— Alors là, Von Neumann, n'y pense même pas ! s'exclame Mike, horrifié, en le voyant lui rapporter une sous-marque de brownie. Les gâteaux, on les fait nous même !
— Je t'assure qu'ils ne sont pas si mauvais ! se défend James. Et puis, tu verras vite qu'on n'aura pas le temps de faire des gâteaux toutes les semaines.
Mike secoue la tête, scandalisé.
— Ma meilleure amie dit que tout est une question d'organisation, affirme-t-il, citant Caitlin.
— Eh bien, ta meilleure amie n'a certainement jamais étudié les mathématiques ou l'informatique, contre James en posant le paquet dans le caddie.
— Ou alors tu es désorganisé.
James s'approche avec enthousiasme du rayon des légumes surgelés.
— Peut-être, mais ces brownies sont des bombes caloriques et quand je travaille, j'ai besoin de sucre !
Mike soupire et pousse le caddie jusqu'à lui, songeant qu'ils n'ont pas emmené de glacière et qu'ils devront se dépêcher de rentrer s'ils ne veulent pas que la viande tourne et que les glaces et légumes décongèlent. Ils se séparent et Mike part en quête de fruits et légumes frais, projetant de cuisiner prochainement une ratatouille et de faire une raclette dès les premiers froids (si tant est qu'il peut faire froid ici et qu'il peut trouver de la raclette). Depuis qu'il a découvert ce plat chez Emmy il y a des années, il n'a de cesse d'en saliver. Peut-être qu'Alice pourra lui en envoyer !
Mike s'autorise un unique détour avant de retrouver James : le rayon coiffure. Il a besoin de changement, et Emmy l'a convaincu de sauter le pas... Il n'hésite pas à prendre la coloration bleu nuit qui lui fait de l'œil depuis des mois. Cette rentrée allait peut-être être pourrie, mais Mike aura les cheveux dont il rêve pour la vivre. Cette idée lui procure un peu de joie.
Il rejoint son coloc qui lui jette un regard sceptique.
— Du bleu ? T'es sûr que ça t'ira ? Je t'aurais plutôt vu avec les cheveux rouges.
Les émeraudes dans les yeux de Mike se durcissent, laissant place à des pierres aiguisées.
James lève les mains en signe de reddition.
— Très bien, très bien. Du moment que ça te plait...
Mike pousse le caddie vers le rayon suivant. Place aux paquets de riz et de pâtes, à présent.
— Pour ton information, reprend Mike en jetant plusieurs paquets de linguines dans le caddie, j'ai eu les cheveux rouges toute mon adolescence.
— Je suis sûr que ça t'allait cent fois mieux que ce vert immonde, rétorque tranquillement James en glissant incognito trois paquets de farfalles en plus.
— Jaloux.
— Jaloux de quoi ? s'étonne James. Si je voulais avoir les cheveux d'une licorne, ce serait déjà fait.
Mike lève les yeux au ciel. Qu'il est exaspérant ! Il l'ignore donc jusqu'à ce qu'ils soient sortis du magasin, les bras chargés de sacs. Le soleil est déjà haut dans le ciel, et de la transpiration apparaît déjà sur le front de Mike. Ils prennent le bus pour rentrer, n'osant pas arpenter la ville à pieds sous le soleil avec des produits frais.
— Tu vas bouder pendant encore longtemps ? lance James, dès qu'il a refermé la porte.
Mike soupire en jetant ses clefs sur la commode à l'entrée avant de déposer les sacs sur la table de la cuisine et d'entreprendre l'organisation du frigo.
— On n'est pas sur la même longueur d'onde, toi et moi, finit-il par dire, du bout des lèvres.
Ou alors, Mike n'a simplement pas le cœur à se montrer aimable et à se faire des amis.
— Tu plaisantes ?! s'offusque James. C'est la première fois que je rencontre quelqu'un qui aime autant la nourriture que moi !
— Alors tu ne connais pas Alice, marmonne Mike, en rangeant la crème et la viande sur une étagère du frigidaire.
Les larmes lui montent aux yeux quand il songe à son amie rentrée à Paris. Par la musique, qu'est-ce qu'ils lui manquent !
— Pardon ? Tu as parlé dans ta barbe...
Mike secoue la tête pour reprendre ses esprits.
— Ce n'était rien d'important.
James répond un « d'accord » enthousiasme et se lance dans une nouvelle description du campus et infrastructures aux alentours. Mike l'écoute avec une politesse feinte, ses doigts brûlant de gratter les cordes d'une basse. Mais elle n'est pas là, et il devra s'y faire. La musique, l'été qu'ils avaient passé, tout ceci lui paraissait injustement lointain. Il aurait aimé y retourner, quitte à ce que ça soit une boucle temporelle, qui se répète inlassablement. Au moins, il était heureux.
James claque des doigts plusieurs fois devant les yeux de Mike. Quand s'était-il assis dans la cuisine, en face de James ?
— Tu ne m'écoutes même pas, soupire James. Qu'est-ce qui t'arrive ?
— Rien qui ne te regarde, répond froidement Mike.
— Je suis ton coloc, Mike. On va se voir tous les jours, tu peux me faire confiance !
— On ne se connaît pas, assène le jeune homme.
— Pas encore, corrige joyeusement James.
Mike lève les yeux au ciel. Est-il donc toujours d'une bonne humeur exécrable ? Il se lève et la chose racle un peu trop fort le sol.
— Je vais dans ma chambre.
James hausse les épaules, comme si ça lui importait guère. « C'est probablement le cas » songe Mike.
— T'as raison, Mister Grognon, retire-toi dans ton antre sombre et maussade pour en ressortir toujours plus ténébreux et antipathique. Moi, pendant ce temps, je prendrai le soleil sur le balcon, tel un tournesol.
Au vu de la blancheur de la peau de James, il ne devait pas sortir beaucoup, alors Mike met sa réponse sur le compte de la moquerie et se content de s'arrêter un instant devant sa porte, une mine surprise sur le visage. Antipathique, ténébreux, distant... voilà des qualificatifs qu'il n'aurait jamais pensés entendre à son sujet. Et pourtant, ils étaient sorti de la bouche de James. Pire encore, il avait raison, totalement raison. Mike n'était plus lui-même, et tant que la musique ne serait plus au cœur de sa vie, il ne serait plus qu'une ombre.
Il ferma la porte, s'enfermant dans l'obscurité maussade de son humeur.
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Bonsoir ! Comment allez-vous ?
Merci d'avoir lu ce chapitre ! Que pensez-vous de tout ça ? Mike ne fait pas vraiment d'efforts 😅
Pensez-vous que sa situation va s'améliorer ?On se retrouve samedi prochain pour le chapitre 4 !
D'ici là, prenez bien soin de vous ! 🧡
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Un automne pour tout écrire (3.5)
Fiksi RemajaLivre 3.5 de la série « plume et musique » Il est nécessaire d'avoir lu la trilogie « La musique avant tout », « Tout pour la musique » et « Le temps d'une chanson ». 🍂 Avant le succès de Sad Joy, les projecteurs et les chansons dans le haut des c...