17. Qui suis-je ?

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Je n'ai pas dormi de la nuit, mon cerveau n'a fait que réfléchir à ma nouvelle identité. Je n'étais déjà presque personne... Du moins, je n'avais aucune racine, mais maintenant, je ne suis même plus Charleen. Au réveil, je me suis dit que je devais agir, qu'il y avait un seul moyen de confirmer la déclaration d'Elijah.

Mon regard se lève sur l'orphelinat et je sonne au portillon pour que Jerry m'ouvre. Lorsque c'est fait, je le repousse et entre dans le petit jardin. Je ne sais pas exactement ce que je ressens à l'instant. Ma poitrine se serre douloureusement. J'appréhende. Je suis impatiente de découvrir la vérité et en même temps effrayée par ce qu'elle pourrait provoquer chez moi. N'être personne, ne pas savoir à quoi ressemblent nos parents, qui ils sont, est parfois plus compliqué que je veux bien l'admettre. On se questionne, se demandant d'où l'on vient. J'ai beau avoir mené ma barque, ne pas connaître mes origines a été un frein, un manque. La seule chose que je savais, c'est que je m'appelais Charleen. C'était déjà ça.

Je traverse l'allée et monte les marches. La porte est déjà ouverte, maintenue par Jerry qui me regarde d'un air étonné. Ce n'est pas dans mes habitudes de débarquer comme ça, sans prévenir. Ce matin, j'ai appelé Malcolm pour demander ma journée. Je lui ai dit que j'avais besoin de voir Lynette, ce qu'il a accepté sans rechigner.

— Que fais-tu là ? Tu es venue il y a moins d'un mois.

— Oui, je... Il faut que je voie Lynette.

Il acquiesce et me laisse entrer.

— Madame doit être dans son bureau, les petits sont en classe.

Je ne sais pas pourquoi jusqu'ici, mais je ne voyais pas d'autre endroit où aller pour trouver des réponses. Les propos d'Elijah m'ont complètement perdue. En venant, j'ai l'espoir que Lynette démente,  qu'elle me dise que je suis bien Charleen, que je n'ai rien à voir avec ce nom qui m'est inconnu.

— Tu veux que je t'accompagne ? me demande Jerry visiblement inquiet.

— Ça ira, le remercié-je avant de me diriger vers le couloir menant aux bureaux.

Une fois devant la porte, mon poing s'abat doucement contre le bois. La voix de Lynette me parvient, m'invitant à entrer. Ma main abaisse la poignée et je la rejoins. Lynette est assise, lunettes au bout du nez, un stylo en main. Elle jette un œil par-dessus ses verres et les ôte dès qu'elle m'aperçoit.

— Charleen, quel plaisir de te voir, se réjouit-elle en se levant de son fauteuil.

Elle contourne son bureau et s'approche de moi pour me prendre dans ses bras.

— Que fais-tu là ?

— Je... J'avais quelques questions à vous poser...

Lynette m'invite à m'asseoir sur son sofa et s'installe à mes côtés.

— Ma question va vous paraître étrange, mais est-ce que je m'appelle vraiment Charleen ?

Je n'ai pas pris de chemins détournés, non. Son regard me fuit et sa main vient replacer les quelques mèches de son brushing. Elle est mal à l'aise et je suis désolée d'en être la cause.

— Tu es arrivée chez nous sans identité, commence-t-elle légèrement hésitante.

Elle se tourne vers moi et ancre ses yeux aux miens.

— On a passé des annonces, on a cherché à retrouver tes parents, mais rien. Tu as été déposée avec ce simple médaillon... On a pensé qu'il appartenait à ta mère mais on n'a jamais rien trouvé, il est dur d'identifier un nom à partir de simples initiales. Au bout de quatre jours, nos recherches ne donnaient toujours rien... Jerry venait d'arriver et il nous a suggéré de t'appeler Charleen.

Dernier souffleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant