Chapitre 4

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Katsuki considère Izuku, alors que celui-ci lui installe le matelas où il va pouvoir dormir, dans la chambre qu'ils vont partager au-dessus de l'atelier de leur maître.

Le sang-mêlé a dans un premier temps signalé son irritation d'avoir à travailler pour un érudit, surtout quand il avait découvert le bazar scientifique du professeur Gowther. Mais son nouveau compagnon l'avait rassuré : lui, n'aurait pas à assister l'Orc directement dans ses recherches. Il n'aurait qu'à s'occuper des tâches nécessitant de la force, comme porter des piles de livres, du matériel lors des déplacements, ou jouer les gardes du corps à l'occasion, en de plus rares cas.

Pour l'instant, le plus musclé est circonspect vis-à-vis de sa nouvelle situation.

Lorsque la Centauresse qui l'a élevé a montré son vrai visage, celle d'une esclavagiste au cœur aussi sec que du corail mort, il s'est juré qu'il allait faire vivre un calvaire à celui qui aurait la folie de l'acheter... Sauf qu'il se retrouve au service d'un érudit qui se moque gentiment de tous ses excès de caractères, et dont le domestique irradie la bonté et la serviabilité !

En un mot comme en cent : il ne sait pas vraiment comment se comporter... Même s'il n'avouera, évidemment, jamais ressentir ce trouble.

Du coup, il se rabat sur ce qu'il sait le mieux faire : paraître orgueilleux et irrespectueux de son entourage !

« C'est toi qui portais les affaires du vieux, avant ? Comment tu faisais avec tes bras tout maigres ? »

« Le professeur est aveugle, mais pas faible, au contraire ! Nous partagions les charges et, au besoin, nous louions les services de volontaires. » Réponds le garçon aussitôt, sans se vexer le moins du monde.

« Même pas drôle. » Se dit Katsuki, habitué à ses anciens frères et sœurs d'adoptions qui réagissaient parfois facilement au quart de tour.

Izuku se redresse, tout sourire, le matelas installé, juste séparé d'un mètre de celui du garçon, à cause de l'étroitesse de la chambre.

« Et voilà ! Tu viens ? Maître Gowther nous a demandé de descendre dès que nous avions fini ! »

Il n'attend pas davantage pour joindre le geste à la parole et s'engouffrer en trottinant dans l'escalier, le plus grand lui emboîtant le pas mécaniquement.

L'Orc les attend, à côté d'une table débarrassée de son habituel capharnaüm, penché sur un livre aux runes abscons et en reliefs, posé sur un lutrin.

« Vous voici, les garçons. Très bien. » Annonce-t-il, se détournant de sa lecture.

Il leur fait signe d'approcher, alors qu'il poursuit : « Avec ta permission, Katsuki, j'aimerais te soumettre à une rapide analyse médicale. »

Le concerné hausse les épaules.

Un instant plus tard, il est assis sur la table et l'érudit procède à une série de tests et de palpation, accompagné de quelques questions auxquelles le sang-mêlé répond avec plus ou moins de bonne volonté.

Pendant l'opération, Izuku s'est avancé une chaise dans laquelle il s'est assis pour faire la conversation à son camarade.

« Dis, tu as déjà vu la mer ? Moi, jamais... Il paraît que c'est très beau ! »

« La Mater élevait ses enfants dans une ferme à proximité d'un port. Comme tous les Centaures, elle aimait l'océan. Question pour question : ça te vient d'où ces cheveux verdâtres ? »

Le plus jeune rougit, ayant un peu honte de la teinte de ses cheveux qui lui ont valu parfois des moqueries.

« Euh... Tu as entendu parler des Dragonoïdes ? »

« Ouais, même si je n'en ai jamais vu. Ce sont des hommes à têtes de lézard, plutôt misanthrope, non ? »

« Oui. Comme les Orcs, ce sont des érudits. Sauf que, eux, ils ne vivent qu'en petite communauté et s'intéressent spécifiquement à la nature même des choses... »

« Quel rapport avec ta tignasse ? »

Le garçon se retourne alors et soulève sa chemise, dévoilant son dos... celui-ci est constellé de grappes de minuscules écailles argentées, comme celles d'un petit lézard !

« Ma petite taille est le fruit de mon ascendance Naine... et ça et ma couleur de cheveux me viennent d'ancêtres Dragonoïdes. Du côté de mes grands-parents, d'après maître Gowther. »

L'intéressé émet un grognement affirmatif, alors qu'il ajoute dans un murmure concentré : « Je n'ai pas eu l'occasion d'étudier d'autres sang-mêlé Dragonoïde, mais il me paraît improbable qu'un descendant direct ait si peu d'écailles, mais il y en a cependant trop pour que ça soit plus vieux qu'une deuxième génération. »

« ... Ça me fait penser : vous sauriez dire pourquoi j'ai ces yeux rouges ? »

« Des ancêtres Démons. Deuxième ou troisième génération, puisque tu ne présentes aucune plaque osseuse. »

Un silence passe, Katsuki intégrant l'information, avant qu'il ne reprenne la parole, interrogeant soudain : « Et ça, c'est quoi ? »

Il montre du doigt un point indéterminé sur le dos du domestique plus petit.

« De quoi ? » s'enquiert celui-ci.

De son côté, le professeur cesse ses inspections, ses épais sourcils froncés, pour suivre plus attentivement la conversation.

Le sang-mêlé Démon fait signe à son camarade de s'approcher, puis le retourne et lui resoulève impudiquement la chemise, pour désigner un point sur l'omoplate droite d'Izuku.

« Ça. Vous voyez ? »

« ...Non. Je n'y vois rien, mon garçon, je te rappelle. Parle. »

Katsuki a les joues en feux sous la honte de cet oubli, alors qu'il obéit à son maître :

« J'ai d'abord cru qu'il s'agissait d'une tache de naissance, mais c'est trop net... »

Il approche son nez de la chose, sa respiration chaude chatouillant la peau de son camarade.

« Ça à la forme d'un cercle... avec des espèces de dents... c'est de couleur brune, un poil brillant... comme un tatouage neuf ! »

« Je n'ai pas de tatouage ! » s'affole le garçon en retour !

« Du calme. » Ordonne Gowther, tandis qu'il tend sa grande main pour tâter la marque, aidé par Katsuki qui guide son geste.

« Il n'y a aucun relief. Ce n'est donc pas étonnant que je ne l'aie pas senti lorsque je t'ai ausculté à ton arrivée ici. » Marmonne-t-il lentement, pensif, comme s'il cherchait ses mots.

Izuku ne peut se retenir plus longtemps de se tourner vers l'Orc, les yeux brillants d'inquiétude.

« C'est quelque chose qui vous évoque quelque chose, maître ? »

Le concerné se lisse la barbe un instant, avant de finalement répondre :

« Cela ressemble à l'un des symboles du dieu Cliclac... J'aurais besoin de faire plus de recherches. »

Sur un geste évasif du professeur, ses deux domestiques quittent alors l'atelier, laissant l'Orc à son travail, jusqu'à ce qu'il requière de nouveau leur aide.

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