— Sho, c'est moi. J'entre.
— Attends !
Mais j'avais déjà ouvert la porte.
Mon regard tomba aussitôt sur la peau découverte et ses muscles saillants. Je clignai des yeux, et il se tourna vers moi d'un air confus.
— Mon Dieu, Sho...
Je me précipitai vers lui de mon pas clopinant et m'approchai de son torse. Son épaule était rouge de sang.
— Alors c'était ça que tu cachais, lorsque tu as refusé que la Duchesse te soigne !
— Ce n'est rien, fit-il en se détournant.
Je grognai et le poussai doucement sur son lit, avant de sortir un drap propre de l'armoire de la chambre. D'un coup sec, je déchirai le pauvre tissu et le trempai dans la bassine où reposait l'eau utilisée pour faire sa toilette. J'eus une pensée d'excuse pour la Duchesse, et appuyai la compresse improvisée contre la plaie de Sho, lui arrachant un frisson.
— Alors c'est de toi qu'il tient ça ?
— Qui donc ?
— Wyer. N'avoir peur de rien, ne pas se soucier de sa santé, et encore moins de ses blessures... C'est toi que je dois gronder pour lui avoir inculqué ça ?
Sho lâcha un sourire tandis que je nettoyais sa blessure.
— Il ne s'agit pas de mauvaises habitudes, mais de priorités. Pour moi, et encore plus pour Wyer, la priorité est ton bien-être et ta sécurité. Tu es celle qui, de tous, porte le plus de responsabilités sur ses épaules. Alors oui... J'essaie d'alléger ton fardeau en évitant de te causer de l'inquiétude.
— Si tu es blessé, tu te soignes. C'est aussi simple que cela. Parce que si tu meurs des suites de tes blessures, ce ne sera pas de l'inquiétude que tu me causeras, mais de la douleur. Et c'est bien pire.
Il soupira.
— C'est simplement la blessure que m'a faite Wyer qui se réveille.
— Je sais. C'est l'endroit où il t'a poignardé.
Depuis combien de temps sa blessure s'était-elle réouverte ? Cela faisait un mois maintenant que Wyer l'avait poignardé, et Sho m'avait assuré que la blessure était en bonne voie de cicatrisation, et que je n'avais pas à m'en faire. Manifestement, il m'avait menti. Depuis que nous avions fui le Palais, je n'avais cessé de me reposer sur lui — au sens propre comme au figuré. Pourtant... Il était blessé, lui aussi. Ce n'était pas pour rien qu'il n'était pas resté se battre avec Wyer.
Une terrible culpabilité me perça le cœur, et je serrai les dents, me concentrant sur la blessure. Sho arrêta alors mon geste en attrapant doucement ma main.
— Tu lui en veux toujours ?
Je fixai longuement le drap blanc qui était devenu rouge.
— Je... Je ne lui en veux pas. J'ai juste peur, tu comprends, Sho ? Depuis que je le connais, Wyer ne s'est jamais confié à moi. Pas une seule fois il n'a songé, il y a quatre ans, à me partager la menace qui planait sur moi, et toutes les inquiétudes que cela lui causait. Quand je suis revenue, ça a été à nouveau la même chose : j'ai dû lutter pour qu'il me parle, et me dise la vérité. Lorsque je suis avec lui, je dois me battre en permanence pour qu'il me laisse rester dans sa vie, qu'il m'exprime ses pensées et me partage ses douleurs. Je pense qu'en réalité, dans son esprit, il a toujours été seul... Il n'a toujours compté que sur lui-même. Ce mur entre nous, je suis incapable de le briser, soufflai-je.
VOUS LISEZ
WE ~ Tome III
أدب تاريخيIl est prisonnier. Elle mène la rébellion. Dans un monde de sang et de trahison, sauront-ils résister ? Lorsque le jeune Havin se réveille du coma, il découvre un monde plongé dans le chaos. Sa soeur, la Reine Ezilly, a fuit le Palais en compagnie d...