Le monde souterrain de l'Enclus

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Le trajet se fit une nouvelle fois en silence, seulement perturbé par les toussotements de mon conducteur.

Durant tout ce temps, mes larmes ne cessèrent pas de couler. Je m'en voulais de ne pas avoir pu aider Benjamin, alors qu'il avait besoin de moi. Il avait beau dire qu'il ne lui ferait pas de mal, j'avais de gros doutes à se sujet. Comment en être sûr ?

Un autre sujet me préoccupait : l'Enclus.

Comment allai-je faire ? Je n'osai pas imaginer toutes les tortures que j'allai subir. Mais je n'avais pas le choix, de toute manière.

La voiture s'arrêta ensuite devant un immense bâtiment, qui semblait bon à être démoli.

- Nous sommes arrivés... annonça mon chauffeur.

C'était ça, l'Enclus ? J'imaginai quelque chose de plus monstrueux. J'arriverai peut-être à survivre, finalement.

- Je vous souhaite bonne chance, me dit-il en regardant dans son rétroviseur pour m'observer.

- Merci, répondis-je en souriant, ce qui le fit rougir.

Je ne comprenais pas d'où venait ma soudaine confiance en moi. Mais j'espérais qu'elle n'allait pas s'envoler.

Je sortis enfin de la voiture, et fit un signe de la main au vieil homme, qui s'en alla. J'attendis de voir la voiture tourner à l'angle de la rue pour sortir mon dessin de la poche arrière de mon pantalon. En cet instant, je ne voyais pas vraiment ce que je pouvais espérer. Survivre ? Et la liberté... Elle était extrêmement loin. Et de toute manière, ce n'était pas un dessin de papillon qui allait m'aider à m'en sortir. Je rassemblai le peu de courage qui me restait - ma soudaine confiance en moi m'avait abandonné - et franchis la porte du vieux bâtiment, qui ressemblait à une herse, prête à s'abattre sur moi.

Je m'avançai à petits pas hésitant dans l'étroit hall d'entrée, dont la moquette décollée et le papier peint couvert de tâches auraient bien besoin d'être changés, pour me diriger à ce qui me semblait être l'accueil. Je pensais que c'était l'accueil car c'était le seul endroit de cette pièce où il y avait de la lumière. Le reste était plongé dans la pénombre, la lumière extérieur n'entrant pas dans cette espace étriqué.

Je m'avançai donc vers l'accueil, où se trouvait une jeune femme, assise sur une chaise de bureau. Elle devait avoir une vingtaine d'années, mais avaient les yeux rouges et semblaient exténué, comme si elle avait fait plusieurs nuits blanches d'affilées. Cela la vieillissait légèrement. Elle avait les cheveux redressé en un chignon lâche, l'air de ne pas trop prêter attention à sa coiffure.

C'est là qu'elle me vit. Elle se redressa sur son siège, et fit semblant de ranger des papiers. Elle fouilla dans un tiroir de son bureau et en sortit des lunettes de vue, qu'elle mit sur sa tête. Je devinai qu'elle essayait de se montrer plus sérieuse. Elle ne devait pas recevoir beaucoup de visiteurs.

- Bonjour ! Me dit-elle d'une voix enjouée, mais quelques peu surjouée.

- Bonjour, répondis-je timidement, m'avançant pour apparaître complètement à la lumière du bureau.

- Que puis-je faire pour vous ?

- Je... Je suis une esclave.

Elle paru étonnée.

- T'es toute seule ? Demanda d'elle en s'affalant sur son siège.

Elle me parut tout d'un coup beaucoup moins sympathique.

- Oui, on m'a déposé ici.

- Déposé ? Répéta t-elle. Tu étais censée venir ici, au moins ?

La Prophétie des deux mondesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant