La guerre est terminée depuis plus d'un an maintenant. Et dans les rues de Paris, on s'empresse de se refaire une beauté avant de rejoindre les soirées mondaines pour fêter la nouvelle année 1920. Dans le cœur des Français, l'envie d'un pays calme et posé est le vœu principal. Et je me sens comme eux. Je prie constamment pour que nos vies ne soient plus aussi chamboulées qu'elles ne l'étaient. J'ai été envoyé très tard sur le front, et les choses se calmaient déjà. Je n'ai pas eu à subir les horreurs que les autres hommes ont subi. J'ai juste eu les traumatismes et les douleurs mentales qui brûlent mes souvenirs. La guerre m'a pris mon père, et à mon retour en France, ma mère en était morte de chagrin. Depuis mon retour, je suis l'unique gérant de la petite pharmacie du 8ee arrondissement. Une pharmacie toute petite, elle n'est même pas si accueillante, elle suffit juste aux autres.
Et cela fonctionne plutôt bien, parce qu'évidemment le malheur des uns fait le bonheur des autres. La seule décoration sont les rares photos qu'ils me restaient de mes parents, quelques bougies bien travaillées et des plantes. Je n'ai jamais eu le courage d'en faire plus.
Ma vie est plutôt correcte, j'ai pu facilement retrouver une place dans la société contrairement à d'autres. Mon service pour les blessés me vaut aussi des places privilégiées dans des grands bals et des soirées prestigieuses. Je ne me sens pas forcément à ma place, mais je pense que ça ne peut me faire que du bien et que me laisser aller pendant ces soirées est réconfortant. J'ai vingt quatre ans, et les années terribles que l'on a vécues m'en font paraître tellement plus.
Pour cette soirée du nouvel an, je suis invité au Lancaster, un immense palace dans le 8e arrondissement. Les politiciens autour de Poincaré sont les organisateurs de la soirée. Ils ne seront pas présents en revanche, la soirée se déroulera donc entre personnes de la haute société mais pas trop. Et peut-être que c'est une bonne chose dans un sens.
Alors lorsque j'entends les 18h tapantes, je prends l'initiative de fermer la pharmacie et de rejoindre ma chambre à l'étage pour pouvoir me préparer. Je n'y connais personne, ou du moins seulement de vue. Les aléas de la vie ont fait que je n'ai pas gardé contact avec mes camarades d'école, certains d'entre eux sont même morts, et je n'ai pas non plus de relation avec les habitants du quartier. Je ne suis que le pharmacien, orphelin, et sans grand intérêt aux yeux des autres. Et je ne peux en vouloir à personne. Alors même si ma présence n'aura aucune incidence sur ce bal, je suis quand même reconnaissant de pouvoir y aller. Passer Noël seul a été une épreuve suffisamment compliquée, une journée qui m'a rappelé encore une fois que je finirai mes jours seul. Que plus jamais je n'aurais d'anniversaire avec mes parents, plus de fêtes religieuses, plus de sorties en famille. Plus rien. Pour une fois, ce soir, je ne serais pas enfermé entre ces murs sombres. La musique battra son plein et l'alcool m'aidera à soigner les blessures profondes que les médicaments de ma pharmacie ne peuvent pas soigner.
Lorsque dix-neuf heures s'affiche sur ma montre à gousset, je suis déjà à quelques pas du Lancaster. Le costume trois pièces que je porte ne me plaît pas spécialement mais c'est un indispensable pour les évènements de ce genre. L'entrée de l'hôtel est remplie, les gens s'y
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Le bal du Lancaster
FanfictionL'histoire est terminée. Vous pouvez acheter la version papier ici : https://www.lulu.com/shop/adeline-ruczynski/le-bal-du-lancaster/paperback/product-e7e8gw8.html?q=Le+bal+du+Lancaster&page=1&pageSize=4