VIII

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"Un truc entre Harry et moi ? Avec Harry ?"

La voix d'Hermione n'était pas glaçante, mais elle figea tout autant les trois serpents que si elle l'avait été.

"Qu'il se passe quelque chose entre Harry et moi est tout aussi probable qu'il se passe quelque chose entre Draco et Pansy" lança-t-elle sèchement.

Rien qu'en entendant cela, rien qu'en imaginant la situation, la brune grimaça, comprenant parfaitement ce que voulait dire Hermione. Ce ne fut pas le cas des garçons qui la regardèrent s'excuser pour leur stupidité avec confusion, avec ahurissement (ce n'était pas tous les jours que la Pansy Parkinson qu'ils connaissaient s'excusait aussi platement).

"Qu'est-ce que tu veux dire par là, Granger ? Que je suis aussi peu attirant que Potter ? Tu devrais pourtant savoir que ce n'est pas le cas."

Hermione leva les yeux au ciel en entendant sa remarque mais ne répliqua pas. En revanche, elle nota dans un coin de sa tête l'utilisation de son nom : visiblement, seules Pansy et elle avaient pour le moment réussi à faire d'une habitude l'utilisation de leurs prénoms respectifs.

"Remarque, elle a raison, enchaîna Blaise avec un sourire charmeur. Je suis cent fois mieux que toi, si Pansy devait sortir avec l'un d'entre nous, ça serait sans aucun doute moi.

-Jamais de la vie ! Vous êtes tous les deux aussi laids l'un que l'autre, s'exclama la concernée avant d'ajouter. Ce que voulait dire Hermione est qu'ils se considèrent comme frère et sœur."

Le visage de Draco s'éclaira de compréhension, à l'instar de celui de Blaise, et celui de Théodore s'éclaira simplement, sous le regard intrigué de la Serpentard.

Bien qu'il n'ait pas parlé depuis qu'ils étaient sortis du bureau de Rogue, Pansy le gardait étrangement à l'œil et ne put rater le léger changement de sa posture, de son visage à l'entente de l'explication. 'Il y a quelque chose à creuser de ce côté' pensa-t-elle alors, avec une idée derrière la tête. Une idée qui pourrait bien révéler un secret semblable à ceux qu'elle adorait. Si elle avait pu, elle se serait frotter les mains face à l'excitante situation que se dessinait devant elle.

Cependant, elle fut tirée de ses pensées par Hermione, qui s'agitait à ses côtés.

"Il faut que je vous laisse. J'ai quelques explications à avoir avec Ronald, finit-elle par dire. On se voit plus tard."

Alors seulement elle s'éloigna, marmonnant à propos d'une semaine passée, de tentatives d'esquive et d'idiotie.

"Ronald ?

-Ron Weasley, souffla Théo tout en s'éloignant en direction de leur salle commune. S'il-te-plaît Blaise, concentre toi un minimum.

-Ah ! Weasbee" ria l'interpelé avant de partir à sa suite.

oO0Oo

Harry n'avait pas bougé depuis qu'Hermione était parti. Bon, il parcourait la pièce du regard, ce qui était une avancée par rapport à son état précédent certes, mais il était toujours à la même place.

Il ne savait pas vraiment pourquoi, mais il ressentait le besoin de rester ici, dans ce bureau appartenant à l'un des professeurs qu'il avait eut du mal à ne pas détester et sur qui il ne savait plus quoi penser.

Il se trouvait stupide qui plus est, de rester assis à même le sol ici alors que l'envie de se gratter jusqu'au sang l'avant-bras, comme il l'avait déjà fait tant de fois, faisait surface et le démangeait, littéralement. Personne n'était au courant de ces envies -non, besoins- soudaines alors pourquoi s'obstinait-il à rester, au risque qu'il y cède, au risque que Rogue le découvre.

Il ne remarqua pas que son professeur avait quitté la pièce quelques instants après avoir fini de ranger le bazar restant. Il ne remarqua pas qu'il se retrouva seul un moment.

C'était peut-être la raison pour laquelle il fut surpris au point d'en sursauter quand une main tenant une tasse brûlante apparue en face de lui, alors qu'une silhouette sombre s'asseyait comme lui.

"Harry, ça te dérangerait que l'on ait une discussion tous les deux ?"

Puisque l'adolescent le regardait confus, légèrement paniqué comme s'il s'attendait à se faire disputer, Severus ne put s'empêcher de justifier.

"Tu n'as rien fait ! Enfin je crois... Je ne comptes pas te faire de reproches ou quoi, c'est juste que je me disais qu'il fallait que j'ai une discussion avec toi en tant qu'ami de Lily...

-C'est juste que c'est bizarre comme situation, expliqua finalement Harry, peinant à trouver les bons mots. Il y a à peine quelques jours, vous m'auriez appelé Potter sur un ton menaçant, m'auriez accusé d'être resté assis trop longtemps. Ou d'avoir percé un parchemin. Ou de ne pas être sorti rapidement. D'un truc quelconque quoi, et je me serait pris une heure de colle, ou plus. Et puis... Vous auriez même été capable de mettre du poison dans cette tasse.

-Je t'assure qu'il n'y en a pas ! C'est l'elfe qui travaillait chez Lucius, Dobby, qui l'a préparée. Il a dit que c'était celle que tu lui demandais le plus souvent. Mettre du poison dans la tasse... Je ne pourrais pas tuer le fils de Lily.

-Mais celui de James, oui."

Un silence plana au dessus d'eux. Attendu. Révélateur.

"Depuis que vous avez utilisé ce sort sur moi, ma mémoire est affectée. J'ai des souvenirs en vrac que je suis incapable de classer chronologiquement. Plus précisément, j'ai des souvenirs que je suis incapable de classer correctement entre "cette décision m'appartient" et "cette décision ne m'appartient pas". Mais je me souviens de chacun. Du moins je crois, j'ai encore l'impression d'avoir des blancs."

Severus s'était remis à parler. Il n'avait pas cherché à contredire Harry et ce dernier en éprouvait une étrange reconnaissance. Alors il se contentait de l'écouter, un peu comme un enfant écoute une histoire pour la première fois.

" C'est sûrement pour ça que je me souviens du moment où tu as utilisé ma pensine. Quand ça ? L'année dernière ? Il y a deux ans ? Ça n'a pas vraiment d'importance cela dit. Je me doute bien que tu as dû y apercevoir un souvenir en particulier, peut-être même d'autres.

Ce souvenir est le plus insupportable pour moi je crois... Celui où James et sa clique m'ont presque fait perdre Lily. Et je dis ça comme si c'était entièrement de leur faute alors que ce sont mes propres mots qui ont été dit, pas les leurs.

Contrairement à ce que tu as dû penser, ça n'a pas sonné la fin de notre amitié avec Lily. Il y a eu un moment où on ne s'est plus parlé certes, mais elle a fini par me pardonner. Fichue générosité...

Tu sais Harry, ça a été la première chose à laquelle tu m'as fait penser quand je me suis réveillé après le sort de Draco. Que tu ressemblais à ta mère par ta générosité et ton inquiétude, plus qu'à James par le physique."

Il s'interrompit en voyant les yeux brillants de l'adolescent, qui souriait vaguement, s'autorisant à sourire lui-même.


Pour le plus grand bienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant