CHAPITRE 47

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ATMOSPHÈRE : « Don't forget about me, Cloves »

La pluie tombait en fines gouttes, le ciel créant un voile gris, comme si lui-même pleurait. Riley tenant ma main, je regardai ce trou béant finissant d'être creusé. Enzo ne pouvait pas être enterré près des siens, non. L'institut avait décidé de son sort encore une fois en le mettant dans le cimetière des déshonorés.

Sébastian arriva à son tour, vêtu de son plus beau costard. Certainement l'un de ceux qu'Enzo adorait lui acheter. Il ne cessait de répéter que même un vieillard se devait d'être bien habillé. Il approcha, me prenant dans ses bras. Je l'encerclai à mon tour, laissant mes larmes couler. Nous avions passé une année entière tous les trois, une année de souvenirs passée à se haïr puis à s'aimer. Si d'autres avaient opté pour des condoléances, nous nous étions contentés de rester silencieux. La moitié du clan des Shadows nous avait rejoints. Ses plus fidèles amis et combattants.

Je me souvenais de nos discussions tard dans la nuit, quand il m'expliquait qu'ils formaient une vraie famille tous ensemble. Je me souvenais de nos rêves et nos peurs partagés. Maintenant, tout cela semblait si lointain, comme des étoiles éteintes dans le ciel sans espoir.

Sébastian se recula doucement, avant de s'approcher du cercueil. Il avait beaucoup de connaissances et, pour l'occasion, il avait trouvé un prêtre.

Enzo n'était pas croyant, mais je trouvais qu'il méritait au moins ça, qu'il méritait le paradis malgré tout ce qu'il avait bien pu faire.

— Si tout le monde est là, nous pouvons commencer.

Et la pluie s'intensifie, mêlant mes larmes à celles du ciel.

Je pris une longue inspiration, faisant quelques pas avant de laisser tomber une rose blanche sur son cercueil.

— Le champ de bataille est mon temple, la pointe de la lame est mon prêtre, la danse de la mort est ma prière et le coup fatal est ma délivrance. Ce soir je pars, vers un pays plus radieux. Le paradis m'attend, ici ou ailleurs, pour un monde meilleur.

Les mots du prêtre flottent dans l'air, presque inaudible.

Il referma son livre, m'adressant un regard. Riley m'avait dit de dire quelques mots, mais comment savoir quoi dire pour exprimer mes maux ? Alors, hésitante, je fis un pas en avant pour me diriger vers lui, mais je m'arrêta ne pouvant pas retenir un sanglot. Et, comme une lueurs d'espoir a travers les ténèbres, deux mains se posèrent sur mes épaules. Jen, Jen était là.

Mes pleurs exprimaient toute la souffrance et le vide que je ressentais. Ils résonnaient à travers le bois sombre et silencieux. J'étais seule, encore une fois. Je venais de perdre la seule famille qu'il me restait. James avait tiré cette balle, il me l'avait arraché.

Ce soir-là, lorsque je m'étais retournée vers lui, je l'avais insulté de tous les noms. Je lui en voulais de ne pas m'avoir cherchée même s'il s'évertuait à me dire le contraire. Il trouvait toujours une excuse, généralement, elle portait le nom d'Alaric. Seulement, cette fois, je n'avais pas accepté ses excuses, je ne lui avais pas accordé mon pardon.

J'avais pleuré sa mort pendant des mois entiers alors que lui continuait sa vie comme si rien ne s'était jamais passé.

— Ça va aller, ça ira avec le temps, chuchota Jen.

C'était faux, rien n'allait en vérité. Je voulais sentir son odeur, je voulais sentir sa présence. J'avais l'impression que mon cœur était en train de geler, que mon âme était partie avec son dernier souffle il y a deux jours. J'avais l'impression de mourir, moi aussi.

Quand j'avais voulu partir, Alaric avait essayé de me retenir, mais lorsque je lui ai mis la vérité sous les yeux, quand je lui ai dit que j'étais au courant de tout, c'est comme si le sol sous ses pieds venait de s'effondrer. J'avais vu son visage pâlir au fur et à mesure que je parlais. La vérité faisait mal, j'étais bien placée pour le savoir.

Il n'avait pas nié et, de toute évidence, il ne le pouvait pas. Il s'était contenté de partir, me disant que nous aurions une discutions. Discussions que j'évitais depuis deux jours déjà. Mon propre père détenait une petite fille depuis tout ce temps. Une petite fille innocente qui n'avait rien demandé.

Je regardai la lune éclairer le bois. Elle me faisait repenser à ma chambre au sous-sol. Je détestais cette chambre, mais mes nuits étaient plus douces lorsqu'il se joignait à moi. Parfois, nous parlions à cœur ouvert, d'autre fois, nous nous contentions de regarder les étoiles nous endormant tous les deux dans le silence. Le silence, il n'avait jamais été pesant à ses côtés, mais maintenant, je ne savais pas si je saurais le supporté, alors qu'il n'était plus là.

— Je la retrouverais Enzo, je te le promets, murmurai-je.

— On la retrouvera, me fit Jen en me rejoignant.

Je tournai la tête vers elle, prenant la main qu'elle me tendait. Je ne m'attendais pas à ce qu'elles soient là, mais je les avais sous-estimées.

Le lendemain du drame, lorsqu'elles m'avaient aperçue assise à notre ancienne table, elles étaient restées figées.

Alors que je pensais qu'elles aussi, avaient décidé de m'abandonner, la vraie histoire qui se cachait derrière toute cette comédie était bien plus horrible. Alaric, encore une fois, avait tout organisé.

Après qu'elles s'être excusées à plusieurs reprises, elles m'avaient enfin expliqué ce qu'il s'était réellement passé.

Après l'explosion, l'institut avait subi de nombreuses pertes. Mais Lou avait pu s'en tirer, grâce à moi. En réalité, lorsque je l'avais enfermée dans sa chambre, je l'avais sauvée. Elle était sortie par la fenêtre, voulant me rejoindre et m'aider, ce qui l'avait sauvée de l'explosion. Jen quant à elle était déjà partie depuis longtemps. Quand Trasher lui avait hurlé de sortir de ma chambre, elle avait préparé un sac et s'était enfuie de l'institut. Sa trahison l'avait sauvée en quelque sorte, elle aussi. Quant à Trasher et James, je ne savais toujours pas comment ils avaient survécu, mais je comptais bien avoir des réponses. Ils avaient reconstruit une petite partie de l'institut, juste assez pour pouvoir héberger les derniers survivant et depuis plus d'un an, ils essayaient tous de se relever de cette attaque.

Jen m'avait dit que deux mois après ma disparition, James leur avait dit que j'étais morte. Croyant à ses paroles mensongères, elles avaient arrêté les recherches.

De ce qu'elles m'avaient dit, un soir, il était rentré de patrouille et après avoir été faire son compte rendu à Alaric, il était ressorti plusieurs heures après, plutôt amoché et il leur avait annoncé mon décès. Il leur avait dit que j'étais morte dans cet accident de voiture, celui que j'avais orchestré. Or, si Sébastian avait pu comprendre de lui-même, James aussi l'avait compris. Il savait depuis le début que je n'étais pas morte, pourtant, il ne m'avait pas cherchée.

Quelques mois plus tard, Alaric leur avait dit qu'il avait retrouvé mon corps et, avec tout le culot qu'il possédait, il avait même organisé de fausses funérailles. Elles n'avaient aucune preuves de ce qu'il avançait, mais elles ne me voyaient pas revenir non plus alors, avec le temps, elles s'étaient faites à l'idée que mon père racontait peut-être la vérité.

Elles, je les comprenais. James en revanche, jamais je ne le pardonnerais de m'avoir laissée comme si je n'étais rien.

Quant à Trasher, Jen m'avait dit qu'après mon enterrement, lui et Konor étaient tout simplement partis sans jamais revenir. D'ailleurs, il n'était pas revenu non plus depuis cette soirée au Vortex. Il m'avait dit qu'il lui restait des choses à régler, pourtant, au fond de moi je sentais que je ne le reverrais pas d'aussi tôt.

— Si vous êtes prête, nous pouvons y aller.

Je me tournai vers le prêtre, hochant la tête. C'était le moment, le moment de lui dire au revoir une bonne fois pour toutes. Sébastian approcha, prenant les cordes dans ses deux mains.

Alors qu'ils soulevèrent le cercueil, le faisant glisser doucement dans la terre, je relevai les yeux vers les étoiles.

— Pour toujours et à jamais. Murmurais-je.

LA VERITÉ MENT TOME1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant