Chapitre 7

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Kaveh passait beaucoup plus de temps à boire ces derniers temps. Il continuait de se payer des verres continuellement, déjà pourtant endetté jusqu'aux os. Cette période de l'année était difficile pour lui. Son opinion envers sa personne se dégradait grandement, plus qu'habituellement, et boire lui permettait d'oublier un peu sa peine. Il n'osait même plus se regarder en face, se rabaissant avant même d'avoir prit le temps d'observer.
Il s'était une énième fois endormi sur ses croquis, peinant à ouvrir les yeux au beau milieu de la nuit. Il observait ce qu'il avait dessiné, déçus de lui-même, le cœur serré à imaginer recommencer à nouveau, et rater une fois de plus. Il se posait toute sorte de questions qui le brisait un peu plus, et il se mit à pleurer sans contrôler son corps fatigué. Une main tenant sa tête, l'autre fermement appuyée contre ses lèvres, retenant ses sanglots. Il avait autant mal à l'intérieur qu'à l'extérieur ; dormir dans une mauvaise position lui amenait toute sorte de courbature qu'il n'aurait pas cru possible. Que pouvait-il faire ? Sa souffrance serrait son coeur au possible, l'empêchant un instant de respirer. Il se demandait même s'il méritait cet air, si inspirer ne coûtait pas trop à ce monde, et c'est à ce moment qu'il sentit des mains rassurantes attirer sa tête contre un corps chaud. Sans se poser de question, Kaveh enroula la taille de l'homme de ses bras, tentant de calmer ses sanglots. Il sentait des caresses dans le haut de son dos qui le rassurait, et une main qui était venue se poser sur sa tête, à recoiffer ses cheveux doucement. Ses idées noires disparurent une à une, n'effaçant cependant pas son mal-être.
Une fois calmé, il se recula, essuyant son visage en évitant le regard de son colocataire. Il n'avait fait aucun commentaire jusque-là, mais il allait forcément se mettre à parler.

—Kaveh.

Il ne savait pas ce qu'il allait pouvoir lui expliquer. Comment lui dire qu'il se détestait ? Comment lui dire tout le reste ?

—Kaveh, regarde-moi.

L'architecte, surpris par sa demande, leva difficilement ses yeux rouge et gonflés vers lui. Le regard d'Al-Haitham était indéchiffrable, comme à son habitude.

—Je ne te demanderais pas de m'expliquer, si ça t'inquiète tant.
—Je suis si facile à lire que ça...?

L'homme se contenta de sourire, tandis que Kaveh se levait face à lui. Il l'attrapa par le poignet et le tira pour s'asseoir côte à côte sur le sofa.

—Haitham, je veux t'expliquer...
—Tu trembles.

Kaveh observa ses mains tremblantes, et les fit se rejoindre pour tenter de cacher les tremblements. Il tenta d'inspirer lentement en fermant les yeux, mais sentit une paume chaude se poser par dessus ses mains. Il observa Al-Haitham, surpris, mais fini par lier une de ses mains à la sienne en silence. Une fois parfaitement calmé, il se remet à parler.

—Je disais...que j'aimerais t'expliquer. Je veux dire...c'est étrange que tu me console sans savoir pourquoi. Enfin...c'est déjà étrange que tu me consoles, mais c'est un détail !
—Kaveh.
—Désolé...
—Je t'écoute.
—Je...dans quelques jours, ce sera l'anniversaire du décès de mon père. Quand cette période approche, j'ai toujours beaucoup de mal...avec moi. Enfin...surtout pendant cette période.
—Pourtant, tu n'as rien à te reprocher.
—Si tu savais tout ce que l'on peut me reprocher, ahah...!

Riant d'un rire dérisoire, Kaveh se tût rapidement en voyant la mine sérieuse du scribe. Il approcha son visage légèrement, répétant d'un ton plus grave ce qu'il venait de lui dire.

—Tu n'as rien à te reprocher, Kaveh.

Sans se contrôler, le blondinet sentit ses larmes monter de nouveau, et Al-Haitham ne traîna pas pour le serrer dans ses bras. Il avait toujours rêvé d'entendre ces mots, peu importait de savoir s'il les méritait ou pas. Il savait juste qu'être contre ce scribe à ce moment précis lui sauvait la vie. Malgré toutes leurs disputes, c'était toujours cet homme qui était à ses cotés lorsque tout allait mal. Kaveh recula son visage trempé de larmes pour observer celui d'Al-Haitham. Ses traits fins, son regard perçant, ses cheveux tombant. Sans prévenir, le scribe vint déposer un léger baiser sur son front, avant de replonger son regard dans le sien. Kaveh était loin de s'attendre à ça de sa part, aussi son coeur avait louper un battement et ses larmes avaient arrêter de couler. Une douce chaleur sur son front lui faisait un bien fou.

—...Haitham...
—Oui ?
—Encore une fois...

L'homme esquissa un léger sourire, venant embrasser sa joue tendrement. À nouveau, une douce chaleur se dégagea de l'endroit où Al-Haitham avait posé les lèvres.

—Encore...!

Le scribe vint cette fois déposer un baiser sur le bout de son nez, avant de rapprocher ses lèvres de celles de Kaveh.

—Kaveh.
—...Haitham.
—Je peux ?

Uniquement lorsque Kaveh finit par approuver, Al-Haitham lia leurs lèvres. L'architecte avait fermé les paupières par réflexe, appréciant simplement ce doux contact, nouveau à ses yeux. Kaveh sentit son corps être poussé doucement contre le sofa, jusqu'à ce que son corps repose entièrement dessus, n'ayant pas lâché les lèvres d'Al-Haitham tout du long. Leurs visages se décollèrent lorsque le souffle vint à leur manquer, et le blondinet qui avait enrouler ses bras autour du cou d'Al-Haitham se rendit finalement compte que l'homme le surplombait. Le scribe se laissa tomber à coté de lui, sans le lâcher, ne lui laissant pas le temps de paniquer. Ils se regardèrent en silence, pas certains de vouloir avoir cette discussion maintenant. Alors doucement, Kaveh se rapprocha jusqu'à coller le corps d'Al-Haitham, la tête callée, et il ferma les yeux. L'étreinte rassurante du scribe lui permit de s'endormir rapidement, lui évitant tout un flot de question pour toute la nuit.

HaiKaveh ~ Une Histoire De ConflitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant