Chapitre 25 - Rêve

353 9 2
                                    






















- Meva -




















Face à face, j'observais son visage doux me confesser ses douloureuses pensées.

On resta un instant en silence, à se regarder droit dans les yeux. J'aurais aimé le réconforter, le rassurer, lui dire que ce n'était pas grave, que tout irait bien. Ce n'était pas grand-chose après tout, on était encore jeune, on était pas obligé de le faire maintenant.

J'aurais aimé lui dire qu'on avait tout le temps du monde. Mais au lieu de ça, je ne dis rien, me rapprochant simplement de lui jusqu'à ce que nos fronts se touche. Lui agrippant la main sous la couette, je fermais les yeux, savourant sa simple présence tandis que le poids de ses paroles pesait entre nous.

J'espérais qu'il ressentait tous les mots que je ne pouvais lui dire. Comment le rassurer alors que j'étais moi-même terrifié ?

Il avait peur, et je ne pouvais que le comprendre.

Rouvrant les yeux, je le vis m'observer et à cet instant, je me rendis compte que je ne pouvais laisser le silence s'emparer du moment.

- Kieran je-

- Je suis désolé. Sa voix s'empara de la mienne avant que je ne puisse lui dire grand-chose.

- De quoi ?

- J'aurais pas dû te dire tout ça. Je veux pas que tu sois mal à l'aise avec moi.

Je ne pus que sourire.

- Ça n'arrivera jamais.

Son visage arborait un air sérieux qui ne me plut guère. Mon visage si près de lui, j'avais l'impression de le voir pour la première fois. J'apercevais chaque muscle se tendre sous sa peau, chaque marque d'expressions se creuser un peu plus. Et ses yeux, la couleur que le clair de lune leur donnait était tellement obscure qu'on aurait dit que son iris avait complétement disparue sous la noirceur de sa pupille.

- Tu ferais mieux de dormir Meva.

Son ton peu chaleureux ne me dérangea pas et quand il ferma les yeux, je pus continuer l'analyse de son visage. Ses paupières non détendues me prouvaient qu'il n'était pas prêt à dormir.

Je savais que si je ne détendais pas l'atmosphère, il s'endormirait nerveux, ou peut-être qu'il ne dormirait pas, simplement remuant ses obscures pensées en lui. Après qu'il m'ait raconté tout ça, je devais bien lui rendre la pareille, en espérant le faire se sentir un peu mieux.

- Je me faisais harceler quand j'étais petite. Ses yeux s'ouvrir brusquement, ne s'attendant sûrement pas à ce que je parle, et encore moins à ce que je prononce ce genre de mots. Mon père a été envoyé en Italie quand j'avais trois ans, j'ai fait ma maternelle là-bas. Je parlais seulement italien, à tout le monde, même avec mes parents. Mais quand on est rentré, c'est devenu un problème. Bien sûr, je comprenais tout, mais je ne parlais pas vraiment. Je mélangeais les langues et j'avais du mal à prononcer certains mots.

Je ressentais ce qu'il avait ressenti à me dévoiler ses pires souvenirs et la peur qu'il se moque me retournait l'estomac.

Faites qu'il ne rit pas. Pas lui.

- À cette période, j'étais... enfin, j'étais plutôt ronde et ça faisait beaucoup rire. J'avais du mal à prononcer ces mots, j'avais du mal à avaler ma salive et tout en respirant doucement, je continuais.

- Il me demandait combien de pizzas je mangeais par jours. J'étais la grosse italienne pour eux. Il restait attentif, me regardant tandis que je distinguais les traits de son visage se faire plus dures. J'avais droit à toute sorte de réflexions sur mon physique. En plus de ça, j'avais du mal à parler et les moqueries ne faisaient qu'empirer mon état parce que je n'avais pas d'amis. Je ne parlais avec personne. Je voyais une orthophoniste qui m'a beaucoup aidé et quand j'ai enfin maitrisé la langue, je n'ai plus jamais voulu parler Italien. Au collège, j'ai perdu du poids et alors que tout le monde se faisait des amis, je préférais rester dans mon coin. Je lisais, toute la journée, j'écrivais aussi et au lycée, j'ai fait la même chose, sauf que j'ai rencontré Lexie.

NO MORE LOVE NOTES [EN RÉÉCRITURE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant