Chapitre 11 - Cap ou pas cap ?

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Toute la semaine, Camille était sur un petit nuage. A l'hôpital, les enfants progressaient, elle leur inventait à chaque fois des nouveaux jeux et elle s'était embarquée dans une pièce de théâtre qu'ils allaient préparer pour Noël.

Elle voyait Philippe dès qu'il était disponible, à peu près trois fois dans la semaine et elle prenait un grand plaisir à s'entraîner avec lui. Mais ce qu'elle préférait, c'étaient leurs discussions autour du thé.

Philippe respirait la joie et la paix. En réalité, il aidait les enfants à travers le taekwondo. Les écoles lui envoyaient souvent les enfants qui avaient besoin d'un peu plus d'attention. Il les prenait sous son aile et les guidait pour voir la vie sous un meilleur angle.

Avec son épouse, il menait une vie simple. Il souhaitait s'installer en Province et ouvrir une école de taekwondo là-bas. Sa femme voulait se lancer dans le maraichage.

Camille parlait de sa vie et de Johanna bien sûr avec Philippe, elle arrivait à dire ce qu'elle ressentait. Elle avait essayé de parler de ce mal qui la rongeait à ses parents. Mais c'était plus délicat. Ses parents connaissaient Johanna, la blessure était aussi forte pour eux. Ils étaient traumatisés et avaient eu peur de perdre leur fille dans cette tragédie. Eux aussi vivaient avec une certaine culpabilité. La fille de leurs amis proches était partie alors que la leur était en vie.

— Vous devriez être coach, lui dit-elle

— Je crois qu'on a juste besoin que quelqu'un nous écoute, vous ne pensez pas ?

— Oui, vous avez l'art d'écouter.

— Vous aussi vous pourriez le faire, c'est accessible à tout le monde, dit-il en riant.

— Dès fois, on est trop omnibulé par ses problèmes pour écouter les autres.

— Le conseil que je peux vous donner c'est de vous débarrasser de ces problèmes justement car la vie est vraiment trop courte. Laissez la vie couler en vous. Johanna le voudrait pour vous.

— Oui mais comment vivre quand je sais qu'elle est partie trop tôt ?

— Vous pensez encore être responsable de sa mort. Personne n'est responsable de la mort. C'est juste écrit quelque part. Que voudrait Johanna pour vous ? Sincèrement ?

Sur ces paroles, Camille rentra chez elle. Elle fit un saut chez le traiteur pour prendre une salade niçoise. L'air froid la revigorait, les passants se promenaient sur les quais. Elle remarqua instantanément des couples s'enlacer.

Ses pensées allèrent vers Raphaël.

Il n'allait pas tarder à l'appeler. Depuis leur rencontre, ils se parlaient tous les jours. Elle était devenue accro à leurs discussions. A présent, elle n'attendait qu'une seule chose, le revoir mais elle n'osait pas le lui dire.

La première fois au téléphone, il avait tenu à tout savoir de sa vie. Ils avaient discuté pendant des heures, elle lui avait raconté son enfance à la Rochelle, elle lui avait parlé de ses amies, de son travail ensuite, de ses rêves. Elle voulait ouvrir un centre pour les enfants avec des soins adéquats mais aussi des jeux, des activités et elle voulait mélanger tous les enfants, ceux qui étaient malades et ceux qui ne l'étaient pas pour favoriser le partage et la solidarité.

Raphaël n'arrêtait pas de lui dire qu'elle était merveilleuse. Lui se voyait devenir réalisateur de films. Il vivait avec des histoires dans la tête.

Les autres fois, ils parlaient de pleins de sujets. Ils se racontaient leurs journées, leurs galères, leurs histoires avec leurs collègues...leurs centres d'intérêts aussi.

Mais Raphaël n'avait pas proposé de la revoir. Elle avait fait le premier pas, elle avait préféré lui laisser le temps d'avancer à son rythme.

Justement, il l'appela à ce moment.

— Camille, tu vas bien ? Tu es rentrée?

— J'arrive juste chez moi.

— Écoute, je me lance, si jamais tu n'es pas partante, tu m'arrêtes comme ça j'aurai l'air moins idiot ok ?

— D'accord.

— Tu es disponible samedi ?

— Oui pourquoi ?

— J'ai prévu tout un programme pour toi et moi. Tu voudrais qu'on se voie ?

— ...

— Alors ? Tu es là ? Je ne t'entends plus.

— Je suis là.

— Tu me fais languir c'est ça ? Je vais bientôt croire que j'ai tout compris de travers.

— Je viendrai, on se retrouve où ?

— Tu me rejoins sur les quais de Seine à 16h ?

— Ok et je dois être disponible jusqu'à quelle heure ?

— ...

— T'es toujours là ?

— Oui, j'avais prévu que tu restes avec moi toute la soirée !

— ...


Le passeur d'âmesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant