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- Ciele ! Ici ! Insiste mon père plus fortement.

Je m’approche sans le quitter des yeux.

  - Tu te doutes de ta punition, tu changes de chambre à partir de maintenant, tu vas retourner voir le psychologue de famille, retourner au lycée privé pour garçon, et va me chercher le fouet. Pose-t-il calmement sans crier, sans état d’âme.

Je m’exécute, je vais dans son bureau, un endroit qui me dérange, une pièce sombre et munie d’un grand bureau en bois brute, des trophées de chasse aux murs, des têtes qui proviennent de ses aventures avec mon grand-père, et si j’aime pas forcément mon père, je déteste encore plus cet homme infâme. Mon père est un ange en comparaison à cet homme. Violent, divorcé plusieurs fois, alcoolique, et sans cœur..

Je récupère le fouet, que je souhaite voir brûlé, un jour je le ferai, je me le promets intérieurement.
Je sors de cette pièce, longe le couloir blanc et descend les deux petites marches, mon père m’attend dans le salon, assis sur son fauteuil en cuir marron, les bras posés sur les accoudoirs, un air résigné et dur sur le visage.

Je le déteste.

Je m’avance et lui donne le fouet, j’enlève ma veste, ma chemise grise, je me tourne dos à lui.

  - Combien tu penses ça te suffira pour comprendre la honte que j’ai ressentie ?'' insiste-t-il sur le mot honte.

  - Autant que ça te soulagera.'' dis-je difficilement toujours la gorge nouée.

Le premier coup fait mal, je ne m’attendais pas à ce qu'il commence maintenant. Le deuxième coup me paraît moins violent, sa pique un peu mais j’attends. Au bout de quinze coups, je sens plus mon dos. J’ai l’impression que du liquide coule, mes yeux se brume légèrement d’eau, mais je ne lâche pas. Je ne pleurerais pas.
Il s’arrête un instant, me demande d’aller chercher de l’eau dans la cuisine, où je trouve notre gouvernante se tenir la bouche de ses deux mains, les joues mouillées, qui me regarde passer avec pitié.
Je récupère l’eau dans le frigidaire, je fais demi-tour et souris à Miranda qui pleure en silence. Elle pleure pour moi, je lui pose une main sur son épaule, elle est bien plus petite que moi, et embrasse le haut de son crâne.
Nouveau décor. Ça fait longtemps qu’il ne l’avait pas sorti.

Un grand miroir installé là où j’étais auparavant, il va faire ce que je déteste le plus.
Je m’installe sur le fauteuil jaunâtre, un vieux fauteuil qui était autrefois utilisé par mon grand-père, fermant les yeux lorsque mon dos touche le cuir abîmé, c’est froid, ça fait mal, mais je ne le montre pas.

  - Ciele, qui es-tu ?'' me dit mon père d’un ton calme.

  - Iel.'' Je réponds calmement, posément.

Un coup de fouet sur la main, il repose la même question, une bonne dizaine de fois, s’arrêtant pour ne pas abîmer ce que mes doigts peuvent produire, ça le dérangerait sûrement de me casser. Je sens plus mes doigts de la main droite, mais je ne dis rien, je suis iel, je suis personne d’autre.
Le spectacle continue encore je pense une heure est passé, alternant entre questions et coups, moins fort lorsqu’il s’agit de mes mains, la fatigue tombe, je souhaite dormir et que ça s’arrête.
 
- Dit ce que tu vois.

  - Des cheveux blonds mi-longs, des yeux verts, une bouche pulpeuse, un torse rouge et svelte, deux mains plus rouges que le torse.'' énumérant ce que le miroir reflète, mais ce n’est pas moi.

  - Et qui es-tu ?'' dit-il à  perdre patience et claquant le fouet sur mon torse tapant mon téton en même temps, qui le fait saigner.

- Ciele, papa. Un garçon.'' avalant ma fierté, il a gagné, et ça me rend dingue.

Il pose enfin son fouet, s’avance et me prend dans ses bras, le toucher de ses habits contre mon corps écarlate me lance, ça pique, ça fait mal.
 
- Ciele mon garçon, ça ne m'amuse pas, un jour on te soignera. Dit-il triste, la voix remplie de peine. Ton cerveau est juste défaillant.

Je me lève après avoir eu l’autorisation. Je monte à l’étage difficilement, Miranda me suit, toujours en pleurant silencieusement.

- Ciele mon dieu, mais quelle horreur. C’est de pire en pire chaque fois. Dit-elle me regardant les yeux pleins de larmes qui ne s'arrêtent pas. Je vais vous soigner, si ça vous dérange pas de me laisser faire, je ferais attention à ne pas vous faire mal.

On pourrait croire que Miranda ne m’aide pas, qu’elle est spectatrice de tout ça, mais je ne veux en aucun cas qu’elle soit renvoyée, c’est ma seule amie dans cette maison, je ne veux pas qu’elle ai de problème suite à ce qui se passe ici. Mes parents sont influents, lors des contrats d’embauche, une clause de confidentialité à était signé, mes parents ont de l’argent, donc ce sont eux qui gagnent, les autres qui perdent.

C’est comme ça, ce n’est pas autrement, pour l’avoir vu de mes yeux, et mettre fait punir de m’être plaint, j’ai compris la leçon. Cette fois il n'y a pas été en douceur, du moins, moins doux qu’auparavant, les soins de Miranda font atrocement mal, mais elle est obligée de le faire, j’aime pas qu’elle s’en occupe, elle est aussi une mère de famille, qu’elle finisse par toujours être là personne qui soigne les blessures causées par les autres, ça fait mal, physiquement, à l’intérieur, mais je ne dirais rien, je ne vais pas non plus la faire culpabiliser en plus. Cette femme supporte bien assez chez nous, je ne vais pas lui en rajouter.

J’aurai presque envie de me faire pardonner de ne pas être comme tout le monde quand on en arrive là, mais je ne le ferai pas.
Elle m’accompagne dans la chambre où mon père à créer pour les punitions, depuis qu’on est sorti de la salle de bain, elle souffle, elle non plus n’aime pas cette chambre, elle comprend ce que ça représente pour moi, ce bout de femme, c’est vraiment la seule personne qui sait sans me parler ou que je le fasse, être à l’écoute de ce que je cache.
Elle me donne un biscuit et j’entre en soufflant et gonfle mes poumons d’air en fermant les yeux et entre dans cette pièce.

-suite-

Ciele Où les histoires vivent. Découvrez maintenant