À chaque fois que Joy en parlait à Roy, elle lui disait qu'elle s'en souvenait comme si c'était hier, de ce fameux jour où disparut le monde qu'elle connut. D'ailleurs, Joy lui racontait souvent les récits de ce monde qu'il l'a vu naître, ce monde où elle a grandi, ce monde différent de celui-ci. Elle lui parlait de la vie qu'elle y menait, et à chaque fois avec tant d'enthousiasme, les yeux toujours remplis d'étoiles, qu'il pouvait passer des heures et des heures à l'écouter. Elle lui narrait les nombreux souvenirs qu'elle eut. Si certains étaient de joie, comme la fois où elle tomba raide amoureuse de l'homme de sa vie, d'autres en revanche l'étaient bien moins.Elle lui disait que du jour au lendemain, juste en se réveillant un bon matin, le monde entier entra en guerre. Stupéfaite, elle n'y crut point aux premiers abords. Après tout, le monde dans lequel elle vivait n'avait plus connu de conflits depuis plus de deux décennies. Durant toutes ces années, tout a d'ailleurs été fait pour préserver la paix entre les différentes nations. Et bien que certaines tensions émergeaient de temps à autres, jamais celles-ci furent assez pour déclencher le moindre conflit direct. Alors, comment diable pouvait-elle se faire à l'idée que cet havre de paix qui était sien put, du jour au lendemain, virer au cauchemar ? Elle ne le sut point. Et même aujourd'hui, elle ne sait toujours pas. Chacun essayait tant bien que mal de chercher une explication logique dans son coin, lui disait-elle toujours. Mais la vérité était que, personne ne l'a jamais vraiment su.
Malick, son mari, était à l'autre bout de la terre quand tout cela a commencé. Ce dernier, quand bien même était-il toujours submergé corps et âme par son travail, ne manquait jamais de prendre des nouvelles de sa bien-aimée. Mais ce fameux jour, Joy ne reçut aucun message. Plus tard, elle apprit que la ville où se trouvait Malick fut la première à être rayée de la carte. Elle pleura pendant des heures, des jours, des semaines, déversant toutes les larmes de son corps. Elle pria au fond d'elle, suppliant de tout cœur toutes les divinités du monde, mais jamais elle ne revit plus Malick, son bien-aimé. À ce moment-là, elle n'avait que faire de sa survie ou celle de l'humanité. Elle avait déjà perdu tout ce qu'elle avait de plus précieux au monde, de toutes façons. Elle tenta alors de se suicider, mais y renonça aussitôt qu'elle apprit être enceinte de Malick, son bien-aimé. Elle portait en elle le vestige de leur amour si tragique, ce vestige qui était là, sa nouvelle raison de vivre.
Dans le chaos grandissant, les premiers jours furent les plus horribles, lui racontait-elle souvent les yeux rivés vers le sol. Pris entre la panique et la peur, les gens devenaient complètement fous. Tout le monde voulait s'en aller, aller loin, fuir la guerre. Mais pour aller où ? Il n'y avait point un lieu qui n'était pas parsemé d'obus et de missiles. Partout où elle posait les yeux, elle ne voyait que tristesse. Des familles brisées, des ruines, des morts. Elle lui disait qu'elle eut de la chance. Sa région fut la dernière à être touchée, ce qui lui permis de survivre tant bien que mal aux premiers jours cauchemardesques. Et pendant tout ce temps, aucune information aussi minime soit-elle, ne leur fut adressée de la part du gouvernement. Elle avait l'impression de délirer, de vivre comme qui dirait un mauvais rêve, et que d'un moment à l'autre, elle allait finir par se réveiller, en discuter avec Malick et en rire tous les deux. Elle se sentait seule, minuscule et toute frêle face à l'immense effroi qu'elle vivait.
Pour dire vrai, elle n'eut aucune idée de comment elle put survivre. Toute seule, pendant ces six effroyables et longs mois. Elle fit de son mieux, s'abritant quand elle le pouvait, mangeant tout ce qu'elle avait, frôlant la mort des dizaines et des dizaines de fois, mais au final, elle survécut. Mais à quel prix ? Tous ceux qu'elle connaissait, sa famille, ses amis, tous disparurent. Emportés par les ravages de ce conflit meurtrier. Quand la guerre prit enfin fin, elle fut complètement méconnaissable. Elle avait une si mauvaise mine et était de part et d'autre recouverte de bleus et de cicatrices. Affichant un visage implorant le sommeil, des os dénudés littéralement de chair, et un ventre plus gros qu'il y a six mois. Elle était exténuée, extrêmement fatiguée, mais surtout lassée de ces mois et mois de calvaire.
Quand les tirs d'obus et de missiles cessèrent enfin, une annonce du gouvernement fut promulguée à tous les survivants. Aucune information sur l'origine du conflit ne fut dite, juste un message leur disant de rester là où ils étaient, de faire émettre un signal de leur présence, et d'attendre. Elle n'arrivait pas à y croire, que ceux censés les protéger les aient complètement délaissés. Pour ensuite venir les secourir tels des héros d'un conflit dont ils étaient les seuls meurtriers. Mais bien trop impuissante pour faire quoi que ce soit, toute idée de rébellion était pure folie. Elle se résigna donc, suivant à contrecœur les ordres qui leur furent donnés.
Dans ce champ de ruines où elle se trouvait, elle avait de plus en plus de mal à reconnaître ce lieu qui autrefois était son havre de paix, son paradis. Cette voûte céleste, dont elle aimait tant observer les étoiles, commençait petit à petit à s'assombrir d'énormes nuages de cendres, si bien qu'ils empêchaient désormais toute lumière du soleil d'atteindre la terre ferme, plongeant progressivement le monde dans ses heures les plus sombres. Et comme si ce n'était déjà pas suffisant, c'était au tour de cet air, dont elle aimait tant respirer la vie, de devenir toxique. Sans doute le fruit de cette guerre militaire, mais aussi bactériologique. Ainsi, pour se protéger, ils n'avaient pas d'autre choix que de porter ces énormes masques à oxygène, attendant patiemment et sagement, l'arrivée de leurs fameux "Héros".
Quand ceux-ci vinrent enfin à leur rescousse, ils les rassemblèrent tous et les emmenèrent dans un lieu qu'ils appelaient "The Gate Source". De là, une femme se présenta à eux sous le pseudonyme d'"Eve". Ses traits fins accompagnés de sa soigneuse chevelure grisâtre, avaient le don de charmer n'importe qui. Et quand elle leur adressa enfin la parole, sa voix si splendide eut le pouvoir d'hypnotiser littéralement tous ceux présents à cet instant. Elle se prêta, à la grande surprise de Joy, à répondre aux diverses interrogations qui lui furent posées, du moins à la plupart d'entre elles. Mais oh combien sa voix pouvait être hypnotisante, Joy ne croyait pas un mot de tout ce qui sortait de sa bouche. Elle était méfiante et éprouvait une certaine hostilité à son égard. Elle, qui il y a six mois, se serait sans doute laissée bercer telle une enfant.
La mystérieuse dame finit par expliquer que la Terre n'était plus habitable. Non pas parce que presque tout avait été détruit, mais à cause de l'air qui devenait de plus en plus toxique. En ajoutant les nombreux nuages de cendres qui empêchaient toute forme de prospérité, la vie sur Terre devenait progressivement utopique. Autant dire que ces quelques mots seuls, furent assez pour plonger le lieu dans un lourd mélodrame qui ne manqua pas d'attrister plus d'un. Elle poursuivit ses explications et annonça à tous que, il y a cinquante ans, la C.I.U.E.T ( Communauté Internationale pour l'Usage Éthique de la Technologie ) lança un projet de villes souterraines au vu de la croissance exponentielle de la population. Ils craignaient que d'ici quelques années, les villes soient surpeuplées. Elle termina son monologue en annonçant à tous que la survie de l'humanité se trouvait que dans ces villes, loin de la surface de la Terre. Même si cela impliquait de vivre entassés sous sol tels des rats, tous n'eurent point d'autre choix que d'accepter. C'était soit ça, soit mourir de toute façon.
Joy, ainsi que des millions d'autres personnes, furent donc contraints de s'en aller loin, de ce qui fut autrefois leur foyer. "The Gate Source", le lieu où ils se trouvaient, était donc le passage entre la surface de la Terre et le monde souterrain. Suite à l'annonce d'Ève, le départ fut prévu pour les prochains jours, ce qui, selon Joy, était bien trop peu pour faire ses adieux. Lorsque le jour fatidique arriva, ils furent tour à tour mis dans d'énormes machines aériennes. Dans lesquels pouvaient être contenus plusieurs milliers de personnes. Puis, s'ouvrait sous sol, une énorme cavité faisant office de passage vers le sous-jacent. Sans doute aurait-elle préféré l'éviter, mais joy ne put s'empêcher de se remémorer tout ses précieux souvenirs, d'amours et d'euphories, quand la machine dans laquelle elle fut, s'appreta à s'en aller. Sans doute s'était elle promis de ne pas pleurer, mais s'effondra à chaudes larmes à fur à mesure que l'engin s'introduisait sous sol. Sans doute aurait elle voulu que tout ça n'eut jamais lieu : la guerre, les ruines, les morts et tout les malheurs qui viennent avec, mais elle en était impuissante. Elle, qui ne fut qu'une simple humaine.
Une nouvelle vie débutait ainsi pour elle, dans ce lieu qu'elle trouvait plus que fade et artificiel. Et bien qu'elle rêvait chaque jour d'évasion et de liberté, ils ne purent jamais retourner, elle et son fils bien-aimé, dans ce lieu où était leur sérénité.
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The underground society.
Bilim KurguVers les années 2300, la technologie atteignit son âge d'or. Permettant d'une part à grandement améliorer le quotidien de chaque être humain, mais aussi d'une autre, à être la source des nombreuses avancées militaires. Et bien que l'absence de confl...