Nouvelle colocataire

165 18 4
                                    

La femme se redressa précipitamment de son lit. Il faut croire que je l'avais sorti de sa sieste.

- Bonjour, la saluai-je - je craignais que ma colère ne soit encore perceptible dans ma voix.

Elle ne répondit pas à mon salut. Une de plus à m'ignorer... C'était un véritable cauchemar que de se faire rejeter par ses pairs.

- Je ne mords pas, marmonnai-je.

La pauvre femme avait l'air terrifié. Étais-je si terrifiante que ça ?

C'était une femme d'âge assez mure, les cheveux mis longs bruns sertis de quelques mèches grises. Elle avait la tenue que tous les esclaves ont, mais son pantalon était déchiré, de sorte qu'on aurait plus dit un short. Elle avait la chair de poule, ce qui était compréhensible - la chambre était glaciale. Elle était chétive, chaque pore de sa peau que je pouvais voir avait l'air de pouvoir être brisée avec une grande facilité.

Je regrettai aussitôt mes paroles. Sous le coup de la colère, j'avais agressé une pauvre femme qui n'avait rien demandé.

- Pardon, m'excusai-je donc. J'ai eu une journée difficile.

Elle me fit un maigre sourire. C'était déjà un début.

- Comment t'appelles tu ?

Elle ouvrit grand les yeux et fit non de la tête.

- Tu es muette ? Demandai-je, essayant de comprendre.

Elle hocha plus vigoureusement la tête.

C'est là que je fis le lien. Je compris enfin la réaction des esclaves lors de mon arrivée. Si ce que je pensais était exact, June avait ordonné à ce que l'on ne m'adresse pas la parole avant qu'elle me rencontre. Au vu de ce qu'elle m'avait dit, c'était tout à fait probable.

- Ne t'inquiète pas, j'ai déjà parlé à June, l'informai-je.

Je vis sur son visage un peu d'hésitation. June devait vraiment leur faire peur pour qu'ils lui obéissent ainsi.

- J'ai également rencontré cette chère Amber, ajoutai-je. Une demoiselle charmante !

- Je m'appelle Camille, se présenta t-elle après un rire léger. Navrée de ne pas m'être présentée avant, mais comme tu l'as certainement compris, June nous l'avait strictement interdit.

- Ce n'est pas grave, je peux comprendre. C'est vraiment une dictatrice, n'est ce pas ?

- On peut dire ça, oui, rigola t-elle.

- Est ce que tu peux m'en dire un peu plus sur elle ? Demandai-je. Les propos qu'elle a tenu étaient plutôt confus.

- Je n'ai pas le droit, s'excusa t-elle en se mordant la lèvre.

- Et sur Amber non plus ?

- Ce n'est pas interdit, mais si elle apprend que j'ai parlé d'elle, j'ai signé mon arrêt de mort.

- Pourquoi ? M'écriai-je, horrifiée.

- Disons que... disons qu'Amber est une jeune femme assez susceptible.

- J'avais déjà remarqué ça, rigolai-je. Mais je ne vois pas en quoi elle se vexerait si tu me parles d'elle !

- Et bien, hésita t-elle, ce que je connais d'elle n'est pas très glorieux.

- Vraiment ? La lançai-je, curieuse.

- Je risque d'avoir des ennuis, soupira t-elle.

- Je te jure de ne rien dire à personne.

La Prophétie des deux mondesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant