Chapitre 14 - De si beaux souvenirs

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Ses jambes la portaient à grandes enjambées, le vent emmêlait ses cheveux, les branches d'arbres lui fouettaient le corps entier, un sourire rayonnant étirait ses lèvres. Elle était haletante de sa course effrénée, mais elle était portée par l'élan, et par le rire de l'enfant qui la poursuivait. Elle portait sa robe blanche, celle de la messe, celle qu'elle avait enfant. Plus les rires du jeune garçon se rapprochaient, plus le sourire de la jeune fille s'agrandissait. Une main finit par l'attraper à l'épaule, elle se retourna essoufflée, les yeux de son ami brillaient de joie. Il n'avait pas changé, le petit Lebrac de son enfance était toujours le même. Ce sourire ravageur, cet air supérieur qui lui donnait tout son charisme, et ses yeux gris qui n'avaient jamais peur.

Un coup violent fit résonner toute sa tête, le dur du bois avait endormi sa joue, elle ouvrit doucement un œil. Au-dessus du corps de son voisin de table, lui aussi endormi, elle reconnut, malgré la fatigue d'un réveil, le regard lourd de M.Tourner. Le maître tapa une nouvelle fois sur le bureau, Papier mâché laissa échapper un grognement de mécontentement. Puis il finit lui aussi par ouvrir les yeux.

Leurs regards, tapissés par un rideau de fatigue, se croisèrent. Pendant une seconde de leur temps, Henry se perdit dans son regard. Il y lisait tant de choses, tant de belles choses. Tout autour lui semblait si banal, mais cette fille avait tout chamboulé. Elle, elle n'avait rien de banal.

Il fut sorti de ses pensées par le cahier qui s'abattît sur sa tête, il pouvait être sûr que M.Tourner se trouvait juste derrière lui. Un sourire moqueur étirait doucement les lèvres de la jeune fille. Elle se redressa sur sa chaise, il la suivit du regard, elle lui fit un léger signe de tête lui disant de se mettre droit. Alors dans un mouvement lent, le garçon se redressa lui aussi. Il ne pouvait ignorer longtemps la présence du professeur à sa droite, alors il finit par le regarder, son visage marqué par un sourire qui se voulait charmeur.

- Oui monsieur ?

- dehors.

La voix de M.Tourner était vide d'un quelconque sentiment de compassion, elle était froide et dure. Henry attrapa d'un mouvement mou son sac et se releva. Il fixa quelques secondes le professeur , la scène était assez amusante, Papier mâché dépassait le maître d'une demi tête, à côté de lui, M.Tourner semblait perdre ses moyens.

- Bonne fin de journée, monsieur.

Henry contourna l'homme, et se dirigea vers la sortie.

Lanterne tenta de se faire oublier en se faisant petite sur sa chaise. M.Tourner la fixait avec exaspération, quand elle croisa son regard, elle se convainquit qu'affronter ses parents était moins pire que d'affronter son maître dans cet état.

- je vais y aller.

Elle se leva et rejoignit elle aussi la porte, avant de sortir elle jeta un coup d'œil à son amie au premier rang ; Octavie fixait devant elle, perdue dans ses pensées. Peut-être que son amie aussi repensait à Laztec, et à ce qui lui était arrivé. Peut-être qu'elle aussi regrettait que cela soit allé aussi loin. Laztec était certes un Velrans, mais il restait un jeune garçon, qui ne méritait pas de souffrir autant.

Lanterne détourna les yeux et s'en alla.

Sur le chemin de leur maison, Henry ne pensa qu'à son rêve, il aurait tant donné pour pouvoir y retourner. Quand il avait fermé les yeux sur son bureau, il avait plongeait dans une vie passée, un souvenir d'une vie qui le brûlait entièrement. Il s'était éveillé dans son lit, dans sa chambre, dans sa maison chez les Velrans. Sa mère avait crier son nom pour l'incité a descendre manger le petit déjeuner. Il l'avait alors rejoint, son sourire si réconfortant, sa voix quand elle fredonnait un rythme de musique, il se sentait chez lui, enfin chez lui. L'odeur du muguet que sa mère aimait tant lui était venu au nez, il avait une grande inspiration pour ne jamais oublier cette odeur. Elle était née le premier jour du cinquième mois de l'année, et chaque année à cette période, il cueillait de cette magnifique fleure pour elle. Elle aimait tant ses moments, ses moments où son fils arrêtait de se battre, et qu'il était avec elle, simplement lui. Une larme avait coulé le long de la joue du garçon. Son cœur avec battu si vite, et à chaque battement il avait l'impression de revivre, de redécouvrir l'amour, cet amour pour une mère que rien ne peut surpasser. Il l'avait pris dans des bras, l'avait serré comme il l'avait toujours fait depuis sa maladie, il l'avait serré dans ses bras avec une telle douceur pour ne pas la blesser. Ses yeux d'un bleu azure étaient éclairés par le soleil de printemps, jamais il n'en avait vu de plus beau. Un bruit fort avait resonné dans la pièce où il se trouvait, un bruit qui l'avait ramené dans l'école, au fond de cette salle, dans un frisson de nostalgie, une nostalgie dangereuse.

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⏰ Dernière mise à jour : Jul 03, 2023 ⏰

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