16.

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Rosália

Je n'ai pas bougé d'un iota. Mon corps refuse tout mouvement par peur que celui-ci soit mal pris, comme devant un animal sauvage je guette chaque réaction corporel de mon géniteur. Il est le prédateur et je suis la proie, le cycle injuste de la vie que mon père a instauré dès mon premier souffle dans ce monde infâme.

Beau de l'extérieur mais horrible de l'intérieur. Voilà ce qui caractérisait mon paternel. Il accepte sa vieillesse, ses rides sont présentes mais lui vont bien, ses yeux fatigués par la vie lui donne ce côté mystérieux et sévère. Mais je me demande s'il n'est pas exténué d'être un sombre connard. Sombre comme son cœur, car malgré le corps parfaitement taillé qui le protège, son intérieur est tout son contraire. Pourri et mauvais même les pires insultes ne peuvent le définir.

Je le déteste..Non, je le hais.

Toujours munis de son jean délavé large et son t-shirt blanc, je peine presque à croire que sa garde robe ne contient que ça. Je le sens s'approcher de mon corps tremblant, ses Doc Martens font un bruit monstre contre le sol miteux de l'hôpital comme ci chaque écho sonore était multiplié par mille le concernant, j'ai l'impression que mon ouïe s'est développé en une demi seconde.

Mon corps réagit comme il y a huit ans, tous mes sens sont en garde et chaque détail devient important. Mon regard est concentré sur la porte de la salle de bain en face de moi et pourtant ce n'est pas elle que je regarde, de ma vue panoramique je vois le corps de mon père bouger à une lenteur angoissante. Si j'entends bien le son irrégulier de ses pas quelque chose cloche, je crois même qu'il boite. À en juger par mon odorat, la pièce sent toujours cette odeur de mort cependant une goutte de whisky s'y est subtilement ajoutée. Il est donc bourré. Discrètement, sans que mon père ne le remarque, je tourne mon regard à ma droite sur la table de chevet à côté de Zach là où est posée une lampe de chevet. Si les choses venaient à dégénérer, cette lampe deviendra une arme.

Voilà l'histoire de ma vie, analyser le monde qui m'entoure de manière paranoïaque. Le but est de garder un œil sur le danger tout en trouvant une issue de sortie grâce aux éléments qui nous entourent. Tout devient une arme de défense, quand j'avais 7 ans c'était ma poupée Bratz, à 10 ans mon cahier de maths, à 13 ans mon cartable puis à 16 ans...mon cardio. Car à 16 ans j'ai couru comme jamais je ne l'ai fait, j'ai fuis ma vie, mes problèmes et mes bourreaux laissant derrière moi les traumatismes d'une gamine au cœur déchiré.

Il est à présent derrière moi, les deux mains sur mes épaules qui descendent le long de mes bras comme cette larme qui coule sur ma joue. Il émet des vas et viens qui pourraient être réconfortants si ce n'était pas lui, tout ce qu'il est fait à pour but de nuire à autrui.

–Je ne suis pas venu seul, mais je voulais te voir en premier. Il commence dans un murmure, comme si Zacharia avait une chance de se réveiller.

Je ne parlais pas, seule ma respiration paniquée lui répondait. Sans même voir son visage, j'imagine son sourire satisfait face à ma peur. Délicatement il se positionne à mes côtés et non plus derrière, il s'agenouille posant ses deux mains sales remplies de péchés sur mes cuisses. Il émet une légère pression sur celle-ci, ce qui a pour conséquence de me tendre directement.

–Tu es encore plus belle qu'avant mi hija. Tu as maigri non ?

Effectivement, huit ans suffit pour changer physiquement et psychologiquement une personne. J'étais de ses enfants ronds et joyeux qui s'acceptait tel qu'elle était jusqu'à ce que son propre père lui bourre le crâne de connerie. Je suis arrivée à l'école pensant que le monde ne pouvait pas être aussi sinistre que la maison, mais mes espoirs de filles innocentes sont vite tombés à l'eau. J'ai rencontré la méchanceté des enfants ainsi que leur capacité à ne montrer aucun regret après avoir détruit une âme innocente.

REVENGE MEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant