8. Qui es-tu ?

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Il s'avance d'un pas mais je recule instinctivement. Est-ce qu'il m'a suivie ? Son corps toujours masqué par la pénombre, il dégage une aura qui, soudainement, me donne un mauvais pressentiment. Après tout, je ne sais rien de lui, si ce n'est qu'il est mon voisin depuis presque trois ans.

— Qu'est-ce que tu fais là ? me demande-t-il sur un ton de reproche, apparaissant enfin sous le clair de lune.

Qu'est-ce que moi je fais là ?  Il est sérieux ? Je rentre juste chez moi, je ne terrorise personne, contrairement à lui.

— Tu m'as suivie ? l'accusé-je.

Il soupire, agacé, et se rapproche de moi. Ses enjambées sont plus grandes que les miennes et, rapidement, il me surplombe, m'obligeant à relever la tête. Ses yeux plissés se rivent aux miens.

— Qui es-tu ?

Sa voix s'est faite plus agressive, me faisant instinctivement reculer. Sa main empoigne mon bras avec une force contenue pour m'empêcher de m'éloigner. Son regard ne me quitte pas et j'ai l'impression qu'il cherche à me sonder, mais je ne comprends pas pour quelles raisons. Ses prunelles se détournent enfin pour glisser jusqu'à mon cou. Je déglutis et tente de le repousser quand la façon dont sa poigne se resserre me fait paniquer.

— Lâche-moi, le grondé-je en essayant de dégager mon bras.

Il fixe plus intensément mon cou, puis son autre main se pose sur mon épaule. Je tente de décrypter ce qui se cache dans son regard lorsqu'il croise à nouveau le mien. Sa colère envahit l'atmosphère, m'empêchant de respirer. Brusquement, sans que je ne m'y attende, ses lèvres percutent les miennes. Mon corps se raidit. Non, mais il n'est pas bien ? Il t'embrasse ? s'exclame ma cheerleader stupéfaite. Ses lèvres restent immobiles et leur froideur m'étonne. Pourtant, je n'arrive pas à me dégager, mes yeux se ferment d'eux-mêmes. Euh... Cha ? À tous les coups c'est un psychopathe ! me rappelle ma conscience. Je reprends mes esprits et le repousse sèchement avant de m'éloigner. Ses yeux se rouvrent, mais trop tard pour éviter la main qui vient s'abattre sur sa joue.

— Merde, murmure-t-il agacé en faisant les cent pas.

Ma gifle ne semble même pas l'avoir ébranlé. Aucun son ne sort de ma bouche, je suis complètement paralysée. Il recule en me toisant du regard, comme s'il me haïssait profondément. Je ne comprends pas ce qui lui a pris ni sa réaction face à moi. Il me tourne soudainement le dos avant de s'éloigner vivement.

— Elijah ? l'appelé-je en amorçant un pas vers lui.

Pourquoi ai-je fait ça ? Il s'arrête et sa voix résonne dans la rue lorsqu'il m'assène sa réponse.

— Je dois y aller.

D'accord... Donc je suis folle ou bien ? Je ne comprends absolument rien à ce qui est en train de se passer.

Je ne prends même pas la peine de lui demander des excuses tandis qu'il quitte la rue, me laissant là. Je suis bien trop sonnée, trop fatiguée, trop étonnée, pour avoir l'envie de me battre. Le mec m'embrasse et se barre comme si c'était la pire chose qui ne lui soit jamais arrivée, non mais sérieusement ! C'est moi qui ai détesté ce baiser, tiens ! D'ailleurs, ce n'en était même pas un... Un smack à la limite, mais on est quoi ? Au collège ? Dans un Drama ?

Je reprends ma route, tout en me jurant de le lui faire payer, lorsque mon corps est projeté en avant. Le choc me coupe le souffle et, dans un réflexe de protection, mes mains amortissent ma chute. Mes dents s'enfoncent dans ma lèvre pour retenir un gémissement de douleur lorsque mes paumes s'écorchent contre le bitume. Je suis choquée, je ne comprends pas ce qu'il se passe. Le cerveau a cette capacité à ne pas rationaliser lorsqu'on est en danger. En tout cas, c'est ainsi que le mien fonctionne. Je suis tombée, mais pourquoi ?

Dernier souffleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant