Chapitre 23 : J'ai réservé une table dans un restaurant que j'affectionne.

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Bonne année à tous ;) 

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Au matin du départ d'Alessandra, la tension dans l'appartement était à son comble. La veille, la petite fille avait dû supporter les intempestives recommandations de sa mère. La femme d'affaires, visiblement tendue malgré ses efforts notables des derniers jours, n'avait pu s'empêcher de se répéter encore et encore dans les oreilles de sa fille. "Tu as pensé à ton maillot de bain ?", "N'oublie pas ta licorne ou tu auras du mal à dormir", "Tu obéis à ta mère", s'était-elle même surprise à ajouter. Magda l'avait laissé faire, se doutant qu'elle ne serait pas sereine tant qu'elle n'aurait pas pu donner ses instructions de dernière minute à Émilie.

Et ce matin-là, la belle russe devait avouer qu'elle était curieuse de voir à quoi ressemblait l'ex-femme de sa patronne. Qui était donc cette mystérieuse jeune avocate qui avait un jour su voler le cœur de l'Italienne parfois si handicapée des sentiments ? Assise à l'îlot de la cuisine, le regard dans le fond de son café, elle attendait seulement que le temps passe en priant pour que la belle brune abandonne le silence effroyable dans lequel elle s'était murée depuis son réveil. L'ambiance générale était pesante. Bob ne cessait de jeter des regards dehors, debout près de la fenêtre, Alessandra prenait sagement son petit déjeuner, bien trop sagement à vrai dire. Et Giulia ne quittait pas des yeux son café, comme si elle allait lire l'avenir dans le fond de sa tasse. Elle avait tenté de s'offrir un verre de scotch ce matin. Mais Magda, horrifiée en la voyant saisir l'un des gros verres en cristal si tôt le matin l'avait arrêtée en posant une main sur son avant-bras.

- Non, sûrement pas. C'est trop tôt, avait-elle murmuré en la suppliant du regard.

Del Vecchio avait regardé sa montre et avait consenti à avouer qu'effectivement, 9h du matin, c'était un peu tôt pour commencer l'alcool. Elle avait docilement reposé le verre à sa place et avait accepté le café de sa gouvernante.

- Les voilà.

La voix de Bob fit sursauter la brune.

- Viens, ma princesse, on va chercher ta valise, sourit le majordome à l'attention de la petite fille en la prenant par la main.

Magda vit Del Vecchio se lever silencieusement, la mâchoire serrée en lissant des plis imaginaires sur la jupe crayon qu'elle portait ce matin. Elle la devina à cran, fragile, alors qu'elle s'évertuait à ne rien laisser paraître. Elle semblait fatiguée, sans doute n'avait-elle pas très bien dormi.

- Tout va bien se passer, rappela la gouvernante, voulant se montrer rassurante.

La dame hocha la tête pour toute réponse sans grande conviction. Magda plissa les yeux en comprenant que même après toutes ces années, Emilie semblait toujours avoir une certaine emprise sur elle.

- Vous descendez avec moi ? demanda Giulia avec une fébrilité dans la voix que Magda ne lui connaissait pas.

Elle sourit alors et accepta sans même y réfléchir, comprenant qu'Émilie n'avait pas accès à cet appartement. Alessandra revint, Bob portant sa valise derrière elle. Tous les quatre s'engouffrèrent dans l'ascenseur sans prononcer un mot. Giulia passa un bras autour des épaules de sa fille, profitant d'elle encore quelques secondes, se retenant de lui dire qu'elle pouvait encore changer d'avis. Bien trop vite, ils arrivèrent sur le trottoir. Une grosse BMW blanche était garée en double file et Magda posa enfin son premier regard sur Émilie. Elle vit une grande blonde à l'air glacial habillée d'un costume blanc. Une belle trentenaire longiligne au regard bleu d'iceberg. Ses traits étaient fins mais sévères, et la gouvernante se dit qu'elle devait être plus jolie si elle se laissait à sourire un peu. Ce qu'elle fit moins d'une demi-seconde plus tard en accueillant la petite fille qui courait dans ses bras.

Trois Mille Euros Net.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant