9 - Partir

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     Aujourd'hui était le bon jour. Ralph s'était résigné à laisser passer quelques jours supplémentaires après son dernier voyage. Il n'était pas tout à faire sûr de ce qui se passait dans la tête d'Ejderha, mais son instinct le poussait à être de plus en plus prudent.

     Ce jour-là, il se leva très tôt. C'est à peine s'il voyait les premiers rayons de soleil apparaitre à l'horizon. Le vampire ouvrit le plus silencieusement la porte de sa chambre, pour se retrouver dans le couloir aussi froid que désert. Parfait. Durant tout son trajet, il ne croisa pas âme qui vive, mais il entendait le bruit de respiration des humains endormis avec lesquels il cohabitait. Ce qu'il craignait le plus, c'était qu'Ejderha ne surgisse à un tournant de couloir, pour lui demander ce qu'il faisait dehors aussi tôt le matin.

     Ralph s'était préparé à multiples questions, mais il savait d'avance qu'elles ne seraient jamais convaincantes si jamais il croisait le Suprême en allant voler une machine pour retourner chez lui.

     Plus Ralph se récitait cette phrase dans sa tête, moins elle avait de sens. Mais il savait parfaitement ce qu'il devait faire. Le vampire ouvrit silencieusement la porte de l'infirmerie. Elle était déserte, et Ralph ne se priva pas d'ingurgiter quelques litres de sang. Honnêtement, il ne savait pas pour combien de temps il partait, il ignorait même s'il arriverait à destination indemne. Le vampire jeta négligemment les poches de sang vide dans la poubelle de l'infirmerie avant d'en ressortir.

     Le reste du trajet, il se dépêcha pour se retrouver dans la salle des machines. Il n'y avait personne, et la seule sécurité bancale qu'il y avait était un code qu'Ejderha avait finit par lui donner, depuis qu'il avait commencé à voyager tout seul. Sans grande surprise, le code marcha et la porte se referma derrière lui.

     Il se tenait à présent devant les machines. L'un des emplacements étaient encore vide, et il attrapa la machine juste à côté. Le vampire marcha d'un pas convaincu sur les socles. Le vampire monta dessus, régla la machine pour aller là où il le souhaitait. Il prit un instant de réflexion, le regard fixé sur la porte, comme s'il avait peur qu'une personne ne rentre dans la pièce au même moment.

     Ralph appuya sur la machine et un éclair blanc aveuglant le força à fermer les yeux.

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- 1850, quelque part dans un des multiples univers qui régissent l'espace-temps -

     Lorsqu'il revint à lui et que la lumière fut de nouveau supportable, il se rendit compte que son corps basculait en arrière. Avant qu'il ne puisse réagir, sa tête heurta violemment le mur qui se trouvait derrière lui, très proche, et il glissa par terre. Ralph se rendit compte qu'il était totalement nu, et qu'un jet d'eau chaude lui arrivait dessus, inondant ses cheveux. Son regard se porta ensuite sur sa main gauche. Elle tenait encore la machine, ses doigts étaient crispés dessus et il ne se rendit compte de la vive douleur de brûlure que lorsqu'il s'aperçut de la fumée qui s'en échappait.

     Dans un mouvement brusque, Ralph jeta la machine qui atterri quelque part là où il se trouvait et il passa sa main sous le jet d'eau, en tourna le robinet le plus à droite possible pour que l'eau froide arrive plus rapidement. Il poussa un petit râle de soulagement lorsque l'eau apaisa la sensation de brûlure. Enfin, il finit par lever la tête.

     Il se tenait assis dans une baignoire, elle-même située dans une petite salle de bain. Il ne voyait pas grand chose de la pièce car le rideau de douche était tiré, et ce fut avec une main tremblante qu'il le poussa doucement. Immédiatement, son regard fut attiré sur les trois lavabos alignés contre le mur.

     Ralph se figea.

     Il y avait trois brosses à cheveux sur le petit meuble. Il y avait trois brosses à dents dans le petit verre. Il y avait trois peignoirs suspendus à un crochet sur un mur. Il y avait trois serviettes de bain. Le vampire reconnu immédiatement la sienne.

     Lentement, comme pour être sûr que ce ne soit pas un rêve, il sortit de la baignoire, posant un pied après l'autre sur le tapis moelleux qui sécha ses pieds mouillés. Il attrapa sa serviette et s'enroula dedans, humant l'odeur. C'était la sienne et il le savait, mais cela faisait des siècles (à proprement parler) qu'il n'avait pas sentit cette odeur de lessive. Cela faisait des siècles qu'elle n'existait plus, aussi.

     Après un instant d'hésitation, il se tourna pour faire face au miroir et il se regarda. Il regarda son reflet et il sut qu'il avait réussi. Il avait réussi à voyager dans le temps, à revenir à une époque qui n'était plus mais qui était la sienne, et il n'y avait pas deux Ralph. Il n'y en avait qu'un, et c'était lui. C'était son corps d'avant, même si les vampires ne changeait pas physiquement, Ralph pouvait voir que le corps dans lequel il était était le sien d'il y a quelques siècles. Il porta sa main à son visage pour être sûr de ne pas rêver. Il se pinça même la joue avant de se rendre compte à l'évidence ; il était dans sa maison. Il était dans leur maison.

     Le regard du vampire tomba sur le petit meuble de salle de bain, qui comprenait trois compartiments. Le sien était facilement repérable ; ses vêtements étaient en boule dedans tandis que les vêtements des deux autres étaient soigneusement pliés. Ralph les attrapa et s'habilla avec. Il les trouva rapidement confortables.

     Alors qu'il était en train de passer une main dans ses cheveux encore humide, il entendit la porte d'entrée s'ouvrir. Il se redressa brusquement, se tirant de sa contemplation. Son corps entier se tendit et il avança d'un pas tremblant vers la porte de la salle de bain. Il commençait à entendre des voix, leurs voix, mais cela lui semblait si irréel.

     Avec trop d'hésitation, il ouvrit la porte de la salle de bain et il avança d'un pas dans le couloir.

« Ralph, si t'as fini ta douche, tu pourrais venir nous aider ?! hurla une voix depuis le rez-de-chaussée.

     Le vampire se raidit encore plus que cela n'était possible. La phrase fut suivit d'un rire assez léger. Le corps de Ralph mit quelques instants à réagir, avant que ses pieds ne trainent son corps dans les escaliers.

Plus il se rapprochait, plus il commençait à entendre des bruits familiers qu'il n'avait pas entendu depuis longtemps. Et enfin, il arriva en bas des escaliers.

— Ralph, t'as oublié comment marcher ?

     Le vampire ouvrit et referma la bouche sans réussir à ce qu'un seul son n'en sorte. Pourquoi est-ce qu'il n'arrivait pas à dire quelque chose, n'importe quoi ?

     Les bruits de pas se rapprochèrent.

— Ralph, tout va bien ? fit une voix douce. »

     Le vampire réussit à relever la tête. Lewis était devant lui. Suivit d'Alec.

     L'instant d'après, il s'effondrait par terre, sans force.

Le Sacre du Vampire, T3 [MxM]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant