Chapitre 26 - Brooke ⛸️

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Le souffle court, la gorge nouée, mes yeux se brouillent de larmes au moment où le message vocal de King prend fin brusquement.

Le téléphone encore collé à l'oreille, je demeure stoïque pendant de longs instants. Entendre sa voix a réveillé les papillons dans mon estomac, torturant mon cœur tout comme mon esprit.

Ses paroles... j'ignore ce qu'elles viennent de provoquer en moi. Telle une tornade, il a réussi à mettre sens dessus-dessous mes pensées, mes souhaits. Je ne sais plus ce que je veux.

Ces trois derniers jours, je suis restée enfermée dans ma chambre, dans le noir. J'ai prétexté une mystérieuse maladie pour que ma grand-mère me fiche la paix, toutefois, elle n'est pas dupe. Elle est consciente que la visite de Dillinger a chamboulé quelque chose en moi.

J'ai même esquivé les appels et textos de Poppy, Abby et même de Tray. Il faut croire que Poppy l'a contacté pour avoir de mes nouvelles, bien qu'il n'ait pas pu lui donner la réponse qu'elle espérait. Il est passé hier, bien qu'il ne soit pas monté à l'étage. Il a plutôt discuté avec ma grand-mère, soucieux de mon état. Il a même proposé de m'emmener voir un docteur si ça n'allait pas, mais Bernadette Greene lui a assuré de ne pas s'en faire.

Avec le recul, je m'en veux d'avoir repoussé Asher, de m'être braqué comme je l'ai fait. Je repasse en boucle notre conversation, et j'imagine comment cette soirée aurait pu se terminer si je ne m'étais pas refermée comme une huître. Il ne me voulait aucun mal, simplement se montrer honnête vis-à-vis de ce qu'il avait découvert malgré lui.

À présent, j'aurais aimé réagir autrement. La peur me consumait, tout comme la honte. Après tout, comment après le visionnage de cette horreur aurait-il pu me prendre au sérieux ? Les autres mecs ne l'ont pas fait. Non, ils ont profité de la situation pour me faire des propositions déplacées et me harceler. Si seulement le débile qui voulait que je lui taille une pipe pour le remercier de la balade en voiture avait été le seul, j'aurais pu le supporter. Malheureusement, il n'était que le premier d'une longue liste.

Des propos de ce genre, j'en ai supporté pendant de longs mois, avant que ma blessure ne m'envoie à l'hôpital.

Je pensais qu'en débarquant à Oak Ridge et en faisant profil bas, on me ficherait la paix et que personne ne s'intéresserait à moi. Que j'ai été innocente, n'est-ce pas ? Je voulais croire que cette vidéo ne viendrait pas entacher mon avenir, mais une fois sur la toile, il est impossible d'effacer totalement ce genre de contenu.

Savoir que King a eu accès à cette saleté de vidéo me plonge dans un terrible désarroi. En ce qui concerne ce gros porc de Miles, ce n'est pas le fait qu'il l'ait maté qui m'effraie, mais plutôt qu'il l'ait partagé. Après tout, s'il l'a montrée à Asher, qu'est-ce qui l'empêcherait de faire pareil avec ses potes ?

Je m'en veux d'avoir laissé sous-entendre que c'était la faute de King, que s'il ne m'avait pas approché, cette situation n'aurait jamais eue lieu. Je pense qu'à ce moment-là, j'avais juste besoin de me défouler, de faire porter le chapeau à quelqu'un et surtout, de l'éloigner de moi, pour me protéger.

Ouvrir son cœur, se mettre à nu émotionnellement, c'est bien plus compliqué que se désaper devant un inconnu. En dévoilant tes failles, tu t'exposes à la plus cruelle des trahisons. J'ai fait confiance à un homme une fois, et il l'a bafouée de la pire des façons. Il a détruit l'ancienne Brooke, je ne désire pas que la nouvelle termine de la même manière. Sans oublier que ce que King me fait éprouver est à mille lieues de ce que j'ai pu ressentir auprès d'Aaron. Avec du recul, ce n'était que dalle.

Aaron n'envahissait pas mes pensées matin, midi et soir. Il ne faisait pas trembler mon corps de désir, il ne stimulait pas mon esprit, au point où j'avais une envie vorace d'en apprendre plus sur lui. Non. Pour être honnête, aujourd'hui, je ne comprends pas pourquoi j'ai accepté de sortir avec lui. Sans doute pour casser ma routine, celle dans laquelle je vivais enfermée depuis ma plus tendre enfance. Je pensais qu'avoir un petit-ami me ferait du bien, que je pourrais plus m'intégrer au sein de l'université et sortir de ma coquille. Notre relation n'a duré que six mois, assez pour me bousiller comme jamais personne auparavant.

Oak Ridge Campus #1 King © (SOUS CONTRAT D'ÉDITION)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant