Rien n'était plus pareil sans elle. Son habitude à la reprendre quand elle jurait ou à lui donner un pansement sans rien dire quand elle se blessait lui manquait. Son regard attentif et franc alors même qu'elle ne disait rien quand Marie lui racontait ses bêtises lui manquait. Sa manière de lui dire qu'elle l'aimait sans vraiment lui dire lui manquait. Fais attention à la marche. Donne un peu ce que t'as, ça doit être lourd. J'ai fait des pâtes carbo ce soir, je sais que t'aime ça. Y'a un petit vent aujourd'hui, tu devrais prendre une écharpe.

Penser à Johanna était tout aussi dur. Elles étaient devenues amis rapidement et elle l'avait carrément oubliée lorsqu'elle était morte. La retrouver avait été un de ses jours les plus heureux - et également un des plus tristes à cause des conséquences que cela impliquait. Son rire lui manquait. Ses blagues nulles lui manquait. Sa bonne humeur et son énergie lui manquait. Comment elle se chamaillait avec Nils...

Le Dernier arrêtOù les histoires vivent. Découvrez maintenant