To love is to suffer

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Save Your Tears
Breakdown

   Peut être que ce soir là fut le meilleur, ou le pire. Pour l'un, il s'agissait de sortir de sa prison interne pour la première fois depuis quelques temps, pour l'autre, c'était de feinter pour un soir de plus que tout allait pour le mieux, qu'il n'y avait pas un vide, un manque.

   Les lumières s'agitaient rapidement à travers les vitres de la boîte dans laquelle il s'apprêtait à entrer, trop rapidement même, cela en devenait éblouissant et il ne lui en fallait que peu pour faire demi-tour sur le champ. Malgré ça, il prit sur lui et entra main dans la main avec cette angoisse qui lui oppressait les poumons dans la salle. Il plissa les yeux afin de s'habituer aux couleurs vives qui vinrent les lui tirailler. Il aurait aimé en réalité ne jamais croiser son regard, le regard qu'il aimait tant, le regard qui lui plantait une dague en plein cœur dès qu'il le croisait . Si il passa immédiatement la pièce au peigne fin de manière appuyée, c'était seulement pour fuir encore un peu.

   De l'autre côté, ce n'était que le contraire. Elle avait vainement essayé de ne pas penser qu'à ça depuis que sa meilleure amie lui avait dit qu'il serait là, et malgré ses efforts pour s'occuper l'esprit, elle n'avait pas cessé de jeter des coups d'œil vers la porte d'entrée, ce qui fit qu'elle n'avait en rien loupé son arrivée. Dès que son attention s'était posée sur ses cheveux blonds et ses yeux d'ambre, elle avait senti sa poitrine se resserrer si fort qu'elle croyait ne plus pouvoir respirer. Sa gorge nouée en avait été douloureuse quelques instants, comme lorsque l'on pleure trop en essayant de ne pas trop sangloter, mais cela n'avait pas eu le temps de durer avant que sa respiration ne se coupe définitivement.

   Ce qui put paraître ironique est qu'ils partageaient exactement les mêmes sentiments houleux. 

« Qibli ! Par là ! »

   Et ce ne fut cette fois qu'elle qui fut envahie par une joie intense mêlée à ce sentiment d'incertitude lorsque le regard du garçon s'était directement posé sur le sien, mais ce fut une pointe de déception qu'elle ressentit lorsqu'il détourna le regard plus rapidement qu'elle ne l'aurait espéré. Il fit un signe à sa cousine de loin et s'approcha, ne souhaitant intérieurement que ralentir le temps pour reculer ce moment un peu plus encore.

   A l'instant où le cri d'Haru avait retentit et que ses bras s'étaient mis à s'agiter afin d'attirer l'attention du garçon, ils avaient pris conscience de l'imminence de la situation, que c'était maintenant le moment. Le moment où ils allaient devoir se parler, ou se reparler, ou juste se regarder droit dans les yeux et même peut être se perdre à nouveau dans la voix de l'autre.

   Si lui ne sentait que ce sentiment pressant d'avoir l'envie de prendre ses jambes à son cou, elle, ressentait une agréable vague de chaleur dans tout son être. Qibli avait toujours dégagé cette aura réconfortante et sécurisante, elle avait un moment eu l'impression de ne plus jamais pouvoir la revoir. Ce soir, les cheveux relevés en un chignon et habillé comme il l'était, vêtu d'un pantalon beige et d'un t shirt, alors que ça faisait un moment, en fait depuis ce moment qu'elle ne l'avait pas vu comme ça. Il rayonnait un peu plus à chaque instant pour elle.

« Eh beh, tu t'es appliqué ce soir ! »

   Haru l'avait pris par les épaules et avait tiré l'une de ses joues comme on le ferait à un enfant.

« Tu sors enfinnnn, bon pas que tu sortes beaucoup en temps normal, mais enfin là tu t'es dépassé! »

   En temps normal.

One-shots || Recueil Où les histoires vivent. Découvrez maintenant