Opale - Severus Rogue

Potions

Le professeur de potion ne tenait plus. Sa rage à l'idée qu'il lui soit arrivé malheur lui brûlait les entrailles.

-Il y a eu une complication pendant son sommeil...

-Laquelle ?! hurla presque Rogue, ne parvenant pas à maîtriser sa peur.

Le directeur se plongea dans un profond soupir en baissant la tête d'un air abattu.

-Elle ne se réveillera plus, Severus.

Ces paroles vinrent frapper le tambour de sa poitrine avec une violence inouïe. 

-Qu'est-ce que vous racontez ? Fit Severus qui cachait sa terreur derrière un agacement artificiel en se relevant et faisant face à la fenêtre. 

-Severus... je sais que vous teniez à elle...

-Non, non, NON ! Cria-t-il en renversant une chaise de sa salle à manger.

-Calmez-vous... J'ai conscience du fait que vous preniez à cœur sa protection mais...

-Vous ne... savez... rien ! Menaça Rogue devant la pseudo tentative d'empathie de son directeur. S'il savait à quel point son coeur se meurtrissait de devoir la quitter, s'il savait à quel point son envie de mourir s'était accrue en quelques secondes... S'il savait à quel point il l'aimait. Ses mains tremblaient, il ne voulait pas y croire.

-Où est-elle ?! hurla le professeur avec empressement. Il fallait qu'il sache, qu'il voit, pour réaliser. Jamais il ne l'accepterait s'il n'avait pas affronté la mort de la seule femme qui avait sû l'aimer.

-Je ne pense pas qu...

-OÙ EST-ELLE ?! répéta-t-il en perdant patience, la mort dans l'âme.

-Toujours à l'infirmerie. répondit Albus, perplexe face à la réaction surdimensionnée de son collègue, ignorant les sentiments qu'il nourrissait pour elle.

Le professeur de potion n'attendit pas qu'on lui donne la permission. En un instant, il était arrivé auprès de Darcy. De ce qui restait d'elle. Son enveloppe charnelle. Il observait son visage, sa peau légèrement blanchie par la mort, ses lèvres pâles, son thorax qui ne se soulevait plus... Il était tétanisé. Hypnotisé par son corps sans vie. Comment était-ce arrivé ? Comment cela avait-il pu se produire alors qu'il était dans l'enceinte du château ? Pourquoi personne ne l'avait appelé ? Il n'était pas auprès d'elle... Comme pour Lily, il était arrivé trop tard. Il l'avait tellement aimé. Elle ne serait plus là pour lui donner envie de vivre. Elle ne serait plus là pour le faire sourire, pour l'énerver, pour se mettre en danger. Elle ne serait plus là. Comment continuer sans elle ? Comment poursuivre le chemin tandis qu'elle s'était arrêtée ? La vie allait continuer, les gens allaient l'oublier. Il serait seul. À nouveau. Il lui fallait encore un instant. Un moment à l'observer. Observer son corps qui était toujours là, avant de replonger dans le temps où elle ne serait plus. Avant d'imaginer pouvoir se trouver à nouveau devant sa classe, sans elle. Avant que la rage d'être allé se coucher sereinement tandis qu'elle mourrait, le terrasse et l'envahisse. Avant de réaliser à quel point la mort frappe n'importe quand, même chez les sorciers. Même lorsqu'on n'est pas préparé. Avant de se rappeler à quel point sa présence lui était devenue nécessaire et que son absence éternelle ne le plonge dans l'abysse de la solitude. Avant de penser à tous les mots qu'ils ne s'échangeront jamais, à tous les baisers qu'il ne lui prendrait plus, à tout ce qu'elle ignorait de ce qu'il ressentait dont elle ne saurait jamais rien. Avant de se rendre compte que le pire sentiment est d'être affligé par la douleur et de ne plus jamais pouvoir retrouver les bras qui nous réconfortaient. Avant de se rendre compte de l'irréversibilité du mot jamais. Après ce moment, jamais il ne la reverrait. Jamais.