Les jours entre l'arrivée de la lettre et le jour du bal m'ont paru interminables. Presqu'un mois s'est écoulé et contrairement à ma première envie, j'ai longuement hésité avant de venir. Pour Nouvel An, c'était compréhensible que mon nom soit ajouté à la liste. Le président voulait remercier gracieusement ceux qui ont contribué à l'économie du pays, également à l'entraide et aux besoins des soldats et de leurs familles. De plus, j'avais moi-même participé à cette guerre. Pourtant, cette fois-ci, cette invitation me semblait étrange. Dans un premier temps parce que le président n'était plus Poincaré, et parce que le conseil avait lui aussi changé. Aussi, parce que je n'étais pas sûr qu'ils allaient remercier les gens comme nous pendant plusieurs mois, et je me suis réellement torturé l'esprit pour savoir ce que ce bal cachait. J'avais peur de ce que j'allais y découvrir. Peur d'être embarqué dans quelque chose que je ne souhaitais pas. Mais refuser signifiait prendre un risque d'être à l'encontre de ceux qui nous gouvernaient, et aussi je risquais de me priver de m'assurer qu'Harry aille bien.
Alors j'ai fini par aller me chercher un nouveau trois pièces et là maintenant, à quelques minutes de mon arrivée, je suis presque sûr de prendre la bonne décision. J'ai coiffé proprement mes cheveux en arrière et j'ai peut-être un peu abusé du parfum que je porte. Lorsque je ferme la porte de la pharmacie, je sens mon cœur battre plus qu'à l'accoutumée. Je me fais beaucoup trop d'idées à propos de ce bal. Tout me procure de l'anxiété à vrai dire. J'aperçois rapidement des gens tout aussi bien habillés, se diriger vers la rue de l'hôtel. Je saisis alors l'occasion de me fondre dans la masse. Cette soirée a l'air encore plus grandiose que la première vue de l'extérieur. Je peux déjà apercevoir les lustres immenses qui illuminent les pièces de l'hôtel. Les voitures s'arrêtent devant l'entrée et des gens de qualité en descendent. Je m'approche des hommes qui surveillent l'entrée et qui vérifient mon invitation. Je me revois il y a trois mois, de la même manière, à découvrir le lieu, la décoration, les gens de la haute société. Je me revois goûter aux alcools et aux gourmets les plus prestigieux. Maintenant, je me sens davantage à l'aise. Parce que je sais -presque, à quoi m'attendre. J'entre enfin dans ce grand hall où les gens bavardent déjà, où la musique se fait entendre depuis les grands salons. Avec peu de confiance, je m'engage dans un de ces derniers, mon regard se tourne immédiatement vers l'endroit où j'ai bousculé Harry la première fois, puis je regarde en direction du bar où nous avons discuté des heures durant. Il n'y est pas. Il n'y est pas et je ne sais pas à quoi je m'attendais finalement. Je parcourt la pièce d'un rapide coup d'œil et je ne vois aucun homme aux boucles brunes. Je sens ma respiration se couper davantage, je suis en train d'étouffer dans un monde qui n'est pas le mien. Les gens autour de moi sont définitivement trop bien pour qui je suis et je me sens nauséeux. Il y a des politiciens, des créateurs de marques, et il y a moi. Je sens bien que mes efforts ne seront pas suffisants pour que je sois accepté ici et d'ailleurs quels efforts ? Parce qu'après tout je me contente d'observer les autres et même si j'engage la conversation, leur intérêt pour moi se perd bien trop vite. Je suis invisible. Et j'ai seulement envie de m'enfuir pour rentrer chez moi, loin de cette aristocratie qui me donne le vertige.
"Toujours dans le coin pour me sauver la vie apparemment."
Je laisse échapper un sursaut et remarque Harry à mes côtés. Harry. Il est là et je ne suis pas en train d'halluciner. Immédiatement, je baisse les yeux vers le bras que j'ai soigné et il m'empêche directement de parler.
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Le bal du Lancaster
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