8 - L'Exil

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Résumé des chapitres précédants :

Après avoir été victime du suicide d'un enfant, Wyer décide de se rendre pour ainsi stopper la guerre. La capitale est prise et Wyer est fait prisonnier. Ezilly, réfugiée avec Eck, Yasmine et la mère de Wyer au manoir de la Duchesse de Sewu, où elle retrouve Havin qui vient de se réveiller aveugle, apprend que Shovaï vient en réalité d'un clan de nomades mercenaires. Elle, Eck, Havin, Yasmine et Sho décident de partir trouver ce clan pour leur demander de l'aide afin de vaincre les De Carminn

~ Ezilly ~

         Cette nuit-là, le ciel était noir d'encre, et la lune était si fine qu'aucune lumière ne traversait la forêt. Adossée à un arbre, je triai les racines et les baies récoltées au cours de la journée, tandis que Havin, blotti contre moi pour avoir plus chaud, somnolait déjà à moitié. Bercée par le crépitement du feu, je me serais sûrement endormie aussi si je n'avais pas été aussi frustrée.

— Je ne comprends toujours pas pourquoi je dois rester ici tandis que Sho, Yasmine, et Eck s'amusent dans la forêt, grognai-je à voix basse.

— C'est le lot des infirmes, répliqua Havin d'une voix endormie. J'ai plus d'yeux, et toi plus de jambes. Évidemment qu'ils ne nous ont pas emmenés chasser, nous n'aurions été que des poids morts.

— Je peux marcher...

Il ne prit pas même la peine de me répondre, et se contenta de secouer la tête contre mon épaule. Je sortis mon poignard et coupai le bout abimé d'une racine d'un geste contrarié.

— Et je suis douée pour viser au couteau, grommelai-je.

— Je sais. Mais tu nous aurais ralentis.

Je foudroyai du regard l'ombre familière qui émergea alors du sous-bois, mais je me tus, car je savais que le maître d'armes avait raison. Deux lièvres se balançaient sur son épaule, et derrière lui, Eck arborait fièrement une perdrix dans sa main. Malgré ma frustration de ne pas avoir participé à ce butin, je souris en voyant ce dernier si fier de lui. À l'orphelinat, il était difficile de chasser ; le petit bois où je travaillais autrefois en tant que lavandière n'était pas assez large pour abriter une faune épanouie. Eck et son jumeau Toa n'avaient donc que peu l'habitude de chasser en forêt ; et lorsqu'ils le faisaient, ce n'était qu'armé d'un couteau ou un lance-pierre, qui se ne révélaient que relativement efficace, à côté de l'arbalète de Sho. Ce devait donc être la première fois qu'il parvenait à abattre une telle proie.

— Donne-le-moi, fis-je en tendant ma main vers lui, je vais te le dépecer.

— Depuis quand sais-tu faire ce genre de choses ?

— Je vivais dans une ferme avant d'être Princesse.

— Vraiment ? s'étonna Sho.

Je désignai ma cousine d'un mouvement de la tête et expliquai :

— Ma tante est une paysanne. Elle a été reniée par les De Carminn, sa famille, lorsqu'elle a épousé un paysan. Et puisque c'est elle qui m'a élevé, j'en suis une également.

Sho et Eck étant aussi surpris l'un que l'autre, ce dernier s'étonna :

— Tu as vécu avec pendant quatre ans et tu ne le savais pas ?

— Sia a toujours refusé que l'on parle de notre passé, grogna mon frère adoptif. Je ne sais rien de sa vie avant le Palais.

Je souris tout en m'affairant à retirer les plumes de la perdrix.

WE ~ Tome IIIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant