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Evan Kingsley

Sheyla a utilisé la salle de simulation pour m'entrainer à tirer sur une cible en mouvement, un homme qui pouvait surgir de partout à tout moment au milieu d'une fête bondée et bruyante, et que je devais abattre avant qu'il ne tire sur l'un des invités.

La simulation s'est arrêtée et Sheyla est en train de commenter chacune de mes actions, mais je ne l'écoute pas. Je suis essoufflé, à peine essoufflé, pourtant c'est déjà douloureux. Hier soir j'ai passé à une heure à respirer trop fort, trop vite, sans contrôle, aujourd'hui c'est comme forcer sur un muscle courbaturé.

Je me demande si c'est normal, si la cigarette a fini par abîmer mes poumons plus gravement que je ne l'aurais cru, et ces questions empirent les choses.

Sheyla qui fixait le vide en parlant finit par poser les yeux sur moi.

- Est-ce que ça va ?

- Oui... Il fait juste froid ici.

C'est pour détourner son attention mais pas un mensonge pour autant. J'ai la chair de poule. Sheyla approche et pose une main sur mon bras.

- Il fait bon, c'est toi qui est gelé. Je t'ai entendu sortir sous la pluie hier, tu as peut-être pris froid.

- Entendu sortir ou vu sortir grâce à mon traceur ?

- Vu, admet-elle.

- Il restera à vie ce traceur ? Comment ça fonctionne, est-ce qu'il est dans mon sang ?

- C'est un traceur biologique, il restera dans ton organisme environ un an.

J'ouvre la bouche mais elle m'interrompt tout de suite :

- On voit Louna demain, toutes tes questions, toutes tes plaintes, garde-les pour elle.

- Qu'est-ce qu'elle a dit quand tu lui as dit que je voulais la voir ?

Ça m'interroge qu'elle n'est jamais cherchée d'elle-même à nous voir. Je me demande si elle nous évite et pourquoi.

- Je n'ai pas pu m'adresser à elle directement, elle est haut placée ici tu sais...

- Alors on aura peu de temps avec elle j'imagine ?

- J'imagine aussi.

Sheyla pose le dos de sa main contre mon front, tout doucement, pourtant je recule brusquement. Peut-être justement pour ça, parce que c'est trop doux, j'ai l'impression d'être traité comme si j'étais fragile, faible.

Elle ne commente pas ma réaction, mais empire mon malaise en conseillant :

- Repose-toi aujourd'hui, j'ai l'impression que tu vas être malade.

La rencontre avec Louna tombe au bon au moment, j'ai plus que jamais besoin de savoir comment elle fait, pour continuer ses plans, pour rester aussi droite et déterminée, pour inspirer autant de respect, parce que même si elle ne l'apprécie pas, c'est ce que je ressens quand Sheyla parle d'elle.

Moi je n'inspire plus que de la pitié.

J'ai besoin de prouver et de me prouver que je suis encore efficace, alors à peine sortit de la salle de simulation, je trouve Caleb pour lui réclamer de m'y emmener m'entraîner, mais il refuse en me disant que j'ai déjà l'air épuisé.

- Ton pouvoir a failli revenir hier, commente Jaden qui nous écoutait en silence.

Il est assis sur le petit canapé de la cuisine, occupé à mettre un pansement sur sa main. Il a encore une morsure, à un endroit un peu différent. Je serre les dents en imaginant tout le monde ici ressentir la même chose en voyant mes cernes que ce que je ressens en voyant la façon dont il se blesse tout seul pour supporter son cauchemar.

ERASED - L'aprèsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant