⤖ 1. Un colocataire irritant

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— NON ! tempête Mike. Il en est HORS DE QUESTION !

Il jette un coup d'œil sur son téléphone, vérifiant l'heure. Quand Luke allait savoir ça ! Il allait faire des bonds de dix mètres. Et Caitlin lui dirait que c'est un mauvais plan. Un très mauvais plan.

Dans chaque rom-com que Mike avait vue, ce genre d'histoire finissait irrémédiablement par des problèmes. Et des problèmes, le jeune homme en avait déjà bien assez. A commencer par venir ici et se retrouver avec son idiot de colocataire qu'il ne connaissait même pas. Il était sûr d'une chose : James Von Neumann allait lui casser les pieds toute l'année.

— Michael, écoute, je sais que ça fait seulement une heure qu'on se connaît, mais-...

— NON ! hurle Mike, si fort qu'il craint de briser une fenêtre.

Jamais, il n'avait été si en colère. Mister Von Neumann, cet insupportable américain aux origines allemandes (ou austro-hongroises, Mike n'avait pas vraiment suivi et s'en fichait complètement), le faisait déjà sortir de ses gonds comme personne auparavant. Le voyage en avion depuis New-York avait été affreux et éreintant. Il y a quelques jours à peine, il jouait et chantait avec son groupe, Sad Joy, et maintenant, il était à San Francisco, dans cette satanée université pour y étudier de l'informatique.

Ce n'était pas son choix. Pas son envie. Ce n'était pas qui il était non plus. Mike a toujours été un marginal, un de ceux qui ne rentre dans aucune boîte, pas même celle offerte par Saint-Matthew. Si même cette école n'avait pu lui offrir une place dans le monde, alors qui le pourrait ?

James recule d'un pas, effrayé. Mike se rend compte qu'il doit paraître terrifiant, avec ses énormes cernes sous les yeux (il n'a pas dormi depuis quelques jours à cause de l'appréhension), ses yeux injectés de sang, les gouttes de sueur qui coulent déjà sur son cou et sa mine débraillée par le voyage, durant lequel il ne s'est pas reposé. Peut-être qu'il est un peu à fleur de peau cet an-ci...

— Écoute, James, reprend calmement Mike. Je viens d'arriver. On ne se connaît pas. Tu avais même oublié mon prénom et tu oses me demander ça ? Tu ne sais rien de moi !

— Je suis désespéré, Mike ! proteste James. Et puisqu'on va être amené à vivre ensemble, je me suis dit que tu pourrais m'aider.

— Ça, on verra, grommelle l'intéressé en lorgnant sa chambre aux murs nus. Maintenant, si tu permets, j'aimerais bien qu'on me laisse tranquille. Je ne suis pas là pour me faire des amis.

Sans un regard de plus pour son coloc', qui le fixait, la bouche grande ouverte et les yeux écarquillés face à la stupidité de la requête qu'il avait demandée, Mike commence à déballer ses affaires. Cette chambre avait besoin d'âme. De personnalité. La porte claque et ce n'est que ce moment-là qu'il réalise qu'il retenait son souffle.

Méthodiquement, il déplie ses vêtements et les range dans l'armoire vide à côté du bureau, sur lequel il a déjà disposé son ordinateur. Comble de l'horreur : Mike n'a même pas pu emmener sa basse. Ici, il était un prisonnier. Avec difficulté, il étouffe un sanglot. Il n'y avait pas pire torture pour un musicien, que d'être séparé de son instrument.

Il ferme les yeux, se repassant le film du ce qui avait été le meilleur été de sa vie. Parfois, il lui arrivait de se connecter au compte Spotify du groupe et de regarder leur EP, comme s'il peinait encore à réaliser qu'ils avaient été à même de publier quelque chose. De temps en temps, cela suffisait à l'apaiser. Mais pas aujourd'hui : son instrument était bien trop loin de lui. Une douleur sourde couvait dans sa poitrine, comme si on lui avait arraché une part de lui, pour ne laisser qu'un néant terrifiant à la place. Il retient un autre sanglot.

Cependant, la fatigue a très vite raison de son endurance : les larmes dévorent ses joues comme si elles n'avaient pas coulé depuis des décennies, si bien que Mike songe à mettre de la musique pour que personne n'entende ses pleurs. Personne n'était là pour lui. Il ne pouvait compter que sur lui-même, et il ne laisserait pas James, ou qui que ce soit, le voir dans cet état. Pour la première fois de sa vie, Luke et Caitlin n'étaient pas à ses côtés pour l'épauler.

S'ils avaient été là, Caitlin l'aurait rassuré (elle trouve toujours les bons mots et sa présence est réconfortante, comme un caramel beurre salé qu'on laisse fondre sur la langue) et Luke l'aurait secoué pour qu'il se ressaisisse et se batte. Mais ils n'étaient pas là, alors Mike vide ses valises le plus vite possible et accroche ses posters à côté de son lit. Au moins, le spectre de Dark Fate veillerait sur lui. Voir les photos de ses amis à côté des visages de Christopher Gentleson, Javier Del Bosque et Freddie McSaturn lui paraît si incongru qu'il en déplace la majeure partie à côté de son bureau, afin de les voir lorsqu'il travaillera.

Mike ne ressort pas de sa chambre et ne mange pas ce soir-là. Pour la deuxième fois de sa vie, il n'avait pas faim et il lui semblait injuste que la Terre continue de tourner en se moquant de ses souffrances. Pour lui, la vie était terminée.

Il tend l'oreille dans l'obscurité tiède de la nuit. L'appartement est silencieux. Ou bien son coloc' était sorti, ou bien il avait décidé de faire profil bas. Peut-être encore qu'il s'était rendu compte de la débilité de son idée qu'il avait faire part à Mike juste après s'être présenté...

Le jeune homme soupire et ouvre la fenêtre, espérant atténuer un peu la moiteur de l'atmosphère avec la nuit. Évidemment, comme il faisait treize degrés dehors, le froid lui brûle les mains et les épaules. Pendant un instant, il se prend à espérer que le froid le consumerait tout entier, que ses cendres se disperseraient loin d'ici, l'emportant dans un endroit où il se sentirait mieux.

Ils avaient tout donné pour que Sad Joy fonctionne cet été. Et ils avaient échoué. Encore. Il n'y avait aucun monde, aucun univers, où Sad Joy pourrait réussir. Aucun. Parce que le groupe était maudit.

De nouvelles larmes gagnent les yeux de Mike et il se roule en boule dans son lit, et attend dans ses larmes, comme chaque nuit, que le sommeil vienne. Cette université sera son tombeau.

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Bonsoir ! Comment allez-vous ? :)

Ça s'annonce visiblement très mal pour Mike. 😅 A votre avis, arrivera-t-il à se faire à cette nouvelle vie ?

Vous rencontrerez un peu plus James dans le prochain chapitre ! Que pensez-vous de lui, actuellement ? Quelle demande aurait-il pu formuler à Mike pour qu'il se mette dans cet état ?

N'hésitez pas à me laisser un commentaire et à me donner votre avis ! 🤎

On se retrouve vendredi 06 octobre pour le chapitre 34 de Le temps d'une chanson et samedi prochain (le 07) pour le chapitre 2 !

Prenez bien soin de vous ! 🎶

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Un automne pour tout écrire (3.5)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant