L'instant même où le monteur gronda, la voix grave d'Amaël remplit l'habitacle.
Contrairement à l'arrivée où le grand brun s'était tu dans le rôle du futur avocat qu'il deviendra en gardant cette distance entre lui et moi, il se déchaîna dans ses paroles :
— Je n'arrive pas à croire que je me suis encore fait duper pour de beaux yeux et une belle bouche ! Il faut vraiment que j'en termine une bonne fois pour toutes avec ces études et que je me lâche complètement !
Je ne l'observais que d'un œil.
Est-ce qu'il s'adressait à moi ou à lui-même ?
N'osant pas intervenir, je restais dans mon mutisme, à l'écouter. Sa voix ne se bloquait pas.
Seuls des souffles atténuèrent sa conversation rapide et pleine de reproches qu'il poursuivit, tout en ne quittant pas la route des yeux :
— Tu te rends compte que j'ai complètement vrillé, Yu ? Comment est-ce que j'ai pu leur montrer cette même facette alors que j'ai clairement changé ? Putain !
Ma tête se pencha brusquement alors qu'il venait de freiner dans le village, en voyant une mère et un enfant traverser, sortant d'entre deux voitures en courant.
La ceinture me bloqua affreusement le torse et tandis que je tirai dessus pour la détendre, il insulta les deux personnes avec un sourire sur le visage, en les fixant.
— Tu recommences ! m'exclamai-je en passant les yeux de lui aux piétons, le souffle coupé à cause du choc.
Le dispositif continua de me plaquer au siège et à m'irriter le cou en me brûlant la peau.
Je forçai dessus pour me libérer de cette horrible sensation d'étouffer sur le cuir.
Une boule bloqua ma gorge, mon cœur n'arrêtait pas l'accélération, ma peur se prolongea.
Je continuais à m'agiter en bougeant de droite à gauche, mais la ceinture se resserrait davantage.
Et alors qu'elle m'étranglait et que les larmes se déversèrent sur mes joues en rythme avec ma respiration effrénée, je vis mon cousin se détacher et se pencher vers moi, en appuyant consécutivement sur le fermoir qui n'obtempérerait pas.
— Aller... Ouvre-toi !
Tout en s'énervant sur le plastique qui restait bloqué, j'observai la femme avec le garçon provoquer une fureur en face alors qu'une voiture venait de klaxonner à leur passage.
Puis j'entendis Amaël contre ma tête, les mains sur la ceinture de sécurité :
— Calme-toi, respire doucement et elle se détendra.
Je retins mon souffle tout en sentant mon cœur cogner contre ma cage thoracique.
Je mourrai de chaud dans ma doudoune et la chaleur de mon buste se déplaça partout dans mon corps, y compris mes paumes qui devinrent moites.
Je fermai les yeux pour me concentrer en ignorant la pression de la matière brûlante sur ma chair et je sentis que l'on forçait dessus.
Quelques secondes plus tard, quand la respiration d'Amaël me chatouilla la joue, je sursautai à nouveau en entendant klaxonner plusieurs fois.
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Un 25 décembre et des poussières
Teen FictionYu Jimpan est obsédée par le premier roman qu'elle a lu. L'histoire d'un garçon qui découvre l'Afrique accompagné d'un zèbre. Depuis, elle n'a que lui en tête. Elle rêve de lui, imagine des scénarios avec lui et l'humanise. Mais un jour, Yuyu se ren...