CHAPITRE 1

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ATMOSPHÈRE: « Fourth of July, Sufjan Stevens"

Stade 4.

— PARDON ?! hurle de surprise ma mère.

Et voilà, la sentence venait d'être prononcée. J'étais atteinte de bipolarité de stade 4. En résumé, le plus agressif, et en conclusion, aux yeux de ma mère, je n'étais désormais qu'un poids de plus à porter. Ses épaules devenaient fragiles, et moi, je me sentais bien trop lourde. Ce foutu cordon aurait peut-être dû me tuer finalement.

— C'est impossible ! s'écria-t 'elle, la voix tremblante.

Je sursaute à sa dernière phrase. Tellement de rage et de tristesse émanent de celle-ci. J'aimerais être une petite souris et me faufiler sous la porte du cabinet pour disparaitre à jamais. Alors que je m'enfonce un peu plus dans mon fauteuil, elle se redresse à vive allure. La veine de son cou est gonflée, elle palpite.

Je l'avais déçue, encore une fois.

Je ne pris pas la peine d'écouter le charabia du psychiatre se trouvant en face de nous, me replongeant aussitôt dans mes pensées. Plus je grandissais et plus j'avais l'impression que ma mère regrettait son choix. Elle désirait une petite fille, tout ce qui a de plus banal, et elle avait donné naissance à cette chose, à moi.

J'en venais à me demander si mon vrai père ne serait pas le diable en personne finalement. Je ne me souviens que vaguement de mes premières années de vie.

Je pense que tout devait être normal, jusqu'à ce soir-là. Jusqu'à ce que je souffle mes cinq bougies d'anniversaire.

Les années qui suivirent, j'ai commencé à entendre des voix dans ma tête. Avec le temps, elles devenaient de plus en plus présentes, de plus en plus fortes.

Á tel point que j'en étais presque à vouloir m'arracher la tête afin d'avoir un moment de calme. Le calme, le silence. C'est, je pense, ce qui me manquait le plus à cette époque-là.

Mes nuits étaient devenues ma pire crainte. Tandis que les cernes creusaient mon visage de plus en plus, ma peau disparaissait peu à peu, ne laissant place qu'à de petits os repoussants.

Pendant que les autres enfants jouaient dans la cour de récréation, moi, je m'enfermais dans les toilettes afin d'éviter les moqueries incessantes sur mon corps fragile.

Les cauchemars étaient devenus ma routine et les crises de paniques incessantes m'empêchaient de dormir, réveillant ma mère, lui enlevant son sommeil à elle aussi. Mes terreurs nocturnes contrôlaient mon corps un peu plus chaque nuit, m'enlevant tout libre arbitre sur ce dernier. Je ne pouvais pas bouger, je ne pouvais émettre aucun son alors que mon souffle, lui, s'accélérait chaque fois un peu plus. Je me voyais mourir avec cette impression que la mort était là, attendant sagement à mon chevet. Quelque chose que je ne saurais décrire prenait peu à peu ma place et j'étais incapable de l'en empêcher.

Depuis ma naissance, le sentiment d'étouffer, d'avoir le souffle court, avec l'impression qu'il pourrait être le dernier, m'était familier.

Malgré cela, il m'était difficile de ne pas en avoir peur. J'avais peur sans cesse ; peur de mourir, peur de perdre le contrôle.

Un soir d'automne, alors que je me décontractais dans le bain après une journée qui fut une nouvelle fois difficile, maman était partie mettre à pendre ma serviette de bain.

Elle avait pour habitude de la déposer sur le radiateur du couloir le temps que je me lave pour ensuite venir m'envelopper dedans. C'était notre petit rituel qui évitait que je n'aie trop froid en sortant de l'eau.

LA VERITÉ MENT TOME1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant