Chapitre 2 - Hugo

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Lorsque j'ouvre les yeux, je ne sais pas combien de temps j'ai dormi. L'intensité de la lumière filtrant dans la chambre est plus importante que celle de mon arrivée. Je prends mon téléphone posé sur la table de nuit pour m'enquérir de l'heure, mais il n'a plus de batterie. La tête encore enfarinée, je me traîne jusqu'à ma valise posée à côté de la porte pour en sortir mon chargeur. Je suppose que Stéphanie ou Emma ont dû la déposer ici hier soir après que je me suis endormi. Je n'ai même pas attendu qu'ils aient déchargé la voiture pour venir me reposer.

De toute manière, si je l'avais fait, il y aurait eu quelqu'un pour m'apporter mon bagage dans ma chambre. Comme tout le monde veille à mon bien-être et à mon confort, je ne l'aurais pas porté jusqu'ici. C'est ainsi depuis toujours. J'ai eu la chance de grandir dans une famille riche, avec des domestiques présents pour chacun de mes besoins. Et pourtant, je me suis toujours senti assez seul. Mes parents étaient souvent occupés ailleurs, alors ils payaient les gens pour rester avec moi. Avec mon entrée dans le monde du mannequinat, dans l'agence florissante de mon père, j'ai continué d'être traité comme un prince.

À bientôt trente–cinq ans, je n'ai jamais eu à m'occuper de quoi que ce soit. J'aimerais bien que cela change, et je sais qu'il n'appartient qu'à moi d'en faire plus. Seulement, je n'ai pas encore sauté le pas. La prise de conscience est récente. Constatser qu'une fois chez moi, je suis complètement seul ne m'avait jamais pesé jusqu'à maintenant, mais... mince... est-ce-que j'ai vraiment envie de n'avoir personne avec qui partager mes succès mais aussi mes peines et mes douleurs.

Seulement, l'accumulation des derniers contrats m'a plongé dans un état de fatigue important, et je préfère continuer de me reposer sur les autres le temps de récupérer un peu d'énergie avant de m'entourer mieux. Est-ce mon métier qui veut ça ? Ma famille ? Mon comportement ? Pourtant je ne pense pas être quelqu'un de dur à vivre. Je me laisse balader aux quatre coins de la planète sans rien dire, sauf peut-être cette fois. Je n'ai personne avec qui évoquer cette lassitude d'être constament en voyage, personne auprès de qui m'épencher sur cette solitude qui me pèse deplus en plus au quotidien. Mais j'ai appris à me méfier de tout le monde, et à part les profiteurs que je tiens soigneusement à l'écart de mon univers privé, je n'ai personne.

Une fois mon téléphone branché, je me dirige vers la porte où doit se trouver la salle de bain si je me souviens des explications de notre hôte, cette nuit.

La pièce est spacieuse et chaleureuse. Le bois qui recouvre les murs donne l'impression de débarquer au milieu des chalets alpins au milieu des pistes de ski. Une grande douche cabine est installée dans un coin, à côté de la fenêtre au vitrage opaque. Sur le mur opposé, il y a un meuble étagère où sont entreposées plusieurs serviettes, un gant de toilette et une jolie panière avec des échantillons de produits de douche.

Plutôt habitué aux établissements luxueux, je trouve cette simplicité étonnante, mais elle me fait du bien. Dans une région si reculé du monde, j'aimerais découvrir la culture d'ici et les habitants. Même si je doute d'avoir du temps pour ça. Mon planning va être surchargé, comme d'habitude...

Après avoir réglé le jet sur une température plutôt fraîche, je me glisse dessous. L'eau coule le long de mon épiderme pour enlever la fatigue. Elle me donne le coup de fouet nécessaire à mon réveil afin de commencer la journée sur de bonnes bases.

Enfin prêt, j'ouvre les volets de ma chambre et mon souffle se coupe. Je ne m'imaginais pas qu'une telle vue existait. En contre-bas, un lac s'étend jusqu'au pied d'une chaîne de montagnes plus loin. Des îlots boisés créent des tâches vertes venant rythmer la surface de l'eau paisible.

Un peu plus loin, j'observe un hydravion se poser à la surface et s'avancer près d'un ponton. J'ouvre la fenêtre et prends une grande inspiration d'air pur. Les odeurs de forêt et d'humidité me parviennent, et les doux rayons d'un soleil haut dans le ciel viennent caresser ma peau. La sensation est incroyable. Entre ici et Paris, le contraste est totalement saisissant. La nature remplace les immeubles et la pollution à disparu de l'air. Quel bonheur.

A l'aube de la nuit.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant