Chapitre 11

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Vendredi, j'assiste à mon premier match de football américain. Ça ne m'a jamais intéressée avant, et ça ne m'intéresse toujours pas. Je suis assise en haut des gradins, avec Woods et ses amis. Jusque-là, il n'y a pas grand-chose à voir. Les joueurs passent leur temps à attendre ou à se concerter. Niveau action, ça laisse à désirer. Ça n'a rien à voir avec les matchs qu'ils montrent dans les films ou à la télé. À 21 h 30, ils ont presque fini de jouer. Enfin, j'espère. Je me cache derrière ma manche pour bâiller lorsque Woods pose subitement son bras sur mes épaules. Mon bâillement s'interrompt tout net.
En bas, Costia et les pom-pom girls s'activent. Elle scrute les gradins tout en se dandinant et en agitant ses pompons. Lorsqu'elle nous voit, elle se fige l'espace d'une demi-seconde, avant de déclamer un nouvel encouragement, l'air furieuse. Je regarde Lexa à la dérobée. Elle arbore un sourire satisfait. Lorsque Costia regagne la ligne de touche, elle me lâche et semble se souvenir brusquement de ma présence.

— Eli fait une petite fête ce soir. Tu veux venir ?

Je ne sais même pas qui c'est. Je bâille de nouveau, de façon exagérée pour qu'elle comprenne bien.

— Euh... Je suis vraiment fatiguée. Donc non, merci. Ça ne t'embête pas de me déposer chez moi en y allant ?

Woods me regarde bizarrement, mais elle ne proteste pas. En rentrant, on passe devant le restau du quartier.

— J'ai faim ! dit brusquement Woods. Ça te dit qu'on s'arrête grignoter un truc ?

Elle me regarde avec insistance et ajoute :

— Ou tu es trop fatiguée ? J'ignore sa vanne.

— Bonne idée. Allons manger.

Lexa fait demi-tour et on va au restau. On prend place sur une banquette, tout devant. Chaque fois qu'on venait ici avec Echo et Bellamy, on s'asseyait au fond de la salle, près du jukebox, pour y mettre plus facilement des pièces. Une fois sur deux, le jukebox était cassé, mais on aimait bien être à côté quand même. C'est bizarre d'être là sans eux. On avait nos petites d'habitudes ici. Par exemple, on coupait les croque-monsieur en petits carrés et on commandait une soupe à la tomate pour les tremper dedans. Ensuite, pour le dessert, Bellamy et moi, on se partageait une gaufre avec une double ration de Chantilly et Echo prenait du pudding au tapioca. Oui je sais, c'est répugnant.

Seules les mamies aiment le pudding au tapioca. Notre serveuse, c'est Kelly. Elle étudie à la fac. On ne l'a pas vue de l'été, mais apparemment, elle est de retour. Elle dévisage Lexa en nous donnant nos verres d'eau.

— Tu n'es pas venue avec tes amis, ce soir ? me demande-t-elle.

— Echo est partie en Écosse et Bellamy... n'est pas là.

En entendant le nom de Bellamy, Woods lève les yeux au ciel. Elle commande des pancakes à la myrtille et des œufs brouillés au bacon. Je prends un toast au fromage grillé avec une portion de frites et un soda à la cerise. Kelly part enregistrer nos commandes.

— Pourquoi tu détestes Bellamy ? je demande à Lexa.
Elle s'esclaffe.
— Je ne le déteste pas. Je le connais à peine.

— En tout cas, c'est clair que tu ne l'aimes pas.

Lexa fronce les sourcils.

— Je ne vois pas pourquoi je l'aimerais. Un jour, au collège, il m'a dénoncé parce que j'avais triché.

Woods a triché ? Je sens mon estomac se nouer.

— Tu as triché comment ? En faisant tes devoirs ?

— Non, pendant une interro d'espagnol. J'avais noté les réponses sur ma calculatrice. Et ce salaud de Bellamy a cafté. C'est nul, de faire ça !

Je la dévisage, mais je ne détecte aucun signe de gêne ou de honte à l'idée d'avoir triché.

A toute les personnes que j'ai aiméOù les histoires vivent. Découvrez maintenant