Chapitre 8 : les visions

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Les jours passent et se ressemblent. Silas disparait toujours pendant des heures et nous ramène à manger avant de volatiliser à nouveau. Arow refuse de me répondre à ce sujet. Il me force à courir tous les matins et tous les soirs. Je suis exténuée mais au moins, je pense plus à des choses tristes. Je n'ai plus le temps. Seul mon sommeil est épouvantable.

Je me trouve toujours aussi lamentable au combat. Je n'arrive jamais à le battre et ma famille me manque chaque jour un peu plus. Les dessins de leur visage sont sous ma robe, et je dors dessus tous les soirs. Je les regarde souvent. Si seulement j'avais un crayon, je ferai celui de mes frères.

Arow me surprend souvent la nuit, réveillée, en train de contempler mes parents mais il ne fait jamais de commentaires. Un jour, je me réveille et je vois un crayon à coté de moi. Arow n'est pas là, déjà réveillé depuis des heures. Il ne dort jamais beaucoup. Son sommeil est souvent agité. Je sais que le mien n'est pas mieux. Mes rêves sont ponctués de souvenirs désagréables.

Je ne mange pas ce matin là et entreprends de dessiner. Je ne m'arrête que quand le soleil se couche le soir même. Arow ne m'a pas arrêté une seule fois mais il a déposé de la nourriture a de nombreuses reprises à mes cotés.

Quand j'ai enfin fini, mes yeux sont cernés et je m'écroule sur ma paillasse de fortune. Je m'endors instantanément. 

Lorsque je m'éveille de nouveau, Silas est à coté de moi. Il me caresse les cheveux tendrement. Il doit voir l'interrogation dans mon regard car il s'explique.

- Tu criais et te débattais. J'ai essayé de t'apaiser. Tu fais des terreurs nocturnes ?

Je hoche simplement la tête. De temps en temps, je cauchemarde. Avant c'était soit mon petit-ami et ma meilleure amie, soit mes parents qui mourraient. Maintenant, je suis toute seule et je n'arrive pas à retrouver mes petits frères. J'en ai des sueurs depuis des nuits. Dans ces cas-là, je ne parviens pas à me réveiller. 

Je me redresse en position assise, analysant tout autour de moi. Toujours au même endroit, avec un petit feu qui s'éteint car il fait de plus en plus chaud dans la forêt. Nous sommes en plein cœur de l'été désormais. Des semaines sont passées depuis l'attaque.

Arow n'est pas là et j'en suis soulagée. J'ai droit à un regard de compassion de la part de Silas qui me donne quelques fruits. Je les croque et apprécie immédiatement le sucre. C'est délicieux.

- Arow aussi, poursuit son ami en mangeant lui aussi une pomme. Vous pourriez essayer d'en discuter tous les deux. 

- Il est très mystérieux, il ne me dira rien, lui réponds-je. Il ne me parle jamais de lui, de son passé ou même de sa famille. Je ne peux pas espérer qu'il se dévoile à moi, Silas. Même s'il a fait énormément d'efforts avec moi.

- Toi aussi tu ne parles jamais de toi.

Je tourne la tête vers lui et pince des lèvres. Il me fait ses yeux doux, espérant m'attendrir. Cela marche alors je lui explique le fond de ma pensée.

- Je sais. Je suis tellement méfiante envers le monde, que me détendre est compliqué. Surtout maintenant que je sais que je suis une liseuse de lumière. Je dois davantage réfléchir à ce que je peux dévoiler.

Je mange un raisin et laisse mon regard errer vers les arbres. Vivre dans la forêt n'est pas aussi terrible que je le pensais au début. Je m'adapte à tout.

- Ta méfiance se comprend, Rosalie. Tu n'as pas eu une vie facile, j'en conviens. Tu es comme Arow, vous avez perdu des êtres chers. Voilà pourquoi vous vous disputiez sans cesse. Vous refusez encore maintenant d'admettre, que vous avez plus en commun que vous ne le pensez.

De cendres et lumièreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant