Prologue

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Il était toujours là, mais je ne le voyais pas vraiment. Il n'était qu'un simple décor auquel je ne prêtais aucune attention. Un personnage secondaire dans ma vie d'avant, dans mon quotidien normal, dénué de magie et d'ombres.

Il attendait patiemment, tapi dans l'ombre. Sa tâche était simple. Il devait me récupérer, me prendre mon dernier souffle. Celui qui libère l'âme.

Dès lors, il est devenu le personnage principal de cette pièce dont j'étais l'héroïne sans avoir aucun pouvoir. Je ne maîtrisais plus rien, je devais juste accepter. Accepter, que dès ce moment-là, lui seul pouvait décider de me sauver.

Maintenant qu'il l'avait fait, il était parti en m'abandonnant ici, à un pas de l'oubli.

Je sèche mes larmes et un souffle m'échappe. L'angoisse me tord l'estomac. Cette pièce est sinistre, glauque et froide. Elle a une odeur de fin, d'irréversible.

Un bruit provenant d'en face attire mon attention ; le mur en pierre s'ouvre en deux et un homme à l'allure étrange y pénètre. Je ne distingue pas ses traits et pas uniquement à cause des larmes qui me rendent aveugle, non. Cet homme me paraît abstrait, il a un quelque chose de fantomatique ou plutôt, de démoniaque.

—Êtes-vous prête ? 

Sa voix me glace le sang, c'est un son qui n'a rien d'humain. Elle pénètre chacun de mes os et me hérisse les poils.

Je secoue la tête frénétiquement.

— Non, réponds-je dans un murmure à peine audible.

—C'est le prix à payer, ajoute-t-il.

—Ne me prenez pas ça, le supplié-je, la gorge serrée.

Il s'approche de moi et, à chaque pas qu'il fait, je recule. La tension est palpable, je suis effrayée alors que lui ne semble rien ressentir. Il n'a l'air ni de se réjouir de ce qui se joue ici ni de s'en désoler.

Mon dos bute contre le mur glacé, me faisant sursauter. L'homme s'arrête à quelques centimètres de moi. Ses yeux accentuent ma terreur tant ils semblent vides de toute âme. Ses bras se lèvent et ses longs doigts, presque difformes, se rapprochent de mon visage. Je ferme les yeux et hurle son nom dans ma tête, dans l'espoir qu'il apparaisse, qu'il me sauve comme il l'a toujours fait. Une fois, deux fois, trois fois. Je le supplie, le prie de venir à mon secours. Mais il ne viendra pas, pas cette fois.

Une douleur cuisante me saisit lorsque les doigts de la créature s'enfoncent dans mon crâne. Ses ongles lacèrent mon cerveau et, en un flash, il me prend tout, mes souvenirs, mais surtout lui. Il me le prend. La seule chose que je voudrais ne pas oublier.

J'aurais encore préféré lui offrir mon dernier souffle. Demain, nous n'existerons plus.

Alors dans une dernière supplique, je l'appelle : Elijah.

Puis le noir. L'oubli.

Dernier souffleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant