Chapitre 6 : Avant les Jeux

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De fait que les cours jusqu’au repas étaient annulés, nous étions tous autorisés à circuler dans la cour librement, ainsi qu’exceptionnellement dans les couloirs, excepté la zone de l’administration, qui est très logiquement épargné par cette autorisation. Déjà les élèves discutaient entre eux pour s’informer de leurs envies et idées d’équipes, imaginant dès maintenant les stratégies possibles, prenant en compte les capacités mentales et physiques de ses possibles coéquipiers pour visé la victoire, prenant aussi en compte les éventuelles épreuves.
Nous nous étions placés de nouveau tous les trois sur l’un des bancs dans le hall, regardant passé les personnes à l’extérieur en papotant, tout en se revigorant grâce au soleil qui traversait les planques de verre bleuté comme celle des gratte-ciel, lumière qui donnait une couleur très légèrement bleutée aux dalles de marbre polies.
Très vite l’heure du déjeuner approchait et nous étions encore assis sur le même banc. Mais à moment donné dans ce temps, une chose se produisit de nouveau. Cette chose ne fut pas vraiment un fait, mais une personne ; pendant que nous attendions l’heure du repas pour ensuite aller jouer aux Jeux Pindrique, les élèves autour du portail s’agitèrent, une voiture venait d’arriver. Nous pûmes tout voir depuis notre poste : une veille voiture, rapiécée de morceaux de métaux de différentes origines, rouillée ou neuve à divers endroits sur sa carrosserie, s’arrêta en plan devant le portail dans un crissement de pneus déchirant.
Elle s’arrêta net et une femme sortit de la voiture par la porte du passager. Ce fut des plus étranges, alors que pourtant la voiture, une deux-chevaux, ne semblait pas avoir été achetée avec une grande quantité de sous, la femme portait des habits très cher. Elle était habillée d’une robe qui frisait le mouler, lui donnant des formes inexactes, de grandes bottes en cuir noir à talons qui montait jusqu’aux genoux sur un collant très léger gris clair. Ses cheveux blonds qui bouclaient légèrement étaient ramenés sur les côtés de façon presque naturel, malgré que l’on puisse se douter qu’elle y dépensait un temps considérable pour avoir une telle beauté. Cette femme me disait quelque chose mais je n’arrivais plus à me remémorer qui elle pouvait être.
A son approche de la grille, personne ne vint lui ouvrir au bout de quelques instants, et sûrement par impatience, elle fit quelque chose que personne ne s’attendait. Elle recula d’une poignée de mètres de l’entrée en quelque pas, prit son élan et d’un seul mouvement sans imperfection, elle courut, sauta contre la grille, se propulsa du haut de cette dernière, fit un double salto avant et atterrit sans dommage dans un claquement de talons sur les pavés de pierres – qui ne recouvraient que l’entrée. La femme se mit à marcher d’un pas déterminé en direction de l’entrée principale du hall, un air de rage ou de colère masqué sous son maquillage recouvrant son visage sans défaut. Mais toujours rien à faire, je n’arrivais pas à me rappeler où j’avais pu l’apercevoir.
Mais quoi qu’il en soit, cette femme approchait à grandes enjambées, avait un air furieux et aucun élève ne semblaient vouloir s’interposer à son passage vers le seuil du bâtiment. Même la concierge sembla craindre cette femme et ne daigna pas sortir de la loge après le saut de cette personne pour rentrer dans l’enceinte du collège. Je ne savais pas si le principal et son frère s’étaient aperçus de la présence de cette femme, malgré le sillon parmi les élèves qu’elle produisait par sa simple présence dans la masse.
Alors elle était arrivée à la porte du hall et elle entrait. A peine elle nous jeta un coup d’œil qu’elle le détourna et continua son chemin sur l’allée principale entre la zone de l’administration et des classes, qui se terminait sur un grand couloir encadré des deux côtés de deux couloirs dont un troisième caché sous le palier de l’étage supérieur. Car au milieu du bout de ce couloir se trouvait un escalier double qui donnait sur seulement un bout du couloir du premier étage et une porte à double battants en face de l’arrivée de l’escalier. Depuis ce palier, partait dans le sens opposé un escalier simple de chaque côté, qui donnaient sur le second étage, juste au-dessus de nos têtes.
Mais c’est à ce moment précis qu’une chose des plus étranges se produisit : après que la femme fut passé entre à travers la rangée de bancs, elle alla vers l’escalier, sûrement pour rencontrer le principal, ce qui était jusqu’à là, normal, mais ce fut avant qu’elle ne soit logiquement hors de notre vue. Car elle devait croire que nous ne pouvions plus la voir, enfin, je veux parler de la personne qui fit une chose comme par magie.
Quand la femme passa notre champ de vision, son ombre vacilla et de cette dernière sortit une silhouette encapuchonnée d’une cape serrée qui couvrait son visage. Quelque chose m’avait intriqué dans cette femme et j’avais agrandi amplement ce champ de vision en me penchant dans le milieu du hall pour refaire mes lacets, mais en réalité c’était pour mieux la revoir – pour essayer de savoir qui elle était –, et je vis toute la seine sans que je ne me fasse prendre.
La femme prit comme si de rien l’escalier vers le premier étage avec son acolyte puis monta au deuxième étage. C’est ce moment-là que l’étrange personne qui se tenait aux côtés de cette femme me lança un regard avant de disparaître dans l’escalier vers l’étage supérieur, c’était le regard d’une fille aux yeux vert bleu dont je n’aperçus que ces deux yeux perçants. Ce fut très étrange quand je m’aperçus de ce regard. C’est alors juste avant ce regard que Zack et Lara vinrent voir ce qui m’arrivait à regarder de cette façon l’escalier et ils virent eux aussi cet étrange personnage encapuchonné – Zack sursauta même tellement il ne s’y attendait pas.
Cette fille disparut alors à son tour dans l’angle mort de l’escalier vers le second étage et nous ne pouvions plus la voir. Nous restâmes là quelques instants sans vraiment comprendre qui pouvaient être ces deux étranges femmes. Ce fut Lara qui réagit la première en partant en courant vers l’escalier, très rapidement suivie par Zack et moi-même. Nous prîmes le premier escalier puis le second et nous voici arrivés en haut.
L’étage supérieur ressemblait au rez-de-chaussée car la superficie du hall où ce n’était pas des salles de classes ou d’administration était identique. Les deux seuls grands changements mis à part la cage d’escalier étaient que le plafond était celui d’un étage normal – et non de deux étages comme dans le hall –, de plus, au milieu de la baie vitrée, se trouvait une pièce qui était le bureau du principal.
A peine étions-nous arrivés à l’étage que la porte du bureau du principal se refermait sur un éclat lumineux qui traversait les vitres de la pièce, pour ne nous laisser qu’une lumière sous la porte et les ombres dansantes qu’elle produisait. Nous nous étions approchés aux abords de la double porte en chêne qui nous empêcher d’entendre les conversations qui se déroulaient dans cette salle et nous étions assis contre la porte. Et malgré cette proximité mes amis n’entendaient rien, mais je pus attraper qu’un seul mot, un seul nom, le mien.
Je ne voyais pas le rapport avec moi, et ni Zack ni Lara ne semblaient l’avoir entendu, je ne voulais de plus pas leur dire un mot de la totalité de ce que j’avais entendu. Car mon nom et prénom n’étaient pas seul dans cette conversation : le principal et la femme qui était arrivée en fanfare discutaient d’un sujet des plus étrange, ma retiration des Jeux Pindrique de cette année. Je ne comprenais non plus quel était le lien entre moi et ces jeux, à moins que ce ne soit en rapport avec une chose beaucoup plus grandiose.
C’est à cet instant que Zack, Lara et moi-même entendîmes une chose des plus claires et compréhensibles : des chaises qu’on tirait, signe que quelqu’un se levait pour sortir de la pièce. Nous nous levions d’un bond et courrions vers l’un des deux escaliers qui menaient au rez-de-chaussée ou aux étages supérieurs. Ces derniers se trouvaient à une dizaine de mètres des extrémités de la grande salle identique au hall – ils se trouvaient aux extrémités car le mur partait en arc de cercle comme les vitres à cause de la forme de croissant de lune du bâtiment administratif et éducatif.
La femme sortit alors en trombe vers l’escalier, et très vite, nous pûmes entendre le bruit des portes du hall se fermer brusquement. Mais aucun signe de la fille encapuchonnée. Notre principal se leva l’air exténué et ferma tout simplement la porte grande ouverte sur le couloir, avant de rejoindre son siège et de semblait se mettre à travailler sur son ordinateur. Alors que le calme était passé, nous sortions alors doucement de notre cachette, pour ensuite traverser à pas de loup le couloir, puis les escaliers. Nous arrivions alors dans un hall vide et silencieux, dont les seuls bruits étaient des brides très lointain, provenant de la salle des professeurs au troisième étage.
Nous pouvions observer des élèves encore ahuris par le passage de cette étrange femme, dont personne sauf le principal ne savait vraiment pourquoi elle était venue, sans parler des brides que j’avais pu attraper de cette étrange conversation. Mais une question trottait dans le fond de mon esprit, une question que mes amis avaient dû se poser : mais où était donc passée la jeune fille ? Etait-elle repartie en se cachant de manière incompréhensible dans l’ombre de la femme ? Ou était-elle encore là, cachée dans notre ombre ?
Mais je n’en pris finalement pas compte et nous étions revenus au point de départ : le banc et nos discussions, attendant l’heure du déjeuner, qui ne savait que tarder trop longtemps. Et très vite, des élèves commencèrent à se regrouper en un troupeau devant les portes du hall. Ils auraient pu rentrer, mais sûrement le fait d’être sous le soleil est agréable ou le fait que certains ne savaient pas qu’ils pouvaient entrer dans le hall, auraient joué un rôle dans leur choix. Quoi qu’il en soit, l’heure où les portes de la cantine – ou demi-pension comme l’appelle grand nombre de gens –, allaient bientôt s’ouvrir selon moi.
Cet instant n’attendit pas plus de cinq minutes, que le principal et son frère ouvrirent les portes du hall, les bloquant sur de petits ronds de caoutchouc incrustés à même le sol. Nous nous levâmes et nous rapprochâmes du couloir principal alors que les élèves rentrèrent d’une façon étonnement calme. Notre principal, encore accompagné de son frère, vint devant nous ouvrir les doubles portes qui faisaient face à l’escalier menant au premier étage, donnant ainsi à tous les élèves un accès possible vers un couloir montant en pente douce vers le réfectoire.
Nous commencions alors à monter derrière quelques élèves, ce couloir sans lumière – la lumière que nous pouvions observer provenait du bout de ce passage, du réfectoire –. Le couloir montait vers une salle qui prenait toute la superficie du quart supérieur au cercle central. Le mur qui faisait face à l’arrivée du couloir était comme son mur opposé, un arc de cercle blanc, mais celui-ci était percé d’une dizaine de fenêtres à double volets qui inondaient la pièce de lumière. Le couloir par lequel nous arrivions était étrange : quand il arrivait dans la salle, aucun mur ne le couvrait à partir du sol du réfectoire. Du côté droit de l’ouverture du couloir, se trouvait un de ces meubles de réfectoire où se trouvait les différentes propositions d’entrée, de plat et de dessert.
Après les cinq élèves de troisièmes qui passèrent avant nous, nous passâmes pour prendre notre repas. Je pris pour mon entrée trois demi-œufs couverts de mayonnaise, pour mon plat des lasagnes et pour mon dessert un cookie et une mandarine. Passés cela, nous partîmes vers l’une des multiples tables de cantine qui parsemaient le réfectoire en rangs ordonnés. Nous nous assîmes sur l’une de ces tables beiges aux deux pieds bleus cyan, là où se trouvait en son centre un empli d’eau.
Zack s’assit alors à ma gauche, Lara en face de lui. Tous deux avaient pris à peu près le même menu que moi, Zack avait pris pour fruit une banane et Lara avait pris quant à elle pour son entrée une sorte de pâté en croute. Nous commencions alors à manger pendant que le réfectoire se remplissait petit à petit d’élèves affamés. Nous pouvions voir en même temps que les élèves arrivaient, les groupes pour les jeux se formaient.
Le repas passa plus rapidement que je l’aurais pensé, nous essayions pendant tout le long de ce repas, de deviner quelles équipes nouvellement formées pourraient nous donner du fil à retordre. Depuis notre table, j’avais une vue sur l’extérieur, la cime des arbres de cette forêt au milieu du champ qui faisait face à l’arrière du collège. Très vite, nous avions fini notre plateau et nous préparions à partir. Nous nous levions pour aller vers le côté gauche de l’ouverture de l’escalier, là se trouvait de ces meubles de cantines où les élèves vidaient leur plateau.
Nous passions alors par ce passage, mettant nos couverts dans des bacs attribués à chacun, notre assiette sur un plateau ainsi que notre verre. Les restes de nourriture allait dans un conduit et les plastiques dans un autre conduit. De temps à autre, les plateaux portant assiette et couverts descendaient dans le meuble, pour aller vers l’étage inférieur à cette salle, là où des agents de cantine nettoyaient les couverts et assiettes. Les détritus quant à eux, tombaient vers un bac par un conduit légèrement décalé pour que les aliments ne puissent éclabousser les alentours en atterrissant.
Les élèves ayant débarrassé leur plateau passaient par le couloir qui nous mena dans cette salle, descendant par la gauche du couloir. Nous prîmes ce chemin et sortîmes du hall. Quand nous arrivâmes, quelque chose nous intriqua : à la gauche de l’estrade où notre principal annonça que les Jeux Pindrique auraient lieu cette année, se dressait maintenant une table où n’était posé aucun objet. Nous ne nous posions pas plus de question et allions dans la cours toujours en discutant, en voguant tel un bateau dans une mer tranquille.
Le temps augmentait petit à petit, tandis que le réfectoire faisait l’inverse et se vidant de ses occupants, tout en remplissant de nouveau la cours. Le réfectoire fermait alors ses portes et tous les élèves se trouvaient dans la cours. Le principal, en compagnie de son frère, était monté sur l’estrade et tenait encore un micro :
Chers élèves, le temps des discussions est terminé et je déclare ouvertes les inscriptions !

Dans la peau d'une légende, Tome 1 : AlbinosOù les histoires vivent. Découvrez maintenant