Chapitre 13

398 54 1
                                    

Le jour suivant fut enfin celui où ils s'éloignèrent des environs de Shizuoka. L'espace d'un instant, Izuku avait cru qu'ils retourneraient dans la ville où vivait désormais sa meilleure amie. Mais il n'en fut rien.

— Le camp s'est arrêté au sud-ouest de Jaku ! On peut s'y arrêter pour refourguer les pièces restantes !

Après avoir employé une fois de plus sa magie innée pour repérer les nomades, Mina avait émis cette idée sur leur prochaine destination. Dans les faits, le déserteur n'avait rien contre. La ville en elle-même était inconnue pour lui, suffisamment éloignée de Musutafu pour qu'il ne s'y soit jamais rendu, même en mission.

— Ça fait longtemps qu'on est pas allé à Jaku, admit Eijirou. Ils doivent en avoir bien besoin...

Ce fut au cours du premier jour de marche qu'Izuku apprit à quel point la petite ville était pauvre. À la fois éloignée de Musutafu et de Shizuoka, elle ne bénéficiait d'aucune aide extérieure et l'agriculture n'y demeurait pas florissante. Soit, l'éloignement était le même que pour d'autres villes vers lesquelles le jeune homme s'était déjà dirigé. De ce qu'il entendait provenant de ses compagnons de voyage, le sort des habitants tenait pourtant bien plus à un fil que partout ailleurs dans le pays.

— Ils sont assez proches de la frontière avec le désert, souffla Mina.

Étant elle-même originaire du désert, elle ne prit pas la peine d'en dire plus. Izuku ne chercha pas à poser de questions, comprenant à quel point ce serait indélicat de sa part. Il supposa seulement que la localisation géographique de Jaku n'aidait en aucun cas à vivre convenablement.

Il leur fallut quelques jours de trajet pour atteindre le village. Sur le chemin, ils ne croisèrent aucun bandit et ne cherchèrent pas non plus à débusquer des marchands. Les sacs de tous contenaient suffisamment de pièces de monnaie pour représenter un poids non négligeable en plus de leurs bagages, si bien qu'en réclamer plus aurait été exagéré. L'ancien chevalier s'étonna cependant de ne vraiment croiser aucun criminel : ils pensaient que la richesse attirait forcément le crime, comme il en avait fait lui-même l'expérience jusqu'à maintenant. De plus, n'avaient-ils eux-mêmes pas été attaqués tandis qu'ils s'étaient déplacés dans un chariot rempli de vivres ? Le lien était donc évident.

Mais non. Rien. Rien que le calme et la tranquillité dans un environnement vaguement plus tempéré que celle du nord-est du pays. Cela non plus, ce n'était pas désagréable à vivre.

Le village en lui-même avait quelque chose de sinistre, malgré son air calme. Pour Izuku, c'était le genre d'endroit où il ne devait jamais rien se produire, laissant les habitants dans un ennui perpétuel ponctué de misère.

— On va faire le tour comme d'habitude, souffla le chef de la bande. Quelqu'un va rester avec Deku. Un volontaire ?

— J'ai besoin d'un chaperon ? grimaça ce dernier. Je peux très bien...

— T'es le genre à pouvoir te faire voler tes affaires et à lâcher l'affaire en voyant la misère sur le visage de ton voleur...

Katsuki avait p arlé d'un air ennuyé, bien loin de son agacement habituel. Le déserteur en fut si surpris qu'il ne put répliquer mot. De toute façon, le nomade n'était pas si loin de la réalité, il en avait bien conscience.

Eijirou se porta volontaire pour lui tenir compagnie. Au fond, Izuku se demandait si lui aussi n'était pas du genre à ne pas réagir face à un vol. Depuis l'épisode de la cueillette ratée de champignons, le jeune homme lui donnait l'impression de lui ressembler plus qu'il ne l'aurait cru initialement.

Leur ronde aurait pu se dérouler sans souci. Pourtant, alors même qu'ils venaient de se mettre en marche, l'ancien chevalier n'avait de cesse de sentir le regard de son partenaire sur lui. À cause de ce qui s'était produit quelques jours plus tôt avec Ochako et Mina, il comprit exactement pourquoi.

Ton sens de la justiceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant