Chapitre 15

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Shay

C'est avec une douleur dans la nuque que je me réveille. Je ne me suis même pas senti en train de tomber de sommeil. J'ai la sensation que mes yeux pèsent une tonne alors que j'essaie de les ouvrir. Un mal de crâne carabiné s'invite à l'équation et je ne comprends rien de ce qui se passe.

Dans le coltar, je me lève de ce foutu canapé et, oubliant momentanément que je ne suis pas chez moi, je file prendre une douche en espérant que ça me remettra d'aplomb.

Dix minutes plus tard, je suis à nouveau en pleine forme et complètement furieux.

Oh putain, la garce. Je vais tuer Love. Attendez qu'elle passe cette putain de porte. Alors que je suis de nouveau assis sur le canapé dans le salon, les trois sachets vides de somnifères que j'ai chopé dans la poubelle, j'attends qu'elle daigne remontrer le bout de son nez pendant que je ressasse mon agacement.

Je ne peux pas croire qu'elle ait fait ça... Mais si, cette connasse m'a drogué de ces merdes pour se volatiliser.

La porte d'entrée s'ouvre mais je ne me retourne pas. J'attends qu'elle referme et qu'elle avance dans le séjour.

— La soirée a été bonne, j'espère, lancé-je sarcastique en me levant pour lui faire face.

Elle pile nette et ses yeux s'agrandissent en voyant que je suis réveillé.

— Tu es déjà... Mais elle ne termine pas sa phrase et j'éclate d'un rire sec.

— Réveillé? Surprise, raillé-je froidement. La prochaine fois, fais-je en agitant les sachets vides, mets le paquet entier.

— C'est absolument pas ce que tu crois, tente-t-elle de se justifier mais je refuse de l'écouter.

— Oh mais je ne crois rien, Love. Je constate. Tu m'as drogué pour sortir.

— De suite les grands mots, marmonne-t-elle en roulant des yeux.

Je l'ignore.

— Laisse-moi deviner... dis-je d'un ton traînant. Une course.

Elle détourne brièvement les yeux et j'ai ma réponse.

— Bien sûr, ricané-je pince sans rire. Evidemment!

— T'es pas mon père Shay. Il fut un temps tu étais mon ami et mon copain mais t'as perdu tous ses droits. Tu n'es que mon ex, un total étranger alors tes leçons de morales et tes reproches, tu te les gardes, riposte-t-elle, agacée en me dépassant.

Je la retiens en chopant son poignet.

— On a pas fini.

— Lâche moi et j'en ai rien à foutre. Je suis fatiguée, j'aimerais aller me coucher. Tu connais la sortie.

Elle me fait lâcher ma prise et s'éloigne dans le couloir, me plantant avec mon énervement dans le salon.

Je serre les dents et me laisse tomber sur ce putain de canapé en fourrageant brutalement dans mes boucles dépourvu de mon bonnet.

Une course... Encore. Elle est prête à tout pour ces merdes jusqu'à endormir les éléments perturbateurs.

Ouais, ça va me rester un moment en travers de la gorge. Sans compter qu'elle a aussi volé ma bagnole pour s'y rendre.

Je pousse un soupir, les coudes en appuie sur les genoux et enfouis mon visage dans mes mains. J'imaginais galérer et ramer à mon retour pour la récupérer mais je dois bien admettre que la nouvelle Love Baker qui est sans aucun doute possible bipolaire, échappe complètement à mon contrôle. C'est une putain de fanatique et d'addicte à ces putain de courses de rues. Et elle en a littéralement rien à foutre de jouer avec sa vie à chaque fois qu'elle s'y rend...

La question est pourquoi?

A une époque qui remonte tellement qu'on croirait que ça ferait un millénaire, il y avait une Love à la joie de vivre hyper contagieuse. Mais le divorce de ses parents a tout changé. Peu de gens l'ont remarqué moi compris, mais Love avait changé. Irrémédiablement.

J'ignore si les troubles bipolaires sont apparus avant ou après ça mais Love n'était déjà plus la même. Et mon départ à moi plus tard, n'a sans doute rien dû arranger.

En fait, elle vit sa vie comme si elle n'avait plus rien à perdre et ça ne fait que m'inquiéter davantage.

— T'es encore là?

Je relève la tête et la voit, dans l'entrée du séjour, un sweat et un jogging informe comme pyjama.

— Tu ne devais pas aller dormir? demandé-je.

Elle ne répond pas et à la place vient me rejoindre sur le canapé. Je la suis des yeux, en fronçant les sourcils quand je note encore un changement chez elle. Quand elle m'a encore envoyé chier elle était furieuse et maintenant elle me paraît comme... Abattue.

— Si, répond-elle doucement mais je sais pas d'un coup, je n'avais plus envie.

— Comment s'est passée ta course? m'enquiers-je.

Autant aller sur un sujet qui pourra sans doute lui donner cette étincelle à chaque fois qu'elle en parle.

Mais c'est un échec.

— Normal.

— T'as gagné?

— Oui.

Des réponses par monosyllabes... Génial.

Le pire c'est avec les gens bipolaires, on ne peut rien faire. Faut les accepter tels qu'ils sont.

— Tu devrais aller dormir, lui dis-je.

— Pas envie.

— Et t'as envie de quoi alors? continué-je.

Elle tourne la tête vers moi et hausse les épaules.

— Je sais pas, souffle-t-elle du bout des lèvres.

Et moi alors? Je suis censé savoir pour toi?

A court d'idées, je lui ouvre mes bras, lui désignant de venir d'un mouvement du regard. Ça passe ou ça casse.

Love reste immobile quelques minutes avant de venir se blottir contre moi. Sa tête collée contre mon cœur, elle doit l'entendre battre comme un fou. Je bascule la tête contre la sienne, son odeur me chatouillant le nez et je resserre mon étreinte.

— Tu m'as manqué, entends-je alors. Même quand je te détestais, tu continuais de me manquer... Je voulais que tu reviennes...

Mon cœur loupe un battement à ces mots. Des mots où je suis presque certain, je n'aurais jamais dû les entendre. Mais ce qui est fait est fait.

— Je suis là maintenant et je te lâche plus, trésor... lui soufflé-je en fermant les yeux.

Mais je parle dans le vide car sa respiration régulière et plus calme m'indique qu'elle s'est endormie.

Je profite de sa présence encore quelques minutes avant de la porter et l'amener à son lit. Et je jure que je n'ai aucune envie de partir d'ici mais si demain elle me trouve dans le lit avec elle, elle me tuera.

Alors après l'avoir bien couverte, je sors de sa chambre en refermant doucement la porte.

— Bonne nuit, trésor, murmuré-je en même temps.

Quant à moi, j'allais dormir dans le canapé. Ça ferait l'affaire pour cette nuit. 

Mon ex, mon nouveau demi-frère (EN PAUSE)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant